Une Mer De Boucliers . Морган Райс

Une Mer De Boucliers  - Морган Райс


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qu’elle aurait pu dire ou faire quelque chose de différent pour changer les choses… En vérité, elles étaient à l’opposé l’une de l’autre et rien n’aurait pu changer cela. Deux êtres humains radicalement différents, piégés au sein d’une même famille et d’une relation maternelle peu satisfaisante. Gwen n’était pas la fille que sa mère aurait voulu et la Reine n’était pas la mère dont Gwen aurait eu besoin. Gwen se demandait presque pourquoi le destin les avait réunies…

      La Reine hocha la tête et Gwen vit qu’elle comprenait.

      — C’est moi qui suis désolée, répondit-elle. Tu es une fille extraordinaire. Et une Reine extraordinaire. Bien meilleure que je ne l’ai été. Et une bien meilleure souveraine que ton père. Il serait fier de toi. Tu méritais une meilleure mère que moi.

      Gwen chassa ses larmes.

      — Vous étiez comme il faut, mère.

      La Reine secoua la tête.

      — J’étais une bonne Reine. Une épouse attentionnée. Mais jamais une bonne mère. Pas pour toi, du moins. Je pense que tu me ressemblais trop et que cela me faisait peur.

      Gwen serra sa main, tout en pleurant, en souhaitant avoir un peu plus de temps avec elle, en regrettant de n’avoir jamais pu lui parler autrefois comme elle le faisait aujourd’hui. Maintenant, elle était Reine à son tour, plus âge, mère d’un enfant… Et elle voulait garder sa mère après d’elle. Elle voulait se tourner vers elle pour lui demander conseil. Quelle ironie ! Gwen était condamnée à perdre sa mère au moment même où elle avait le plus besoin d’elle.

      — Mère, je vous présente mon enfant. Mon fils. Guwayne.

      Les yeux de la Reine s’écarquillèrent de surprise et elle leva péniblement la tête des coussins pour apercevoir enfin le bébé dans les bras de Gwen.

      Elle poussa un petit cri et s’assit sur son séant, avant d’éclater en sanglots.

      — Oh, Gwendolyn…, dit-elle. C’est le plus beau bébé que j’aie jamais vu.

      Elle tendit la main pour toucher Guwayne, caressant son front du bout de ses doigts, et pleura de plus belle.

      Elle se tourna lentement vers Thor.

      — Tu seras un bon père, dit-elle. Mon ancien mari t’aimait beaucoup. Je comprends pourquoi, maintenant. Je me suis trompé à ton égard. Pardonne-moi. Je suis heureux que tu sois avec Gwendolyn.

      Thor hocha la tête d’un air grave et posa la main sur l’épaule de la Reine quand elle tendit le bras vers lui.

      — Il n’y a rien à pardonner, dit-il.

      La Reine se tourna alors vers Gwendolyn et son regard se durcit, comme si sa personnalité froide et sévère remontait brusquement à la surface.

      — Tu auras à affronter bien des épreuves, dit-elle. J’ai suivi de près ton règne. Mes espions sont partout. J’ai peur pour toi.

      Gwendolyn lui tapota la main.

      — Mère, ne vous inquiétez pas pour moi. Ce n’est pas le moment de discuter des affaires de l’état.

      Sa mère secoua la tête.

      — Il est toujours l’heure de discuter des affaires de l’état. Aujourd’hui plus que jamais. Ne l’oublie pas : les funérailles font partie des affaires de l’état. Ce ne sont pas des cérémonies destinées uniquement à la famille. Ce sont des événements politiques.

      Sa mère toussa longtemps, puis prit une longue inspiration.

      — Je n’ai pas beaucoup de temps, alors écoute-moi bien, dit-elle d’une voix plus faible. Ne traite pas ce que je vais te dire à la légère, même si cela ne te plait pas.

      Gwen se pencha vers elle et hocha gravement la tête.

