La Main Sur Le Cœur. Shanae Johnson

La Main Sur Le Cœur - Shanae Johnson


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      « Reed m’a dit qu’il avait pas mal de succès sur une application de rencontres, dit-il.

      — C’est complètement dingue, dit Dylan. Mais à situation désespérée, mesures désespérées, pas vrai ?

      — Je vous retrouve tout à l’heure. »

      Fran se retourna pour partir, Bonbon à sa suite, puis se tourna une dernière fois vers Maggie.

      « Ça ne te dérange pas qu’il m’accompagne ?

      — Pas du tout, répondit Maggie avec un sourire. Il faut juste l’empêcher de trop s’exciter. Et surveiller qu’il ne mange rien qu’il ne soit pas censé manger.

      — Comme d’habitude, » conclut Fran pour rassurer la propriétaire du chien.

      Ils descendirent le chemin ensemble. Le ranch s’étendait autour d’eux. Fran aperçut Xavier sur le dos de l’un des chevaux de thérapie. Les chevaux aidaient les soldats à renforcer les membres qu’ils avaient perdus, mais le seul fait de se trouver sur leur dos leur redonnait aussi une sensation de puissance. Le tour de Fran viendrait le lendemain. Il aurait aimé pouvoir aller plus vite qu’un simple trot. Mais, dans son état, il devait se montrer prudent.

      Au lieu de chevaucher aux quatre vents, Fran passait beaucoup de temps dans les jardins. Le travail de la terre était bon pour le corps, mais aussi pour l’esprit. Voir des plantes pousser grâce à ses soins lui mettait du baume au cœur.

      « Fran, attends-moi ! » l’appela Reed.

      Reed sortait de la salle à manger de la grande maison dans laquelle ils prenaient la plupart de leurs repas ensemble, même si chaque pavillon disposait de sa propre cuisine. Il agitait son téléphone de sa main valide. La manche de sa chemise était roulée et épinglée à son coude, là où s’arrêtait son avant-bras, qu’il avait laissé derrière lui dans une explosion en Afghanistan.

      « Regarde-moi ça. »

      Reed mit son téléphone sous le nez de Fran.

      « Déjà cinquante réponses. »

      Sur l’écran défilaient les photos de nombreuses femmes. C’était le docteur Patel qui leur avait parlé de cette application, qui avait été conçue par un membre de sa famille. Le psychologue avait participé à la mise au point de l’algorithme.

      « Et elles veulent toutes te rencontrer ? demanda Fran.

      — Pas simplement me rencontrer. Elles veulent m’épouser. Dire qu’on pensait que ça allait être compliqué ! »

      Reed tenait son téléphone dans le creux de la paume, balayant les profils à droite et à gauche du bout du pouce. Cet homme ne laissait pas grand-chose le ralentir ou l’abattre, et surtout pas un membre manquant.

      « T’épouser ? De parfaites inconnues veulent t’épouser ? Elles sont au courant pour… tu sais quoi ? »

      Reed cliqua sur sa photo de profil. Elle le montrait clairement. Il était en uniforme, avec un bras en moins.

      « La seule chose qu’une femme aime plus qu’un homme en uniforme, c’est une âme blessée qu’elle pense pouvoir guérir. »

      Fran soupira, mais pas parce que Reed se comportait comme un blaireau. Fran savait que son ami s’attendait vraiment à trouver l’amour dans cette affaire. Reed était quelqu’un d’optimiste, parfois presque trop.

      « Cette appli calcule la compatibilité jusqu’à quatre-vingt-dix-neuf pour cent. Si je n’arrive pas à trouver la femme de ma vie là-dessus, c’est qu’elle n’existe pas. J’en ai sélectionné cinq. Je suis compatible à quatre-vingt-dix-huit pour cent avec celle-là. »

      Reed lui montra la photo d’une jolie femme. Le portrait était bien composé, comme celui d’un mannequin. Elle était blonde avec des yeux vert pâle, et un petit peu trop de maquillage au goût de Fran.

