Le conte d'hiver. Уильям Шекспир
et il vous ressemble tant que nous pourrions vous appliquer en reproche le vieux proverbe, il vous ressemble tant que c'est tant pis.»
Walpole prétend que cette phrase n'aurait été insérée qu'après la mort d'Élisabeth.
On a plusieurs fois voulu soumettre à un plan plus régulier la pièce du Conte d'hiver, nous ne citerons que l'essai de Garrick, qui n'en conserva que la partie tragique, et la réduisit en trois actes.
Selon Malone, Shakspeare aurait composé cette pièce en 1604.
LÉONTES, roi de Sicile.
MAMILIUS, son fils.
CAMILLO, )
ANTIGONE, )
CLÉOMÈNE,) seigneurs de Sicile.
DION, )
UN AUTRE SEIGNEUR de Sicile.
ROGER, gentilhomme sicilien.
UN GENTILHOMME attaché au prince Mamilius.
POLIXÈNE, roi de Bohême.
FLORIZEL, son fils.
ARCHIDAMUS, seigneur de Bohême.
OFFICIERS de la cour de justice.
UN VIEUX BERGER, père supposé de Perdita.
SON FILS.
UN MARINIER.
UN GEÔLIER.
UN VALET du vieux berger.
AUTOLYCUS, filou.
LE TEMPS, personnage faisant l'office de choeur.
HERMIONE, femme de Léontes.
PERDITA, fille de Léontes et d'Hermione.
PAULINE, femme d'Antigone.
ÉMILIE,) suivantes
DEUX AUTRES DAMES,) de la reine.
MOPSA, )
DORCAS,) jeunes bergères.
SATYRES DANSANT, BERGERS ET BERGÈRES,
GARDES, SEIGNEURS, DAMES ET
SUITE, ETC.
ACTE PREMIER
SCÈNE I
ARCHIDAMUS. – S'il vous arrive, Camillo, de visiter un jour la Bohême, dans quelque occasion semblable à celle qui a réclamé maintenant mes services, vous trouverez, comme je vous l'ai dit, une grande différence entre notre Bohême et votre Sicile.
CAMILLO. – Je crois que, l'été prochain, le roi de Sicile se propose de rendre à votre roi la visite qu'il lui doit à si juste titre.
ARCHIDAMUS. – Si l'accueil que vous recevrez est au-dessous de celui que nous avons reçu, notre amitié nous justifiera; car en vérité…
CAMILLO. – Je vous en prie…
ARCHIDAMUS. – Vraiment, et je parle avec connaissance et franchise, nous ne pouvons mettre la même magnificence… et une si rare… Je ne sais comment dire. Allons, nous vous donnerons des boissons assoupissantes, afin que vos sens incapables de sentir notre insuffisance ne puissent du moins nous accuser, s'ils ne peuvent nous accorder des éloges.
CAMILLO. – Vous payez beaucoup trop cher ce qui vous est donné gratuitement.
ARCHIDAMUS. – Croyez-moi, je parle d'après mes propres connaissances, et d'après ce que l'honnêteté m'inspire.
CAMILLO. – La Sicile ne peut se montrer trop amie de la Bohême. Leurs rois ont été élevés ensemble dans leur enfance; et l'amitié jeta dès lors entre eux de si profondes racines, qu'elle ne peut que s'étendre à présent. Depuis que l'âge les a mûris pour le trône, et que les devoirs de la royauté ont séparé leur société, leurs rapprochements, sinon personnels, ont été royalement continués par un échange mutuel de présents, de lettres et d'ambassades amicales; en sorte qu'absents, ils paraissaient être encore ensemble; ils se donnaient la main comme au-dessus d'une vaste mer, et ils s'embrassaient, pour ainsi dire, des deux bouts opposés du monde. Que le ciel entretienne leur affection!
ARCHIDAMUS. – Je crois qu'il n'est point dans le monde de malice ou d'affaire qui puissent l'altérer. Vous avez une consolation indicible dans le jeune prince Mamilius. Je n'ai jamais connu de gentilhomme d'une plus grande espérance.
CAMILLO. – Je conviens avec vous qu'il donne de grandes espérances. C'est un noble enfant; un jeune prince, qui est un vrai baume pour le coeur de ses sujets; il rajeunit les vieux coeurs: ceux qui, avant sa naissance, allaient déjà avec des béquilles, désirent vivre encore pour le voir devenir homme.
ARCHIDAMUS. – Et sans cela ils seraient donc bien aises de mourir?
CAMILLO. – Oui, s'ils n'avaient pas quelque autre motif pour excuser leur désir de vivre.
ARCHIDAMUS. – Si le roi n'avait pas de fils, ils désireraient vivre sur leurs béquilles jusqu'à ce qu'il en eût un.
SCÈNE II
POLIXÈNE. – Déjà le berger a vu changer neuf fois l'astre humide des nuits, depuis que nous avons laissé notre trône vide; et j'épuiserais, mon frère, encore autant de temps à vous faire mes remerciements, que je n'en partirais pas moins chargé d'une dette éternelle. Ainsi, comme un chiffre placé toujours dans un bon rang, je multiplie, avec un merci, bien d'autres milliers qui le précèdent.
LÉONTES. – Différez encore quelque temps vos remerciements: vous vous acquitterez en partant.
POLIXÈNE. – Seigneur, c'est demain: je suis tourmenté par les craintes de ce qui peut arriver ou se préparer pendant notre absence. Veuillent les dieux que nuls vents malfaisants ne soufflent sur mes États, et ne me fassent dire: mes inquiétudes n'étaient que trop fondées! et d'ailleurs je suis resté assez longtemps pour fatiguer Votre Majesté.
LÉONTES. – Mon frère, nous sommes trop solide pour que vous puissiez venir à bout de nous.
POLIXÈNE. – Point de plus long séjour.
LÉONTES. – Encore une huitaine.
POLIXÈNE. – Très-décidément, demain.
LÉONTES. – Nous partagerons donc le temps entre nous; et, en cela, je ne veux pas être contredit.
POLIXÈNE. – Ne me pressez pas ainsi, je vous en conjure. Il n'est point de voix persuasive; non, il n'en est point dans le monde, qui pût me gagner aussitôt que la vôtre, et il en serait ainsi aujourd'hui, si ma présence vous était nécessaire, quand le besoin exigerait de ma part un refus. Mes affaires me rappellent chez moi; y mettre obstacle, ce serait me punir de votre affection; et un plus long séjour deviendrait pour vous une charge et un embarras; pour nous épargner ces deux inconvénients, adieu, mon frère.
LÉONTES. – Vous restez muette, ma reine? Parlez donc.
HERMIONE. – Je comptais, seigneur, garder le silence jusqu'à ce que vous l'eussiez amené à protester avec serment qu'il ne resterait pas; vous le suppliez trop froidement, seigneur. Dites-lui que vous êtes sûr que tout va bien en Bohême; le jour d'hier nous a donné ces nouvelles satisfaisantes: dites-lui cela, et il sera forcé dans ses derniers retranchements.
LÉONTES. – Bien dit, Hermione.
HERMIONE. – S'il disait qu'il languit de revoir son fils, ce serait une bonne raison; et s'il dit cela, laissez-le partir; s'il jure qu'il en est ainsi, il ne doit pas rester plus longtemps, nous le chasserons d'ici avec nos quenouilles. – (A Polixène.) Cependant je me hasarderai à vous demander de nous prêter encore une semaine de votre royale présence. Quand vous recevrez mon époux en Bohême, je vous recommande de l'y retenir un mois au delà du terme marqué