Jules César. Уильям Шекспир

Jules César - Уильям Шекспир


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passage de l'homme qui vient à vous triomphant du sang de Pompée!6. – Allez-vous-en. – Courez à vos maisons, tombez à genoux, priez les dieux de suspendre l'inévitable fléau près d'éclater sur cette ingratitude.

      FLAVIUS. – Allez, allez, bons compatriotes; et pour expier votre faute, assemblez tous les pauvres gens de votre sorte, conduisez-les au bord du Tibre; et là, pleurez dans son canal tout ce que vous avez de larmes, jusqu'à ce que ses eaux, à l'endroit le plus enfoncé de son cours, caressent le point le plus élevé de son rivage. (Les citoyens sortent.) Voyez si cette matière grossière n'a pas été émue: ils disparaissent la langue enchaînée par le sentiment de leur tort. – Vous, descendez cette rue qui mène au Capitole; moi, je vais suivre ce chemin. Dépouillez les statues si vous les trouvez parées d'ornements de fête.

      MARULLUS. – Le pouvons-nous? Vous savez que c'est aujourd'hui la fête des Lupercales.

      FLAVIUS. – N'importe, ne souffrons pas qu'aucune statue porte les trophées de César7. Je vais parcourir ces quartiers et chasser le peuple des rues; faites-en de même partout où vous le trouverez attroupé. Ces plumes naissantes arrachées de l'aile de César ne le laisseront voler qu'à la hauteur ordinaire; autrement dans son essor, il s'élèverait trop haut pour être vu des hommes, et nous tiendrait tous dans un servile effroi.

(Ils sortent.)

      SCÈNE II

Toujours à Rome. – Une place publique Entrent en procession et avec la musique CÉSAR, ANTOINE préparé pour la course; CALPHURNIA, PORCIA, DÉCIUS, CICÉRON, BRUTUS, CASSIUS, CASCA. – Ils sont suivis d'une grande multitude dans laquelle se trouve un devin

      CÉSAR. – Calphurnia!

      CASCA. – Holà! silence! César parle8.

(La musique cesse.)

      CÉSAR. – Calphurnia!

      CALPHURNIA. – Me voici, mon seigneur.

      CÉSAR. – Ayez soin de vous tenir sur le passage d'Antoine, quand il courra. – Antoine!

      ANTOINE. – César, mon seigneur.

      CÉSAR. – N'oubliez pas en courant, Antoine, de toucher Calphurnia; car nos anciens disent que les femmes infécondes, en se faisant toucher dans cette sainte course, secouent la malédiction qui les rendait stériles.

      ANTOINE. – Je m'en souviendrai. Quand César dit: Faites cela, cela est fait.

      CÉSAR. – Partez, et n'omettez aucune cérémonie.

(Musique.)

      LE DEVIN. – César!

      CÉSAR. – Ha! qui m'appelle?

      CASCA, s'adressant à ceux qui l'environnent.– Commandez que tout bruit cesse. Encore une fois, silence!

(La musique s'arrête.)

      CÉSAR. – Qui est-ce, dans la foule, qui m'appelle ainsi? J'entends une voix, plus perçante que tous les instruments de musique crier César! Parle, César se tourne pour entendre.

      LE DEVIN. – Prends garde aux ides de mars.

      CÉSAR. – Quel est cet homme?

      BRUTUS. – Un devin qui vous avertit de prendre garde aux ides de mars.

      CÉSAR. – Amenez-le devant moi, que je voie son visage.

      CASCA. – Mon ami, sors de la foule, regarde César.

      CÉSAR. – Qu'as-tu à me dire maintenant? Répète encore.

      LE DEVIN. – Prends garde aux ides de mars.

      CÉSAR. – C'est un visionnaire; laissons-le, passons.

(Les musiciens exécutent un morceau.)(Tous sortent, excepté Brutus et Cassius.)

      CASSIUS. – Irez-vous voir l'ordre de la course?

      BRUTUS. – Moi? non.

      CASSIUS. – Je vous en prie, allez-y.

      BRUTUS. – Je ne suis point un homme de divertissements; je n'ai pas tout à fait la vivacité d'Antoine. Que je ne vous empêche pas, Cassius, de suivre votre intention; je vais vous laisser.

      CASSIUS. – Brutus, je vous observe depuis quelque temps: je ne reçois plus de vos yeux ces regards de douceur, ces signes d'affection que j'avais coutume d'en recevoir. Vous tenez envers votre ami, qui vous aime, une conduite trop froide et trop peu cordiale.

      BRUTUS. – Ne vous y trompez point, Cassius: si mon regard s'est voilé, ce trouble de mon maintien ne porte que sur moi-même. Je suis tourmenté depuis quelque temps de sentiments qui se contrarient, d'idées qui ne concernent que moi, et donnent peut-être quelque bizarrerie à mes manières: mais que mes bons amis, au nombre desquels je vous compte, Cassius, n'en soient donc pas affligés, et ne voient rien de plus dans cette négligence, sinon que ce pauvre Brutus, en guerre avec lui-même, oublie de donner aux autres des témoignages de son amitié9.

      CASSIUS. – Alors je me suis bien trompé, Brutus, sur le sujet de vos peines, et cela m'a fait ensevelir dans mon sein des pensées d'un haut prix, d'honorables méditations. Dites-moi, digne Brutus, pouvez-vous voir votre propre visage?

