Mémoires pour servir à l'Histoire de France sous Napoléon, Tome 2. Baron Gaspard Gourgaud

Mémoires pour servir à l'Histoire de France sous Napoléon, Tome 2 - Baron Gaspard Gourgaud


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      Mémoires pour servir à l'Histoire de France sous Napoléon, Tome 2/2 Écrits à Sainte-Hélène par les généraux qui ont partagé sa captivité

      MÉMOIRES DE NAPOLÉON

DIPLOMATIE. – GUERRE1800 ET 1801

      Préliminaires de paix signés par le comte de Saint-Julien. – Négociations avec l'Angleterre, pour un armistice naval. – Commencement des négociations de Lunéville. – Affaires d'Italie; invasion de la Toscane. – Positions des armées. – Opérations de l'armée Gallo-Batave. Combat de Burg-Eberach. – Opérations de l'armée du Rhin. Bataille de Hohenlinden. – Passage de l'Inn, de la Salza. Armistice du 25 décembre 1800. – Observations. – Armée des Grisons; passage du Splugen; marche sur Botzen. – Armée d'Italie; passage du Mincio; passage de l'Adige. – Suspension d'armes de Trévise, le 16 janvier 1801; Mantoue cédée le 26 janvier. – Corps d'observation du Midi. Armistice avec Naples, signé à Foligno, le 28 février 1801.

      § Ier

      Le lieutenant général comte de Saint-Julien arriva à Paris, le 21 juillet 1800, porteur d'une lettre de l'empereur d'Allemagne, au premier consul. Il s'annonça comme plénipotentiaire chargé de négocier, conclure et signer des préliminaires de paix. La lettre de l'empereur était précise; elle contenait des pouvoirs, car il y était dit: Vous ajouterez foi à tout ce que vous dira de ma part le comte de Saint-Julien, et je ratifierai tout ce qu'il fera. Le premier consul chargea M. de Talleyrand de négocier avec le plénipotentiaire autrichien, et en peu de jours les préliminaires furent arrêtés et signés. Par ces préliminaires, il était convenu que la paix serait établie sur les conditions du traité de Campo-Formio, que l'Autriche recevrait, en Italie, les indemnités que ce traité lui accordait en Allemagne; que jusqu'à la signature de la paix définitive, les armées des deux puissances resteraient, tant en Italie qu'en Allemagne, dans leur situation actuelle; que la levée en masse des insurgés de la Toscane ne recevrait aucun accroissement, et qu'aucune troupe étrangère ne serait débarquée dans ce pays.

      Le rang élevé du plénipotentiaire, la lettre de l'empereur dont il était porteur, les instructions qu'il disait avoir, son ton d'assurance, tout portait à regarder la paix comme signée; mais en août, on reçut des nouvelles de Vienne: le comte de Saint-Julien était désavoué et rappelé; le baron de Thugut, ministre des affaires étrangères d'Autriche, faisait connaître que, par un traité conclu entre l'Angleterre et l'Autriche, cette dernière s'était engagée à ne traiter de la paix, que conjointement avec l'Angleterre, et qu'ainsi l'empereur ne pouvait ratifier les préliminaires du comte de Saint-Julien, mais que ce monarque desirait la paix; que l'Angleterre la desirait également, comme le constatait la lettre de lord Minto, ministre anglais à Vienne, au baron de Thugut. Ce lord disait que l'Angleterre était prête à envoyer un plénipotentiaire pour traiter, conjointement avec le ministre autrichien, de la paix définitive entre ces deux puissances et la France.

      Dans une telle circonstance, ce que la république avait de mieux à faire, c'était de recommencer les hostilités. Cependant le premier consul ne voulut négliger aucune des chances qui pouvaient rétablir la paix avec l'Autriche et l'Angleterre; et, pour parvenir à ce but, il consentit, 1o à oublier l'affront que venait de faire à la république le cabinet de Vienne, en désavouant les préliminaires qui avaient été signés par le comte de Saint-Julien; 2o à admettre des plénipotentiaires anglais et autrichiens au congrès; 3o à prolonger l'armistice existant entre la France et l'Allemagne, pourvu que, de son côté, l'Angleterre consentît à un armistice naval, puisqu'il n'était pas juste que la France traitât avec deux puissances alliées, étant en armistice avec l'une et en guerre avec l'autre.

      § II

      Un courrier fut expédié à M. Otto, qui résidait à Londres comme commissaire français, chargé de l'échange des prisonniers. Le 24 août, il adressa une note au lord Grenville, en lui faisant connaître que lord Minto ayant déclaré l'intention où était le gouvernement anglais, de participer aux négociations qui allaient s'ouvrir avec l'Autriche, pour le rétablissement de la paix définitive entre l'Autriche et la France, le premier consul consentait à admettre le ministre anglais aux négociations; mais que l'œuvre de la paix en devenait plus difficile; que les intérêts à traiter étant plus compliqués et plus nombreux, les négociations en éprouveraient nécessairement des longueurs; et qu'il n'était pas conforme aux intérêts de la république que l'armistice conclu à Marengo, et celui conclu à Bayarsdorf, continuassent plus long-temps, à moins que, par compensation, on n'établît aussi un armistice naval.

