Histoire des salons de Paris. Tome 6. Abrantès Laure Junot duchesse d'

Histoire des salons de Paris. Tome 6 - Abrantès Laure Junot duchesse d'


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qui fut à tort accusé de la mort de son frère, était un homme de bonne foi, républicain dans le cœur. Il a fait une foule de beaux traits, de choses utiles qu'on ignore, parce qu'on parle de lui sans rien approfondir; mais il faut connaître Chénier, et savoir tout le bien qu'il fit et le mal qu'il empêcha. Ce fut lui qui fit décréter les écoles primaires. Aussitôt que la veuve d'un littérateur faisait entendre une parole de détresse, Chénier montait à la tribune et demandait une pension pour elle; s'occupant des arts, de la littérature, et d'une foule de choses toutes utiles à la science et au progrès. Les Clichiens ont été rigoureux pour lui, parce qu'il fut sans pitié pour les excès de la Compagnie de Jésus et de leurs acolytes plus féroces que les monstres de 93. Le Moniteur de l'époque (et celui-là est vrai) est le livre où l'opinion devrait s'instruire avant de se formuler si violemment.

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C'est madame Germon, couturière très en vogue alors, qui répondit ce mot à une femme, et fit en effet sa robe pour le tiers du prix. Elle fut depuis couturière de madame Bonaparte.

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Je crois que, plus tard, Bonaparte fit cette réponse à madame de Staël, mais ce ne fut pas ce jour-là.

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Leibnitz avait un penchant pour la France; étant encore jeune, il vint à Paris pour y étudier vraiment les sciences, disait-il. C'est qu'il était un véritable émule de Descartes et de Pascal. Cet esprit actif et remuant qui, à vingt ans, s'était fait Rose-Croix pour apprendre la science universelle, ne croyait jamais assez savoir. Législateur non-seulement d'un peuple, mais de l'univers, par la pensée, Leibnitz est un de ces hommes qui ne sont d'aucun pays, et appartiennent à l'univers. Lorsqu'on connaît le caractère de Leibnitz, il est des choses qui prêtent un côté bien plaisant à une partie de sa vie. Il était toujours plongé dans les études les plus abstraites; Oldenbourg, géomètre anglais, était en rapports intimes avec lui. À seize ans, il écrivit un petit traité de Arte combinatoria. Ce fut comme un jalon pour son génie; il fit plus encore, et montra ses résultats à Oldenbourg. L'autre se mit à rire, et lui dit que tout ce qu'il avait fait était l'ouvrage d'un nommé Mouton, Français (1670). Mais, plus tard, Leibnitz montre à Oldenbourg une autre propriété des nombres qu'il avait trouvée. – Bon! lui dit l'autre, cela est dans la Ligarithmotechnia de Mercator, du Holstein. Un autre se serait désespéré de cette suite de rencontres qui ressemblaient à un plagiat continuel; mais comme Leibnitz ne lisait pas, il ne pouvait être plagiaire. Il se remit avec calme au travail, et recommença ses calculs; ce fut alors qu'il trouva une série de fractions exprimant la surface du cercle, comme Mercator, son premier rival, avait trouvé la série de l'hyperbole. Huyghens, à qui Leibnitz fit voir ce beau travail, rendit hommage à la grandeur de la chose et en félicita l'auteur. – Pour cette fois, dit Leibnitz, Oldenbourg sera content! il lui envoie son travail et attend la réponse avec impatience… Oldenbourg félicita cordialement son ami sur un aussi beau chef-d'œuvre de son esprit… Mais par une fatalité inconcevable, ajoutait-il, ce même travail, ce même résultat viennent d'être opérés par un certain M. Isaac Newton de Cambridge, qui n'avait pas encore publié les nouvelles découvertes qu'il avait faites. Quel siècle que celui où de telles choses arrivent! et qu'on fut heureux d'y vivre!

Il paraît, au reste, que M. Gregory, Écossais, avait trouvé cette série du cercle quelque temps auparavant.

