LUPIN - Les aventures du gentleman-cambrioleur. Морис Леблан

LUPIN - Les aventures du gentleman-cambrioleur - Морис Леблан


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posai cela en évidence au milieu de la pièce. À côté, la sacoche de Mme Renaud. Pouvais-je ne point la rendre à l’excellente amie qui m’avait secouru ?

      Je confesse cependant que j’en retirai tout ce qui présentait un intérêt quelconque, n’y laissant qu’un peigne en écaille, et un porte-monnaie vide. Que diable ! Les affaires sont les affaires. Et puis, vraiment, son mari exerçait un métier si peu honorable !…

      Restait l’homme. Il commençait à remuer. Que devais-je faire ? Je n’avais qualité ni pour le sauver ni pour le condamner.

      Je lui enlevai ses armes et tirai en l’air un coup de revolver.

      – Les deux autres vont venir, pensai-je, qu’il se débrouille ! Les choses s’accompliront dans le sens de son destin.

      Et je m’éloignai au pas de course par le chemin de la cavée.

      Vingt minutes plus tard, une route de traverse, que j’avais remarquée lors de notre poursuite, me ramenait auprès de mon automobile.

      À quatre heures, je télégraphiais à mes amis de Rouen qu’un incident imprévu me contraignait à remettre ma visite. Entre nous, je crains fort, étant donné ce qu’ils doivent savoir maintenant, d’être obligé de la remettre indéfiniment. Cruelle désillusion pour eux !

      À six heures, je rentrais à Paris par l’Isle-Adam, Enghien et la porte Bineau.

      Les journaux du soir m’apprirent que l’on avait enfin réussi à s’emparer de Pierre Onfrey.

      Le lendemain – ne dédaignons point les avantages d’une intelligente réclame – l’Écho de France publiait cet entrefilet sensationnel :

      « Hier, aux environs de Buchy, après de nombreux incidents, Arsène Lupin a opéré l’arrestation de Pierre Onfrey. L’assassin de la rue Lafontaine venait de dévaliser, sur la ligne de Paris au Havre, Mme Renaud, la femme du sous-directeur des services pénitentiaires. Arsène Lupin a restitué à Mme Renaud la sacoche qui contenait ses bijoux, et a récompensé généreusement les deux agents de la Sûreté qui l’avaient aidé au cours de cette dramatique arrestation. »

      5

       Le Collier de la Reine

      Table des matières

      Deux ou trois fois par an, à l’occasion de solennités importantes, comme les bals de l’ambassade d’Autriche ou les soirées de lady Billingstone, la comtesse de Dreux-Soubise mettait sur ses blanches épaules « le Collier de la Reine ».

      C’était bien le fameux collier, le collier légendaire que Bohmer et Bassenge, joailliers de la couronne, destinaient à la du Barry, que le cardinal de Rohan-Soubise crut offrir à Marie-Antoinette, reine de France, et que l’aventurière Jeanne de Valois, comtesse de La Motte, dépeça un soir de février 1785, avec l’aide de son mari et de leur complice Rétaux de Villette.

      Pour dire vrai, la monture seule était authentique. Rétaux de Villette l’avait conservée, tandis que le sieur de La Motte et sa femme dispersaient aux quatre vents les pierres brutalement desserties, les admirables pierres si soigneusement choisies par Bohmer. Plus tard, en Italie, il la vendit à Gaston de Dreux-Soubise, neveu et héritier du cardinal, sauvé par lui de la ruine lors de la retentissante banqueroute de Rohan-Guéménée, et qui en souvenir de son oncle, racheta les quelques diamants qui restaient en la possession du bijoutier anglais Jefferys, les compléta avec d’autres de valeur beaucoup moindre, mais de même dimension, et parvint à reconstituer le merveilleux « collier en esclavage », tel qu’il était sorti des mains de Bohmer et Bassenge.

