Une Loi de Reines . Морган Райс

Une Loi de Reines  - Морган Райс


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pénétra dans les chambres solennelles. Quelques torches conféraient au lieu une atmosphère sombre et lourde. Un rais de lumière tombait également de l’oculus vert au milieu de la coupole, pour éclairer l’objet qui se trouvait à son aplomb.

      La lance d’émeraude.

      Volusia s’en approcha d’un air émerveillé. La lance se trouvait là depuis des siècles, sa pointe tournée vers la lumière. Elle avait été sculpté dans de l’émeraude, de la hampe jusqu’à la pointe, et brillait sous les rayons, dressée fièrement comme pour défier les cieux et les dieux. C’était un objet sacré pour son peuple – un objet qui assurait la subsistance de toute la cité. Volusia resta longtemps en admiration devant les petites particules en suspension autour de l’arme.

      – Madame, dit doucement Soku, puis-je vous parler ?

      Volusia refusa de se tourner vers lui. Elle examina la lance, comme elle l’avait fait chaque jour de son existence. Enfin, elle accepta de répondre à son conseiller.

      – Je t’y autorise, dit-elle.

      – Madame, dit-il. Vous avez tué le souverain de l’Empire. La nouvelle a dû leur parvenir. Des armées sont sûrement en route vers Volusia à l’heure où nous parlons. Des armées gigantesques et qui dépassent en nombre toutes celles que nous avons affrontées jusqu’à maintenant. Nous devons nous préparer. Quelle est votre stratégie ?

      – Stratégie ? répéta Volusia sans le regarder, visiblement agacée.

      – Comment comptez-vous faire la paix ? pressa-t-il. Comment comptez-vous vous rendre ?

      Elle tourna vers lui un regard glacé.

      – Il n’y aura pas de paix, dit-elle. Pas avant que j’accepte leur reddition et leur serment de fidélité.

      Il lui renvoya son regard, effrayé.

      – Mais, Madame, ils sont cent fois plus nombreux que nous, dit-il. Nous ne pourrons pas les vaincre.

      Elle se retourna vers la lance et il fit un pas en avant, désespéré.

      – Mon impératrice, insista-t-il. Vous avez usurpé le trône de votre mère et c’était une remarquable victoire. Le peuple ne l’aimait pas, mais il vous aime, vous. Ils vous adorent. Personne n’a le courage de vous parler franchement. Mais moi, je le ferai. Vous vous entourez de conseillers qui ne font que vous dire ce que vous avez envie d’entendre – des conseillers qui vous craignent. Moi, je vous dirai la vérité sur notre situation. Nous sommes encerclés par l’Empire. Et nous allons être écrasés. Il ne restera plus rien de nous ou de notre ville. Vous devez vous tenir prête. Vous devez leur proposer une trêve. Payez le prix qu’il faudra. Avant qu’ils ne nous massacrent.

      Volusia sourit sans détourner son regard de la lance.

      – Sais-tu ce qu’ils disaient à propos de ma mère ? demanda-t-elle.

      Soku demeura silencieux, puis secoua la tête en signe de dénégation.

      – Ils disaient qu’elle était l’Élue. Ils disaient qu’elle ne pouvait être vaincue. Ils disaient qu’elle ne mourrait jamais. Sais-tu pourquoi ? Parce que personne n’avait manié cette lance depuis six siècles. Et elle a réussi à la soulever d’une seule main. Elle l’a utilisée pour tuer son propre père et prendre son trône.

      Volusia tourna enfin vers son commandant ses yeux illuminés par le destin et le l’histoire.

      – Ils disaient que la lance ne pourrait être soulevée qu’une fois. Par l’Élue. Ils disaient que ma mère vivrait plusieurs milliers d’années et que le trône de Volusia lui appartiendrait pour l’éternité. Et sais-tu ce qui s’est passé ? Moi aussi, j’ai soulevé la lance – et je l’ai utilisée pour tuer ma mère.

      Elle prit une grande inspiration.

      – Que peux-tu en conclure, mon Seigneur Commandant ?

      Il lui adressa un regard d’incompréhension, avant de secouer la tête.

