Nous Sommes De Retour. Danilo Clementoni
â Ãa a été une soirée magnifique, Jack, dit Ãlisa en sortant. Elle respira profondément lâair frais de la nuit et ajouta :
â Ãa faisait vraiment longtemps que je ne nâavais pas passé un aussi bon moment. Encore merci. Et elle arbora à nouveau un de ses merveilleux sourires.
â Viens, dans ce secteur ce nâest encore pas très sûr de rester à lâextérieur.
Sur ces mots, il ouvrit la portière et lâaida à monter.
Le colonel au volant, la grande voiture sombre quitta rapidement les lieux en laissant derrière elle un gros nuage de poussière.
â Moi aussi je me suis senti très bien. Je nâaurais jamais imaginé quâune soirée avec un « savant professeur » puisse être si agréable.
â Savante ? Câest ça que tu penses de moi ? Et elle se détourna de lui, feignant la colère.
â Savante oui, mais aussi très sympathique, intelligente et vraiment sexy.
Elle regardait dehors, et il en profita pour lui caresser doucement les cheveux sur la nuque.
Ce contact lui procura une cascade dâagréables frissons dans le dos. Elle ne pouvait pas céder si vite. Mais son excitation allait croissant. Elle décida de se taire et de profiter de cet agréable et léger massage. Jack, encouragé par lâabsence de réactions à son geste, continua à caresser ses cheveux longs. Soudain, il commença à faire glisser sa main, dâabord sur son épaule, puis sur son bras, puis de plus en plus bas, jusquâà lui effleurer doucement les doigts. Elle, toujours tournée vers la fenêtre, prit sa main et la serra sans retenue. Câétait une main grande et forte. Ce contact lui donnait une grande assurance.
Non loin de là , une autre voiture sombre suivait les deux passagers, essayant de capter dâautres propos intéressants.
â Je crois que les dix dollars sont en train de changer de main, mon vieux, dit le gros. Il la raccompagne à lâhôtel, elle le fait monter pour boire quelque chose et le tour est joué.
â Tu peux prier pour que ça ne finisse pas comme ça, sinon, jâaimerais bien savoir comment on va faire pour copier les données de lâordinateur.
â La vache, je nây avais pas pensé.
â Tu ne penses jamais à rien dâautre que ce qui finit dans ton estomac sans fond.
â Allez, ne te laisse pas trop distancer, dit le gros, en ignorant la provocation. Je ne voudrais pas perdre le signal une nouvelle fois.
Ils restèrent un peu main dans la main, sans rien dire. Ils avaient tous deux le regard fixe, au-delà du pare-brise. Lâhôtel approchait, et Jack se sentait très maladroit. Ce nâétait évidemment pas la première fois quâil sortait avec une fille, mais ce soir-là , il sentit resurgir toute la timidité qui lâavait torturé pendant sa jeunesse, et quâil pensait avoir dépassée. Ce contact si prolongé lâavait comme paralysé. Il aurait peut-être dû dire quelque chose pour rompre ce silence gênant, mais il craignait que le moindre mot puisse gâcher ce moment magique, et il décida de se taire.
Il remercia mentalement la boîte automatique de la voiture qui lui avait permis de ne pas lâcher la main dâÃlisa pour passer les vitesses, et continua à conduire dans la nuit.
Ãlisa, de son côté, se rappelait tous les « hommes de sa vie » présumés, lâun après lâautre. Plusieurs histoires, beaucoup de rêves, de projets, de joie et de bonheur, mais à chaque fois, à la fin, beaucoup de déception, dâamertume et de douleur. Câétait comme si le destin avait déjà tout décidé pour elle. La voie qui sâouvrait à elle, sans aucun doute riche en satisfactions et succès sur le plan professionnel, ne semblait pas prévoir qui que ce soit à ses côtés pour lâaccompagner. Et maintenant elle était là , dans un pays étranger, voyageant dans la nuit, sa main dans la main dâun homme que, jusquâà la veille, elle considérait comme un obstacle à ses plans et qui, maintenant, lui inspirait une grande tendresse et beaucoup dâaffection. Plus dâune fois, elle se demanda ce quâelle devait faire.
â Tout va bien ? demanda Jack, inquiet, voyant ses yeux devenir de plus en plus brillants.
â Oui, merci, Jack. Câest juste un moment de tristesse. Ãa va passer.
â Câest de ma faute ? sâempressa-t-il de lui demander. Jâai dit ou fait quelque chose qui ne va pas ?
â Non, au contraire, répondit-elle aussitôt dâune petite voix douce, et elle ajouta :
â Reste près de moi, sâil te plaît.
â Hé, je suis là . Ne tâinquiète pas. Je nâaccepterai jamais quâon te fasse du mal, dâaccord ?
â Merci, merci infiniment, dit Ãlisa, pendant quâelle tentait dâessuyer les larmes qui glissaient lentement sur ses joues. Tu es adorable.
Jack resta silencieux, et il lui serra la main encore plus fort.
Lâenseigne de lâhôtel apparut au bout de la rue, quâils parcoururent sans rien dire. Puis le colonel ralentit et arrêta la voiture juste devant lâentrée. Ils se regardèrent intensément. Pendant un long moment, aucun dâeux nâosa parler. Jack savait quâil devait faire le premier pas, mais Ãlisa le précéda.
â Câest maintenant que tu devrais me dire que la soirée a été splendide, que je suis magnifique, et moi je tâinviterais à monter pour boire quelque chose.
â Oui, lâusage lâimposerait, commenta Jack, un peu dérouté par ces mots. Câest ce que je ferais si tu étais comme les autres, mais ce nâest pas ce que je pense.
Il reprit son souffle et il continua.
â Je pense que tu es une personne très particulière et que cette soirée passée ensemble mâa donné lâoccasion de mieux te connaître, et de découvrir beaucoup de choses que je nâaurais jamais pensé trouver chez une « archéologue ».
â Je prends ça comme un compliment, dit-elle, essayant de dédramatiser un peu.
â Derrière cette armure de femme forte et indestructible, je crois que se cache une petite créature tendre et effrayée. Tu es une fille très douce, et dâune sensibilité unique.
Il allait peut-être regretter ce quâil allait dire, mais il fit appel à son courage et continua.
â Franchement, une nuit de sexe à archiver, comme tant dâautres, absolument inutiles, et qui, le matin suivant, ne te laissent rien quâun immense vide, ça ne mâintéresse pas. Je voudrais plus avec toi. Tu mâas toujours beaucoup plu, je lâavoue.
Il ne pouvait plus sâarrêter, maintenant. Il lui prit les deux mains, les serra et poursuivit.
â Depuis que je tâai rencontrée dans mon bureau la première fois, jâai réalisé quâil y avait quelque chose de spécial chez toi. Au départ, jâétais évidemment attiré par ta beauté, mais ensuite ta voix, ta façon de parler, tes gestes, ta façon de marcher, ton sourire...
Il fit une brève pause avant dâajouter :
â Ton