Une Vie D'Hôtesse De L'Air. Marina Iuvara
Dans la cuisine, en voyant le nouveau coûteau à la lame en céramique et les différents sachets de thé vert, je compris la raison des boucles rebelles de Ludovica ; le vol pour Tokyo dure au moins douze heures, et sa mise en plis n’a pu résister. Ludovica, avant de prendre congé de nous pour son nécessaire “ repos après le vol ”, décrit ses impressions sur cette ville si frénétique en contraste avec la délicatesse de ses habitants, avec leur extrême timidité qui les porte souvent à rire en mettant leur main devant leur bouche, avec leurs milles inclinaisons pour saluer.
Elle fut surprise par les gratte ciel, par la multitude de voitures et de piétons sur les routes, par les écritures incompréhensibles des idéogrammes japonais. Elle raconta être allée au marché au poisson de Tsukiji, le plus grand au monde, tellement propre et ordonné, d’avoir vu des papeteries à neufs étages et des bars qui contiennent au maximum cinq persones ; de s’être perdue à Harajuku, un quartier à la mode dans la minuscule rue Takeshita parmi les boutiques de tendence fréquentées par les plus jeunes aux vêtements apparents et extravagants ; d’avoir su qu’il existe des restaurants appelés Maid Cafè, où les serveuses alimentent les clients, pour démontrer leur soumission, elles les masses et les entretiennent avec des dances et des chansons, comme des antiques geishas, au contraire dans les Butler Cafè ce sont les maîtres d’hôtel qui servent les dames, de la même manière. Elle nous informa que là, les prix sur les nouveaux modèles d’appareils photo et caméras sont très compétitifs et que l’on peut en trouver de seconde mains en parfaites conditions, comme aussi les dernières nouveautés en matière de technologie non encore arrivées en Italie, que les montres de marques prestigieuses ont des prix inférieurs de 35% par rapport aux prix italiens, et on en trouve de seconde mains avec la garantie des boutiques Best. Elle nous dît enfin, avant de s’écrouler de fatigue sur le lit, que dans un restaurant appelé Al dente, les spaghettis sont excellents, presque meilleurs qu’en Italie, et qu’elle était enhousiaste du massage chiropracteur fait dans la zone de Shinjuku.
Nous apprîmes de simples mais nécessaires règles à suivre, que j’écris avec diligence sur un bout de papier et que j’appliquai sur le frigo avec l’aimant que Valentina avait pris à Buenos Aires, ils représentaient deux danseurs de tango, et avait l’inscription “ Bienvenido in Argentina ”, le premier d’une longue série d’aimants provenants de tous les coins du monde qui envahirent radicalement le frigo, faisant par la suite perdre de vue ce rappel à consulter avant chaque vol qui nous fut si utile initialement. Avec le temps il est devenu une partie de moi.
Ce memorandum disait ainsi :
“ Choses à ne pas faire :
- Ne pas donner l’impression d’être pressé.
- Ne jamais parler d’épisodes personnels entre collègues durant le service.
- Eviter les expressions d’ennui ou d’apathie et les attitudes distantes
- Essayer de ne pas utiliser des phrases autoritaires du genre :
“ Fermez votre guéridon ! ”
“ Ceinture ! ”
“ Portable ! ” mais inviter gentillement à suivre les directives.
- Ne pas parler à haute voix entre collègues
- Ne pas se décourager en trouvant des places libres proches de personnes qui voyagent ensemble et font d’éventuels déplacements mais inviter à se rendre au check-in à l’avance pour avoir davantage de possibilités de s’attribuer les places.
“ Choses à se rappeler ”
A - Exgigences de base requises : capacité de garantir la sécurité, la responsabilité et la professionalité.
B - Le passager a besoin de confort pychologique, de se sentir protégé du stress et de la peur de voler.
C - Eléments qui ne peuvent jamais manquer : courtoisie, attention et disponibilité durant tout le vol ”
Nous comprîmes immédiatement que notre attitude est fondamentale pour contribuer à la résolution d’un problème à bord :
Certains inconvénients et mauvais services étaient justement l’objet de plaintes de la part des passagers et impliquaient la nécessité d’une intervention, réussir à comuniquer clairement et essayer de résoudre les difficultés et les problèmes qui se présentaient à bord n’était pas toujours simple.
Il fallait tenir compte de la gravité du problème, du contexte sur le moment, du caractère et de l’état psychologique et physique de l’individu avec lequel nous étions en relation, car nous ne connaissions jamais la personne avec laquelle nous nous rapportions, la situation qui aurait pu se vérifier et les ultérieures dégénérations possibles qui auraient pu surgir.
Calmement et avec détermination, il était fondamental d’assister en prenant sur soi le problème de l’autre et en se présentant comme un point de référence sûr, comprendre les motifs de ce qui est arrivé et centrer le problème.
Il était important d’écouter ce que l’autre disait, mais également d’observer objectivement la situation, informer et expliquer avec sensibilité et responsabilité, en exposant avec transparence les solutions possibles.
Souvent l’insatisfaction du passager était influencée par des facteurs externes comme les retards, les transits difficiles, les embarquements désordonnés, avions inconfortables, nettoyages rapides, donc, un style compréhensif et des propositions pouvaient nous aider à la résolution du problème.
Peur de voler
Eva, un jour d’octobre, devint insuportable après les habituelles discussions que nous faisions sur l’ordre à maintenir dans la maison vu que les avertissements lui étaient principalement adressés.
J’entendais ses jurons assaisonnés de citations en langue napolitaine, en contraste avec son discours habituellement privé d’inflexions dialectales.
Etaient-ce les fréquentes radiations cosmiques, les champs magnétiques, les vibrations ou le bruit des avions qui lui donnaient ces changements d’humeur ?
Ludovica, entre temps, décida de réserver un massage ayurvedique pour tonifier les muscles, relaxer le corps et stimuler la circulation auprès de l’esthéticienne indienne qui avait aménagé un espace dans les alentours, elle m’informa qu’à partir du lundi elle se serait mise au régime car Eva lui avait dit que dernièrement elle lui semblait appesantie.
Moi, j’étais recroquevillée sur le divan avec de comodes vêtements d’intérieur et un cardigan masculin informe couleur crême, un plaid sur les jambes me protégeait des premiers vents d’hiver, j’étais sur le point de m’accorder un détâchement mental, un moment de relax.
Je ne parvenais pas à dormir car l’adrénaline de
“ l’après vol ” n’était pas encore passée.
Tout à coup le souvenir de la journée à peine passée m’assailli.
J’avais connu à bord les époux Lucherini : Madame Lucrezia et Monsieur Massimo.
Durant l’embarquement j’avais vite remarqué des signes de tension dans leur comportement ; ils prenaient leurs places le dos légèrement courbé, en marchant de manière rigide, avec le menton baissé, la tête inclinée et une attidude passive, rémisive.
Les bras de Massimo étaient raides et rigides le long des hanches, tandis que ceux de Lucrezia étaient croisés, presque comme pour se protéger instinctivement. Ils regardaient tous les deux autour d’eux, comme s’ils étaient en train de chercher quelque chose, une issue de secours ; leurs pupilles étaient tellement dilatées qu’elles semblaient atteintes de mydriase.
Les mouvements de leur corps étaient lents et je remarquai qu’ils m’adressaient un léger sourire, que j’échangeai gracieusement.
Ils s’asseyaient de manière