      – Nous pouvons vivre dans l’ombre des légendes des autres, dit Volusia, ou nous pouvons créer notre propre légende.

      Elle s’approcha alors tout près de lui, illuminée de l’intérieur par sa propre fureur.

      – Quand j’aurai écrasé l’Empire tout entier, dit-elle, quand toute personne dans cet univers pliera le genou devant moi, quand tous crieront mon nom, tu sauras que je suis la seule véritable souveraine – et que je suis le seul véritable dieu. Je suis l’Élue. Parce que je me suis choisie moi-même.

      CHAPITRE DIX

      Gwendolyn traversait le village en compagnie de ses frères, Kendrick et Godfrey, de Sandara, de Aberthol, de Brandt et de Atme, ainsi que de son peuple. Bokbu, le chef du village, menait la marche et Gwen marchait à ses côtés, submergée par la gratitude. Il avait accueilli son peuple, leur avait donné à manger, leur avait fourni un abri. Il avait pris un risque. Certaines voix s’étaient même élevées contre la décision de Bokbu. Il les avait sauvés de l’océan. Comment auraient-ils fait sans lui ? Ils seraient probablement morts en mer.

      Gwen ressentait également un élan de gratitude envers Sandara : la jeune femme avait plaidé leur cause auprès de son peuple et c’était elle qui avait eu la sagesse de les mener jusqu’ici. Gwen regardait de tous côtés les villageois qui se pressaient et les dévisageaient comme des objets de curiosité. Elle avait l’impression d’être un animal dans une ménagerie. Les maisons étaient petites, construites en argile. Ce devait être une nation de guerrier, un peuple fier aux yeux gentils. Il était évident que c’était la première fois qu’ils voyaient des hommes et des femmes comme Gwen et ses compagnons. Quoique curieux, ils étaient également méfiants. Gwen ne pouvait pas leur en vouloir. Leur vie d’esclavage avait fait d’eux ce qu’ils étaient.

      Elle remarqua que des bûchers avaient été érigés ça et là.

      – Pourquoi ces feux ? demanda-t-elle.

      – Vous arrivez pendant un jour particulier, dit Bokbu. C’est le festival des morts. Une nuit sacrée à nos yeux. Elle a lieu tous les cycles solaires. Nous brûlons des feux en l’honneur des dieux de la mort. On raconte que cette nuit-là, les dieux nous rendent visite et nous informent de ce qui va se passer.

      – On raconte également que notre sauveur viendra ce jour-là, intervint une voix.

      Gwen tourna la tête vers celui qui avait parlé. C’était un vieil homme, qui devait avoir soixante-dix ans, grand, maigre, à l’allure grave. Il se porta à leur hauteur en s’appuyant sur son bâton jaune. Il portait également une cape jaune sur les épaules.

      – Puis-je vous présenter Kalo ? dit Bokbu. Notre oracle.

      Gwen hocha la tête. Il lui rendit son salut, impassible.

      – Votre village est très beau, observa Gwendolyn. Je vois que votre peuple est attaché à la famille et à la communauté.

      Le chef sourit.

      – Vous êtes une reine jeune, mais très sage et très gracieuse. C’est donc vrai, ce que l’on raconte sur vous de l’autre côté de l’océan. J’aimerais que vous et votre peuple restiez ici, dans le village, avec nous. Mais, vous comprenez, nous sommes obligés de vous dissimuler aux yeux de l’Empire. Vous resterez non loin, cependant. Ce sera votre maison, là-bas.

      Gwendolyn suivit son regard. Il désignait une montagne lointaine, percée de grottes.

      – Ces grottes, dit-il. Vous y serez en sécurité. L’Empire ne vous retrouvera pas là-bas et vous pourrez faire brûler des feux pour cuire votre nourriture et, bien sûr, vous reposer.

      – Et ensuite ? demanda Kendrick en se portant à leur hauteur.

      Bokbu le détailla du regard. Avant qu’il n’ait eu le temps de répondre, un homme grand et fort surgit, armé d’une lance et flanqué d’une douzaine de


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