Le chef d'orchestre: théorie de son art. Hector Berlioz

Le chef d'orchestre: théorie de son art - Hector Berlioz


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le sens précis des termes italiens indicateurs des mouvements.

      Sans doute personne ne sera embarrassé pour distinguer un Largo d'un Presto. Si le Presto est à deux temps, un conducteur un peu sagace, à l'inspection des traits et des dessins mélodiques que le morceau contient, arrivera même à trouver le degré de vitesse que l'auteur a voulu. Mais si le Largo est à quatre temps, d'un tissu mélodique simple, ne contenant qu'un petit nombre de notes dans chaque mesure, quel moyen aura le malheureux conducteur pour découvrir le mouvement vrai? et de combien de manières ne pourra-t-il pas se tromper? Les divers degrés de lenteur qu'on peut imprimer à l'exécution d'un pareil Largo sont très nombreux; le sentiment individuel du chef d'orchestre sera dès lors le moteur unique; et c'est du sentiment de l'auteur et non du sien qu'il s'agit. Les compositeurs doivent donc, dans leur œuvres, ne pas négliger les indications métronomiques, et les chefs d'orchestre sont tenus de les bien étudier. Négliger cette étude est, de la part de ces derniers, un acte d'improbité.

      Maintenant je suppose le conducteur parfaitement instruit des mouvements de l'œuvre dont il va diriger l'exécution ou les études; il veut donner aux musiciens placés sous ses ordres le sentiment rythmique qui est en lui, déterminer la durée de chaque mesure, et faire observer uniformément cette durée par tous les exécutants. Or, cette précision et cette uniformité ne s'établiront dans l'ensemble plus ou moins nombreux de l'orchestre et du chœur, qu'au moyen de certains signes faits par le chef.

      Ces signes indiqueront les divisions principales, les temps de la mesure, et, dans beaucoup de cas, les subdivisions, les demi-temps. Je n'ai pas à expliquer ici ce qu'on entend par les temps forts et les temps faibles, je suppose que je parle à des musiciens.

      Le chef d'orchestre se sert ordinairement d'un petit bâton léger, d'un demi-mètre de longueur, et plutôt blanc que de couleur obscure (on le voit mieux) qu'il tient à la main droite, pour rendre clairement appréciable sa façon de marquer le commencement, la division intérieure et la fin de chaque mesure. L'archet, employé par quelques chefs violonistes, est moins convenable que le bâton. Il est un peu flexible; ce défaut de rigidité et la petite résistance qu'il offre en outre à l'air à cause de sa garniture de crins, rendent ses indications moins précises.

      La plus simple de toutes les mesures, la mesure à deux temps, se bat très simplement aussi.

      Le bras et le bâton du conducteur étant élevés, de façon que sa main se trouve au niveau de sa tête, il marque le premier temps en abaissant la pointe du bâton perpendiculairement de haut en bas (par la flexion du poignet, autant que possible et non en abaissant le bras dans son entier), et le second temps en relevant perpendiculairement le bâton par le geste contraire.

      La mesure à un temps n'étant en réalité, pour le chef d'orchestre surtout, qu'une mesure à deux temps extrêmement rapide, doit être battue comme la précédente. L'obligation où se trouve le chef de relever la pointe de son bâton après l'avoir baissée, divise d'ailleurs nécessairement cette mesure en deux parties.

      Dans la mesure à quatre temps, le premier geste fait de haut en bas

est adopté partout pour marquer le premier temps fort, le commencement de la mesure. Le deuxième mouvement, fait par le bâton conducteur de droite à gauche en se relevant
désigne le second temps (premier temps faible). Un troisième, transversal de gauche à droite
désigne le troisième temps (second temps fort), et un quatrième, oblique de bas en haut, indique le quatrième temps (second temps faible). L'ensemble de ces quatre gestes peut être figuré de la sorte:

      Il est important que le conducteur, en agissant ainsi dans ces diverses directions, ne meuve pas beaucoup son bras et, par suite, ne fasse pas parcourir au bâton un trop grande espace, car chacun de ces gestes doit s'opérer à peu près instantanément, ou du moins ne prendre qu'un instant si court qu'il soit inappréciable. Si cet instant devient appréciable au contraire, multiplié par le nombre de fois où le geste se répète, il finit par mettre le chef d'orchestre en retard du mouvement qu'il veut imprimer et par donner à sa direction une pesanteur des plus fâcheuses. Ce défaut a, de plus, pour résultat de fatiguer le chef inutilement et de produire des évolutions exagérées, presque ridicules, qui attirent sans motif l'attention des spectateurs et deviennent très désagréables à la vue.

      Dans la mesure à trois temps le premier geste, fait de haut en bas, est également adopté partout pour marquer le premier temps, mais il y a deux manières de marquer le second. La plupart des chefs d'orchestre l'indiquent par un geste de gauche à droite.

      Quelques maîtres de chapelle allemands font le contraire et portent le bâton de droite à gauche.

      Cette manière a le désavantage, quand le chef tourne le dos à l'orchestre, ainsi qu'il arrive dans les théâtres, de ne permettre qu'à un très petit nombre de musiciens d'apercevoir l'indication si importante du second temps, le corps du chef cachant alors le mouvement de son bras. L'autre procédé est meilleur, puisque le chef déploie son bras en dehors, en l'éloignant de sa poitrine, et que son bâton, s'il a soin de l'élever un peu au-dessus du niveau de son épaule, reste parfaitement visible à tous les yeux.

      Quant le chef regarde en face les exécutants, il est indifférent qu'il marque le second temps à droite ou à gauche.

      En tout cas, le troisième temps de la mesure à trois est toujours marqué comme le dernier de la mesure à quatre, par un mouvement oblique de bas en haut.

      Les mesures à cinq et à sept temps seront plus compréhensibles pour les exécutants, si, au lieu de les dessiner par une série spéciale de gestes, on les traite, l'une comme un composé des mesures à trois et à deux, l'autre comme un composé des mesures à quatre et à trois.

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