Coriolan. Уильям Шекспир

Coriolan - Уильям Шекспир


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SÉNATEUR. – Noble Aufidius, recevez votre commission et volez à vos troupes. Laissez-nous seuls garder Corioles: si les Romains viennent camper sous ses murs, ramenez votre armée pour faire lever le siège; mais vous versez, je crois, que ces grands préparatifs n'ont pas été faits contre nous.

      AUFIDIUS. – Ne doutez pas de ce que je vous dis: je ne parle que d'après des informations certaines. Je dirai plus, déjà plusieurs corps de l'armée romaine sont en campagne, et marchent droit sur nous. Je laisse vos seigneuries. Si nous venons à nous rencontrer, Marcius et moi, nous avons juré de combattre jusqu'à ce que l'un de nous deux fût hors d'état de continuer.

      TOUS LES SÉNATEURS. – Que les dieux vous secondent!

      AUFIDIUS. – Qu'ils veillent sur vos seigneuries!

      PREMIER SÉNATEUR. – Adieu!

      SECOND SÉNATEUR. – Adieu!

      TOUS ENSEMBLE. – Adieu!

(Ils sortent.)

      SCÈNE III

Rome. Appartement de la maison de MarciusVOLUMNIE ET VIRGILIE entrent; elles s'assoient sur deux tabourets

      VOLUMNIE. – Je vous prie, ma fille, chantez, ou du moins exprimez-vous d'une manière moins décourageante. Si mon fils était mon époux, je serais plus joyeuse de cette absence qui va lui rapporter de la gloire, que des marques les plus tendres de son amour sur la couche nuptiale. – Alors qu'il était encore un enfant délicat et l'unique fils de mes entrailles, alors que les grâces de son âge lui attiraient tous les regards, alors qu'une autre mère n'aurait pas voulu se priver une heure du plaisir de le contempler, quand même un roi l'aurait suppliée un jour entier, moi je pensais combien la gloire lui siérait bien; je me disais qu'il ne vaudrait guère mieux qu'un portrait à pendre à un mur si la soif de la renommée ne le mettait en mouvement, et mon plaisir fut de l'envoyer chercher le danger partout où il pourrait trouver l'honneur: je l'envoyai à une guerre sanglante. Il en revint le front ceint de la couronne de chêne. Je vous le dis, ma fille, non, je ne tressaillis pas plus joyeusement à sa naissance lorsqu'on me dit que j'avais un fils, que le jour où pour la première fois il prouva qu'il était un homme.

      VIRGILIE. – Et s'il eût été tué dans cette guerre, madame?..

      VOLUMNIE. – Alors son grand renom serait devenu mon fils, et m'aurait tenu lieu de postérité. – Laissez-moi vous parler sincèrement. Si j'avais eu douze fils, tous également chéris, tous aussi passionnément aimés que votre Marcius, que mon Marcius, j'aurais mieux aimé en voir onze mourir généreusement pour leur pays, qu'un seul se rassasier de volupté loin des batailles.

(Une suivante se présente.)

      LA SUIVANTE. – Madame, la noble Valérie vient vous faire une visite.

      VIRGILIE. – Permettez-moi de me retirer; je vous en conjure.

      VOLUMNIE. – Non, ma fille, je ne vous le permettrai point. – Je crois entendre le tambour de votre époux: je le vois traîner Aufidius par les cheveux, et les Volsques fuir effrayés comme des enfants poursuivis par un ours; je le vois frapper ainsi du pied; – je l'entends s'écrier: «En avant, lâches! quoi! nés dans le sein de Rome, vous fûtes engendrés dans la peur?» Essuyant de ses mains couvertes de fer son front ensanglanté, il marche en avant comme un moissonneur qui s'est engagé, ou à tout faucher ou à perdre son salaire.

      VIRGILIE. – Son front ensanglanté? ô Jupiter, point de sang!

      VOLUMNIE. – Taisez-vous, folle, le sang sur le front d'un guerrier sied mieux que l'or sur les trophées! Le sein d'Hécube, allaitant Hector, n'était pas plus charmant que le front d'Hector ensanglanté par les épées des Grecs luttant contre lui. Dites à Valérie que nous sommes prêtes à la recevoir.

(La suivante sort.)

      VIRGILIE. – Le ciel protège mon seigneur contre le féroce Aufidius!