      « Elle est pour ainsi dire parfaite, dit Reed. Je l’ai invitée à prendre un verre ce week-end. Mais elle n’est pas en ville, elle devrait rentrer à la fin du mois. »

      Fran ne savait pas vraiment que dire. Il n’arrivait pas à déterminer s’il devait retirer Reed de la liste des soldats à caser, ou s’il devrait au contraire le surveiller d’encore plus près pour s’assurer que son avenir était réellement établi. Fran était déterminé à voir tous les autres hommes bien installés et autorisés à rester au ranch après son départ. Peut-être que ces histoires de mariage arrangé pouvaient fonctionner, surtout si toutes les personnes impliquées savaient dès le départ dans quoi elles s’engageaient.

      Reed continua à détailler à Fran tous les traits de cette femme. Mais quelque chose d’autre avait attiré son attention. Sean Jeffries était en train de descendre les marches du bâtiment réservé aux soins, une grange qu’ils avaient réaménagée pour le docteur Patel ainsi que pour les infirmières et le reste du personnel qui venait s’occuper d’eux et des animaux thérapeutiques. Sean retint la porte, faisant bien attention à placer son visage afin que seul son bon côté soit visible par la personne qui sortait.

      Cette personne, c’était Ruhi Patel, la fille du docteur Patel. Ruhi était infirmière et venait souvent aider son père à s’occuper des soldats qui vivaient au ranch ou s’y rendaient pour des soins.

      Ruhi et le docteur Patel discutaient en descendant les marches. Sean regardait ses pieds. Mais Fran le vit jeter quelques regards à la jeune infirmière.

      Fran soupira. Il soupçonnait depuis longtemps que Sean en pinçait pour Ruhi. Si c’était le cas, il n’accepterait jamais de se trouver une épouse sur une application de rencontre. Ce qui signifiait que Sean devrait lui aussi quitter le ranch.

      Le docteur Patel releva les yeux et aperçut les deux hommes. Il leur fit signe d’approcher.

      « Je vois que vous utilisez l’application, dit-il à Reed.

      — J’ai un rencard la semaine prochaine avec quelqu’un avec qui j’ai soixante-douze pour cent de compatibilité, » répondit Reed en levant son téléphone pour montrer une brune au visage rond.

      Il semblait bien qu’il avait déjà oublié le mannequin et ses quatre-vingt-dix-huit pour cent de compatibilité.

      « Je trouve ça criminel, ce qu’ils vous forcent tous à faire, dit Ruhi. Vous obliger à vous marier juste pour garder votre foyer.

      — Je pensais que tu croyais aux mariages arrangés, dit Reed.

      — Ça, c’est du mariage forcé. C’est illégal.

      — Personne ne nous force à quoi que ce soit, répondit Reed. On n’est pas obligé de le faire si on n’a pas envie. On peut vivre ailleurs et venir ici pour les soins. »

      Sean détourna les yeux. Fran savait qu’il n’avait nulle part où aller, ce qui voulait dire que, dans son cas, la situation était forcée. Fran ne voulait pas partir non plus. Il adorait se réveiller tous les matins sur le ranch. Mais il n’avait pas le choix. Son cœur ne le laisserait pas rester.

      « Mon père essaye de me trouver quelqu’un depuis que je suis adolescente, dit Ruhi. Les mariages arrangés ne m’intéressent pas. Je ne suis pas sûre de vouloir me marier tout court. À notre époque, ce n’est plus nécessaire. »

      La façon dont Sean avala sa salive indiqua à Fran qu’il ne se contentait pas d’en pincer pour elle. Il avait l’air d’être complètement amoureux. Cela risquait de devenir un problème.

      « Et vous, Francisco ? demanda le docteur Patel. Vous recherchez aussi une épouse ?

      — Je ne peux donner mon cœur à personne. Il est déjà brisé. »

      Il avait dit ça avec un sourire, espérant déclencher quelques rires. Il n’en récolta aucun. Tous connaissaient sa situation.

      « C’est


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