      BRUTUS. – Non, Cassius; car l'oeil ne peut se voir lui-même, si ce n'est par réflexion, au moyen de quelque autre objet.

      CASSIUS. – Cela est vrai, et l'on déplore beaucoup, Brutus, que vous n'ayez pas de miroirs qui puissent réfléchir à vos yeux votre mérite caché pour vous, qui vous fassent voir votre image. J'ai entendu plusieurs des citoyens les plus considérés de Rome (sauf l'immortel César) parler de Brutus; et, gémissant sous le joug qui opprime notre génération, ils souhaitaient que le noble Brutus fît usage de ses yeux.

      BRUTUS. – Dans quels périls prétendez-vous m'entraîner, Cassius, en me pressant de chercher en moi-même ce qui n'y est pas.

      CASSIUS. – Brutus, préparez-vous à m'écouter; et puisque vous savez que vous ne pouvez pas vous voir vous-même aussi bien que par la réflexion, moi, votre miroir, je vous découvrirai modestement les parties de vous-même que vous ne connaissez pas encore. Et ne vous méfiez pas de moi, excellent Brutus: si je suis un railleur de profession, si j'ai coutume de faire avec les serments ordinaires, étalage de mon amitié à tous ceux qui viennent me protester de la leur, si vous savez que je courtise les hommes et les étouffe de caresses pour les déchirer ensuite, ou que dans la chaleur des festins je fais des déclarations d'amitié à toute la salle, alors tenez-moi pour dangereux.

(On entend des trompettes et une acclamation.)

      BRUTUS. – Qu'annonce cette acclamation? Je crains que ce peuple n'adopte César pour roi.

      CASSIUS. – Oui? le craignez-vous? – Je dois donc penser que vous ne voudriez pas qu'il le fût.

      BRUTUS. – Je ne le voudrais pas, Cassius; cependant je l'aime beaucoup. – Mais pourquoi me retenez-vous si longtemps? de quoi désirez-vous me faire part? Si c'est quelque chose qui tende au bien public, placez devant mes yeux l'honneur d'un côté, la mort de l'autre10, et je les regarderai tous deux indifféremment; car je demande aux dieux de m'être aussi propices, qu'il est vrai que j'aime ce qui s'appelle honneur plus que je ne crains la mort.

      CASSIUS. – Je vous connais cette vertu, Brutus, tout aussi bien que je connais le charme de vos manières. Eh bien! l'honneur est le sujet de ce que j'ai à vous exposer. Je ne puis dire ce que vous et d'autres hommes pensent de cette vie; mais pour moi, j'aimerais autant ne pas être que de vivre dans la crainte et le respect devant un être semblable à moi. Je suis né libre comme César; vous aussi; nous avons tous deux profité de même; tous deux nous pouvons aussi bien que lui soutenir le froid de l'hiver. – Dans un jour brumeux et orageux où le Tibre agité s'irritait contre ses rivages, César me dit: «Oses-tu, Cassius, t'élancer avec moi dans ce courant furieux, et nager jusque là-bas?» – À ce seul mot, vêtu comme j'étais, je plongeai dans le fleuve, en le


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<p>6</p>

Après la victoire remportée en Espagne sur les enfants de Pompée. C'était la première fois que Rome voyait triompher d'une victoire remportée sur des Romains, et ce fut ce qui commença à indisposer fortement contre César. Shakspeare place ce triomphe le jour de cette fête des Lupercales, où Antoine offrit la couronne à César, ce qui n'eut lieu que plus d'un an après. Il fait de même des Lupercales la veille des ides de mars, quoique les Lupercales se célébrassent vers le milieu de février et que les ides fussent le 15 mars.

Voltaire n'a pas bien compris ce passage, et a cru que César triomphait de la bataille de Pharsale.

Quoi vous couvrez de fleurs le chemin d'un coupable,Du vainqueur de Pompée encor teint de son sang!
<p>7</p>

Ce ne fut point à ce moment, mais après que la couronne eût été offerte à César, que Flavius et Marullus dépouillèrent ses statues non pas d'ornements triomphaux, mais des diadèmes dont quelques-unes avaient été couronnées.

<p>8</p>

Voltaire, paix, messieurs; le mot messieurs, qu'il attribue ici à César, n'a aucun équivalent dans l'original. Voltaire traduit aussi constamment le my lord par mylord, qui n'en est point la traduction. Mylord n'est qu'une application particulière que les Anglais font du mot de lord à la dignité de pair, et qui n'affecte en rien la signification générale de ce mot, consacré en anglais à exprimer toutes les sortes de dominations et de dignités, en sorte qu'à moins qu'il ne s'applique à des pairs d'Angleterre, il doit être traduit, comme tous les autres mots de la langue, par un équivalent français.

<p>9</p>

Traduction de Voltaire:

Vous vous êtes trompé: quelques ennuis secrets,Des chagrins peu connus, ont changé mon visage;Ils me regardent seul et non pas mes amis.Non, n'imaginez point que Brutus vous néglige:Plaignez plutôt Brutus en guerre avec lui-même:J'ai l'air indifférent, mais mon coeur ne l'est pas.
<p>10</p> Set honour in one eye, and death i' the other.

Voltaire a traduit:

La gloire dans un oeil, et le trépas dans l'autre.

Eye veut dire ici point de vue; il est continuellement employé en anglais dans ce sens.