      De ce bijou historique, pendant près d’un siècle, les Dreux-Soubise s’enorgueillirent. Bien que diverses circonstances eussent notablement diminué leur fortune, ils aimèrent mieux réduire leur train de maison que d’aliéner la royale et précieuse relique. En particulier le comte actuel y tenait comme on tient à la demeure de ses pères. Par prudence, il avait loué un coffre au Crédit Lyonnais pour l’y déposer. Il allait l’y chercher lui-même l’après-midi du jour où sa femme voulait s’en parer, et l’y reportait lui-même le lendemain.

      Ce soir-là, à la réception du Palais de Castille – l’aventure remonte au début du siècle – la comtesse eut un véritable succès, et le roi Christian, en l’honneur de qui la fête était donnée, remarqua sa beauté magnifique. Les pierreries ruisselaient autour du cou gracieux. Les mille facettes des diamants brillaient et scintillaient comme des flammes à la clarté des lumières. Nulle autre qu’elle, semblait-il, n’eût pu porter avec tant d’aisance et de noblesse le fardeau d’une telle parure.

      Ce fut un double triomphe, que le comte de Dreux goûta profondément, et dont il s’applaudit, quand ils furent rentrés dans la chambre de leur vieil hôtel du faubourg Saint-Germain. Il était fier de sa femme et tout autant peut-être du bijou qui illustrait sa maison depuis quatre générations. Et sa femme en tirait une vanité un peu puérile, mais qui était bien la marque de son caractère altier.

      Non sans regret, elle détacha le collier de ses épaules et le tendit à son mari qui l’examina avec admiration, comme s’il ne le connaissait point. Puis, l’ayant remis dans son écrin de cuir rouge aux armes du Cardinal, il passa dans un cabinet voisin, sorte d’alcôve plutôt, que l’on avait complètement isolée de la chambre, et dont l’unique entrée se trouvait au pied de leur lit. Comme les autres fois, il le dissimula sur une planche assez élevée, parmi des cartons à chapeau et des piles de linge. Il referma la porte et se dévêtit.

      Au matin, il se leva vers neuf heures, avec l’intention d’aller, avant le déjeuner, jusqu’au Crédit Lyonnais. Il s’habilla, but une tasse de café et descendit aux écuries. Là, il donna des ordres. Un des chevaux l’inquiétait. Il le fit marcher et trotter devant lui dans la cour. Puis il retourna près de sa femme.

      Elle n’avait point quitté la chambre, et se coiffait, aidée de sa bonne. Elle lui dit :

      – Vous sortez ?

      – Oui… pour cette course…

      – Ah ! En effet… c’est plus prudent…

      Il pénétra dans le cabinet. Mais, au bout de quelques secondes, il demanda, sans le moindre étonnement d’ailleurs :

      – Vous l’avez pris, chère amie ?

      Elle répliqua :

      – Comment ? Mais non, je n’ai rien pris.

      – Vous l’avez dérangé.

      – Pas du tout… je n’ai même pas ouvert cette porte.

      Il apparut, décomposé, et il balbutia, la voix à peine intelligible :

      – Vous n’avez pas ?… Ce n’est pas vous ?… Alors…

      Elle accourut, et ils cherchèrent fiévreusement, jetant les cartons à terre et démolissant les piles de linge. Et le comte répétait :

      – Inutile… tout ce que nous faisons est inutile… C’est ici, là, sur cette planche, que je l’ai mis.

      – Vous avez pu vous tromper.

      – C’est ici, là, sur cette planche, et pas sur une autre.

      Ils allumèrent une bougie, car la pièce était assez obscure, et ils enlevèrent tout le linge et tous les objets qui l’encombraient. Et quand il n’y eut plus rien dans le cabinet, ils durent s’avouer avec désespoir que le fameux collier, « le Collier en esclavage de la Reine », avait disparu.

      De nature résolue, la comtesse, sans perdre de temps en vaines lamentations, fit prévenir le commissaire, M. Valorbe, dont ils avaient eu déjà l’occasion d’apprécier l’esprit sagace et la clairvoyance. On le mit au courant par le détail, et tout de suite il demanda :

      –


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