      Les dépêches de lord Minto n'étaient pas encore arrivées à Londres, et lord Grenville, fort étonné de la note qu'il recevait, envoya le chef du transport-office, prier M. Otto de remettre les pièces qui y avaient donné lieu, ce qu'il fit aussitôt. Mais peu après, le cabinet de Saint-James reçut son courrier de Vienne; lord Grenville répondit à M. Otto, que l'idée d'un armistice applicable aux opérations navales, était neuve dans l'histoire des nations. Du reste, il déclara qu'il était prêt à envoyer un plénipotentiaire au lieu qui serait désigné pour la tenue du congrès; il fit connaître que ce plénipotentiaire serait son frère Thomas Grenville, et demanda les passe-ports pour qu'il pût se rendre en France. C'était éluder la question; et M. Otto, le 30 août, réclama une réponse catégorique avant le 3 septembre, vu que, le 10, les hostilités devaient recommencer en Allemagne et en Italie. Lord Grenville, le 4 septembre, fit demander un projet par écrit, attendu qu'il avait peine à comprendre ce qu'on entendait par un armistice applicable aux opérations navales. M. Otto envoya le projet du gouvernement français rédigé. Les principales dispositions étaient celles-ci: 1o les vaisseaux de guerre et de commerce des deux nations, jouiront d'une libre navigation, sans être soumis à aucune espèce de visite; 2o les escadres, qui bloquent les ports de Toulon, Brest, Rochefort et Cadix, rentreront dans leurs ports respectifs; 3o les places de Malte, Alexandrie et Belle-Isle en mer, seront assimilées aux places d'Ulm, Philipsbourg et Ingolstadt; et, en conséquence, tous les vaisseaux français et neutres pourront y entrer librement.

      Le 7 septembre, M. Grenville répondit que S. M. Britannique admettait le principe d'un armistice applicable aux opérations navales, quoique cela fût contraire aux intérêts de l'Angleterre; que c'était un sacrifice que cette puissance voulait faire en faveur de la paix et de son alliée l'Autriche; mais qu'aucun des articles du projet français n'était admissible; et il proposa d'établir les négociations sur un contre-projet qu'il envoya. Ce contre-projet portait: 1o les hostilités cesseront sur mer; 2o on accordera aux places de Malte, Alexandrie et Belle-Isle, des vivres pour quatorze jours à la fois, et d'après le nombre d'hommes qu'elles ont pour garnison; 3o le blocus de Brest et des autres ports français ou alliés sera levé; mais aucun des vaisseaux de guerre, qui y sont, n'en pourra sortir pendant toute la durée de l'armistice; et les escadres anglaises resteront à la vue de ces ports.

      Le commissaire français répondit le 16 septembre, que son gouvernement offrait le choix à S. M. Britannique, que les négociations s'ouvrissent à Lunéville, que les plénipotentiaires anglais et autrichiens fussent admis à traiter ensemble, et que pendant ce temps-là la guerre eût lieu sur terre comme sur mer; ou bien qu'il y eût armistice sur terre et sur mer; ou enfin, qu'il y eût armistice avec l'Autriche, et qu'on ne traitât à Lunéville qu'avec elle; qu'on traitât à Londres ou à Paris avec l'Angleterre, et que l'on continuât à se battre sur mer. Il observait que l'armistice naval devait offrir à la France des compensations pour ce qu'elle perdait par la prolongation de l'armistice sur le continent, pendant lequel l'Autriche réorganisait ses armées et son matériel, en même temps que l'impression des victoires de Marengo et de Moeskirch s'effaçait du moral de ses soldats; que, pendant cette prolongation, le royaume de Naples, qui était en proie à toutes les dissensions et à toutes les calamités, se réorganisait et levait une armée; qu'enfin c'était à la faveur de l'armistice, que des levées d'hommes se faisaient en Toscane et dans la marche d'Ancône.

      Le vainqueur n'avait accordé au vaincu tous ces avantages, que sur sa promesse formelle de conclure sans délai une paix séparée. Ceux que la France pouvait trouver dans le principe d'un armistice naval, ne pouvaient consister dans l'approvisionnement des ports de la république, qui certes ne manquait pas de moyens intérieurs de circulation, mais bien dans le rétablissement de ses communications avec l'Égypte, Malte et l'Ile-de-France. M. Grenville fit demander, le 20 septembre, de nouvelles explications; et M. Otto lui fit savoir le lendemain,


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