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Au moment où je parle, il me revient en souvenir tout ce que M. d'Abrantès m'a conté de cette époque. La confiance de l'empereur était toujours la plus entière en lui, et il croyait que M. de Talleyrand la méritait et avait été, en effet, du parti du général Bonaparte contre le Directoire. Quoi que M. de Talleyrand ait pu faire contre l'empereur depuis, je suis juste quand il faut l'être.

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Depuis l'Assemblée Constituante, c'est-à-dire le moment où la séance du Jeu de Paume sépara les trois ordres, il n'y eut aucun costume pour les représentants. Les conventionnels ne portaient qu'une écharpe tricolore, et ceux qui allaient à l'armée y ajoutaient un panache aux trois couleurs. Après le 9 thermidor, quelques députés portèrent des armes, telles qu'un sabre, un poignard… Ce ne fut qu'après le 18 fructidor que les Conseils s'habillèrent, et s'enveloppèrent d'une toge comme d'un linceul. Ainsi qu'on orne les morts en Égypte et au Mexique, on parait les représentants après leur mort morale.

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Il remplaçait un autre envoyé du grand-duc de Toscane, qui avait failli compromettre la bonne intelligence des deux pays. Le comte Carletti, ministre de Toscane en France, y était venu, à ce qu'il paraît (en l'an III), avec un plan pour faire sauver madame la duchesse d'Angoulême du Temple, où elle était encore. C'était un homme très-singulier que ce comte Carletti: étant à Florence, où il était grand-chambellan du grand-duc, il se battit en duel avec M. Windham, qui, depuis, fut si fameux dans ses querelles avec M. Pitt, et qui, toujours querelleur, à ce qu'il paraît, se battit aussi avec M. Pitt. Les Anglais rient de tout avec leur air paisible: on rit de ce duel, on plaisanta même jusque dans une caricature, où M. Windham était vis-à-vis de M. Pitt, représenté par une lame de couteau surmontée d'une tête parfaitement ressemblante (on sait que M. Pitt était fort maigre), et M. Windham disait avec la banderolle: «Je ne sais pas tirer sur une lame de couteau.»

Quant au comte Carletti, il fut admis dans la Convention, reçut l'accolade du président, qui, alors, était Thibaudeau, et demeura quelque temps à Paris; mais il paraît qu'il intrigua du côté du Temple. Il fit bien; mais ce qui fut mal, c'est qu'il le fit maladroitement, ce qui aurait aggravé la position de la noble femme qui y languissait depuis tant d'années, et qui fut heureusement échangée quelques mois après. Le comte Carletti ayant demandé à la voir avant son départ, qui eut lieu en l'an V, et cette dernière démarche ayant réveillé la méfiance, on demanda son changement.

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Au moment où M. de Talleyrand prit le ministère des Affaires étrangères, il y avait trois régicides au Directoire, Barras, Carnot et Rewbell.

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Celle que la Reine aimait tant, et qui avait été sa dame d'atours; fille du comte de Périgord, frère de l'archevêque de Reims, elle était belle-fille du maréchal.

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Il y a plusieurs Narbonne: Narbonne-Pelet, Narbonne-Lara et Narbonne-Fritzlar. C'était de ces derniers que venait madame la duchesse de Chevreuse.

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J'ai parlé de ce fait dans mon Salon de l'archevêque de Paris, Christophe de Beaumont.

123

Le 26 septembre.

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Adrien-Augustin-Amalric de Mailly, né en 1792, et nommé élève de Saint-Cyr, par l'Empereur, en 1808 ou 1809.

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Cette phrase a rapport aux hommes du Directoire, Talleyrand surtout, qui l'avait trahi après l'avoir mis en avant.

126

Chef d'état-major du général Hoche. C'était le fils du fameux généalogiste, et il l'était lui-même.

127

Bonaparte.

128

Hoche.

129

Le lieutenant fidèle, c'est Pichegru.

130

La Constitution avait ordonné qu'il serait tracé un rayon autour de Paris que les troupes même de la République ne pourraient pas franchir. C'était l'article 69 de la Constitution qui le fixait.


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