      — Tout ce que vous voudrez, mère.

      — Ne fais pas confiance à Tirus. Il va te trahir. Ne fais pas confiance à son peuple. Ces MacGils ne sont pas comme nous. Ils ne portent que notre nom. Ne l’oublie jamais.

      Elle prit une inspiration sifflante.

      — Ne fais pas confiance aux McClouds non plus. Ne t’imagine pas que tu pourras faire la paix avec eux.

      Encore une fois, elle chercha l’air, pendant que Gwen réfléchissait à ses conseils.

      — Prends bien soin de garder une armée forte et des défenses solides. Le plus vite tu comprendras que la paix n’est qu’une illusion, le plus paisible sera ton pays.

      Elle s’interrompit, le souffle court, et ferma les yeux. La voir faire tant d’effort pour reprendre sa respiration brisait le cœur de Gwen.

      Gwen espérait que ces conseils n’étaient que les derniers mots d’une vieille femme désabusée, mais elle reconnaissait qu’ils portaient une part de vérité. Une vérité que Gwen n’aimait pas entendre.

      Sa mère ouvrit à nouveau ses paupières lourdes.

      — Ta sœur, Luanda, murmura-t-elle. Je veux qu’elle soit présente à mes funérailles. C’est ma fille. Ma fille aînée.

      Gwendolyn eut un hoquet de surprise.

      — Elle a fait des choses terribles et elle mérite son exil, mais laisse-la venir, juste cette fois. Quand vous me mettrez en terre, je veux qu’elle soit là. Ne refuse pas la requête d’une femme mourante.

      Gwendolyn poussa un soupir, déchirée. Elle souhaitait faire plaisir à sa mère, mais elle ne voulait pas faire revenir Luanda après ce que cette dernière avait fait.

      — Promets-le moi, dit sa mère en serrant la main de Gwen. Promets-le moi.

      Enfin, Gwendolyn hocha la tête, quand elle comprit qu’elle ne pourrait pas dire non.

      — Je vous le promets, mère.

      La Reine soupira et hocha la tête, satisfaite. Elle renversa la tête sur son oreiller.

      — Mère, dit Gwen en se raclant la gorge. J’aimerais que vous bénissiez mon enfant.

      Sa mère ouvrit faiblement les yeux et lui jeta un regard. Elle battit des paupières avant de secouer lentement la tête.

      — Ton bébé est déjà béni, autant qu’un enfant puisse l’être. Il a ma bénédiction mais il n’en a pas besoin. Tu verras, ma fille, que ton enfant est bien plus puissant que toi, que Thorgrin, que quiconque. Une prophétie l’a annoncé il y a des années.

      Sa mère prit une inspiration sifflante. Gwen comprit qu’elle en avait terminé et se prépara à partir. Ce fut alors que la Reine ouvrit les yeux une dernière fois :

      — N’oublie pas ce que ton père t’a appris, dit-elle d’une voix si faible qu’elle résonnait à peine dans le silence. Parfois un royaume connaît avant tout la paix quand il est en guerre.

      CHAPITRE SEPT

      Steffen galopait vers l’est, en soulevant des nuages de poussière. Depuis des jours, il suivait la route en compagnie d’une douzaine de membres de la garde royale. Il était honoré que la Reine lui ait confié cette mission et il était bien décidé à la mener à bien, en passant de ville en ville avec ses caravanes chargées d’or, d’argent, de fournitures, de grain, de blé, de provisions diverses et de matériau de construction de toutes natures. La Reine voulait porter secours aux innombrables petits villages de l’Anneau et les aider à reconstruire. Elle avait choisi Steffen comme ambassadeur.

      Steffen avait déjà traversé de nombreux villages et distribué des wagons de fourniture au nom de la Reine, en prenant soin de les donner avant tout aux familles dans le besoin. Voir apparaître la joie sur ces visages à mesure qu’il prodiguait ses dons lui apportait une profonde satisfaction. Un village


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