      VOLUMNIE. – Il abattra sous son genou la tête d'Aufidius, et foulera aux pieds son cou.

(La suivante rentre avec Valérie et l'esclave qui l'accompagne.)

      VALÉRIE. – Mesdames, je vous donne le bonjour à toutes deux.

      VOLUMNIE. – Aimable personne!

      VIRGILIE. – Je suis bien heureuse de vous voir, madame.

      VALÉRIE. – Comment vous portez-vous, toutes deux? – Mais vous êtes d'excellentes ménagères: quel ouvrage faites-vous là? Une belle broderie, en vérité! Et comment va votre petit garçon?

      VIRGILIE. – Je vous remercie, madame, il est bien.

      VOLUMNIE. – Il aimerait bien mieux voir des épées, et entendre un tambour, que de regarder son maître.

      VALÉRIE. – Oh! sur ma parole, il est en tout le fils de son père! je jure que c'est un joli enfant. – En vérité, mercredi dernier je pris plaisir à le regarder une demi-heure entière. – Il a une physionomie si décidée! – Je m'amusais à le voir poursuivre un papillon aux ailes dorées: il le prit, le lâcha, le reprit, et le voilà de nouveau parti, allant, venant, sautant, le rattrapant; puis, soit qu'il fût tombé et que sa chute l'eût enragé, soit je ne sais pourquoi, il le mit entre ses dents et le déchira: il fallait voir comme il le mit en pièces!

      VOLUMNIE. – C'est une des manières de son père.

      VALÉRIE. – En vérité, c'est un noble enfant.

      VIRGILIE. – Un petit fou, madame.

      VALÉRIE. – Allons, quittez votre aiguille, il faut absolument que vous veniez avec moi faire la paresseuse cet après-midi.

      VIRGILIE. – Non, madame, je ne sortirai pas.

      VALÉRIE. – Vous ne sortirez pas?

      VOLUMNIE. – Elle sortira, elle sortira.

      VIRGILIE. – Non, en vérité, si vous le permettez, je ne passerai pas le seuil, jusqu'à ce que mon seigneur soit revenu de la guerre.

      VALÉRIE. – Fi donc! vous vous renfermez sans aucune raison. – Allons, venez faire une visite à cette dame qui est en couche.

      VIRGILIE. – Je lui souhaite le prompt retour de ses forces, et je la visiterai dans mes prières; mais je ne puis aller la voir.

      VALÉRIE. – Et pourquoi, je vous prie?

      VIRGILIE. – Ce n'est de ma part ni paresse, ni indifférence pour elle.

      VALÉRIE. – Vous voulez donc être une autre Pénélope? Mais on dit que toute la laine qu'elle fila pendant l'absence d'Ulysse ne servit qu'à mettre la teigne dans Ithaque. Venez donc. Je voudrais que votre toile fût sensible comme votre doigt: par pitié, vous vous lasseriez de la piquer. Venez donc avec nous.

      VIRGILIE. – Non, ma chère dame, excusez-moi; en vérité, je ne sortirai pas.

      VALÉRIE. – En vérité, vous viendrez avec moi: je vous apprendrai d'heureuses nouvelles de votre époux.

      VIRGILIE. – Oh! madame, vous ne pouvez pas encore en avoir.

      VALÉRIE. – Je ne plaisante pas: on en a reçu hier au soir.

      VIRGILIE. – Est-il bien vrai, madame?

      VALÉRIE, – Sérieusement: je ne vous trompe pas. Ce que je sais, je le tiens d'un sénateur: voici la nouvelle. Les Volsques ont une armée en campagne; le général Cominius est allé l'attaquer avec une partie de nos forces. Votre époux et Titus Lartius sont campés sous les murs de Corioles: ils ne doutent pas du succès de ce siège, qui terminera bientôt la guerre. Je vous dis la vérité, sur mon honneur. – Venez donc avec nous, je vous en conjure.

      VIRGILIE. – Excusez-moi pour aujourd'hui, madame, et dans la suite je ne vous refuserai jamais rien.

      VOLUMNIE. – Laissez-la seule, madame: de l'humeur qu'elle est, elle ne ferait que troubler notre gaieté.

      VALÉRIE. – Je commence à le croire: adieu donc! – Ah! plutôt venez, aimable et chère amie; venez avec nous, Virgilie: mettez votre gravité à la porte, et suivez-nous.

      VIRGILIE.


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