Héroïne, Traîtresse, Fille . Морган Райс
pouvoirs que son sang Ancien lui donnait.
Ceres sentait la différence entre le présent et ce qui s'était passé auparavant. Cela avait été comme une cécité subite : c'était trop et trop tôt et ça s'évanouissait lentement avec les soins appropriés. A présent, elle avait plutôt la sensation que des corbeaux lui avaient crevé les yeux à coup de bec.
Elle retendit quand même la main vers le haut pour saisir les barreaux en espérant qu'elle se trompait. Elle se força à essayer de les faire bouger en y mettant toute la force qu'elle put convoquer. Ils ne cédèrent pas le moins du monde, même quand Ceres leur tira dessus si fort que ses paumes saignèrent contre le métal.
Elle poussa un cri de surprise quand quelqu'un jeta de l'eau dans la fosse et qu'elle se retrouva trempée et recroquevillée contre la pierre du mur. Quand Stephania devint visible, se tenant au-dessus de la grille, Ceres essaya de la toiser avec défi mais, à ce moment-là, elle avait trop froid, était trop mouillée et trop faible pour pouvoir faire grand-chose.
“Donc, le poison a fonctionné”, dit Stephania sans préambule. “C'est normal, après tout. Je l'ai payé assez cher.”
Ceres la vit alors se toucher le ventre, mais Stephania reprit la parole avant que Ceres ait pu demander ce qu'elle voulait dire.
“Quelle impression cela fait-il de se voir retirer la seule chose qu'on avait de spécial ?” demanda Stephania.
C'est comme avoir su voler mais ne plus être que tout juste capable de ramper. Cependant, Ceres n'allait pas lui donner la satisfaction de le dire à voix haute.
“On n'en a pas déjà parlé, Stephania ?” demanda-t-elle. “Vous connaissez la fin de l'histoire. Je m'échappe et je vous donne ce que vous méritez.”
Alors, Stephania l'aspergea d'un autre seau d'eau et Ceres bondit vers les barreaux. Elle entendit rire Stephania alors qu'elle le faisait et cela ne fit qu'accroître sa colère. Peu lui importait de ne plus avoir de pouvoirs à ce moment-là. Elle avait quand même l'entraînement d'un seigneur de guerre et elle avait quand même tout ce qu'elle avait appris auprès du Peuple de la Forêt. Elle étranglerait Stephania à mains nues si nécessaire.
“Regarde-toi. Regarde l'animal que tu es”, dit Stephania.
Cela calma un peu Ceres, ne serait-ce que parce qu'elle refusait d'être ce que Stephania voulait qu'elle soit.
“Vous auriez dû me tuer quand vous en aviez l'occasion”, dit Ceres.
“Je le voulais”, répondit Stephania, “mais les événements ne nous donnent pas toujours ce que nous voulons. Regarde simplement comment ça s'est passé, pour toi et Thanos. Ou avec moi et Thanos. Après tout, c'est moi sa véritable épouse, non ?”
Ceres dut plaquer les mains contre la pierre des murailles pour s'empêcher de bondir vers Stephania une fois de plus.
“Je t'aurais tranché la gorge si je n'avais pas entendu des cors de guerre”, dit Stephania. “Et puis, je me suis rendu compte qu'il serait facile de reprendre le château. Donc, je l'ai fait.”
Ceres secoua la tête. Elle ne pouvait y croire.
“J'ai libéré le château.”
Elle avait fait plus que ça. Elle l'avait rempli de rebelles. Elle avait capturé ceux qui étaient du côté de l'Empire et elle les avait emprisonnés. Les autres, elle leur avait donné leur chance, elle avait …
“Ah, ça y est, tu commences à comprendre, n'est-ce pas ?” dit Stephania. “Tous ces gens qui s'étaient empressés de te remercier de les avoir libérés se sont rangés à mes côtés avec tout autant d'empressement. Il faudra que je les surveille.”
“Il faudra que vous surveilliez plus de gens que ça”, répondit sèchement Ceres. “Vous vous imaginez que les combattants de la rébellion vont vous laisser régner, jouer à la reine ? Vous vous imaginez que les seigneurs de guerre vont le faire ?”
“Ah”, dit Stephania avec une mimique d'embarras exagérée qui fit craindre à Ceres ce qui allait suivre. “J'ai peur d'avoir des mauvaises nouvelles sur tes seigneurs de guerre. On dirait que les meilleurs des combattants meurent quand même quand on leur plante une flèche dans le cœur.”
Elle le dit avec une telle nonchalance, avec une telle moquerie que, même si cela n'avait été qu'à moitié vrai, cela aurait suffi à briser le cœur à Ceres. Elle s'était battue avec les seigneurs de guerre. Elle s'était entraînée avec eux. Ils avaient été ses amis et ses alliés.
“Tout ce que vous aimez, c'est la cruauté”, dit Ceres.
A sa grande surprise, elle vit Stephania secouer la tête.
“Voyons, voyons. Tu penses que je ne vaux pas mieux que cet idiot de Lucious ? Un homme qui ne peut ressentir de plaisir que si quelqu'un d'autre est en train de hurler ? Tu penses que je suis comme ça ?”
Du point de vue de Ceres, cela semblait être une description assez exacte, surtout en tenant compte de tout ce qui était susceptible d'arriver ensuite.
“Vous ne le seriez pas ?” demanda Ceres. “Oh, désolée, moi qui croyais que vous m'aviez mise dans une fosse en pierre pour que j'y meure.”
“Pour t'y faire torturer, en fait”, dit Stephania. “Mais ce n'est que toi. Tu mérites tout ce que tu subis depuis que tu as essayé de tout me prendre. Thanos était à moi.”
Peut-être le croyait-elle vraiment. Peut-être pensait-elle honnêtement qu'il était normal d'essayer d'assassiner ses rivaux à cause de désaccords portant sur les relations et sur la vie.
“Et le reste ?” dit Ceres. “Allez-vous essayer de me convaincre que vous êtes essentiellement quelqu'un de gentil, Stephania ? Parce que je suis quasiment sûre que ce navire a quitté le port au moment où vous avez essayé de m'envoyer à l'Île des Prisonniers.”
Peut-être n'aurait-elle pas dû se moquer d'elle comme ça, car Stephania leva un troisième seau d'eau. Elle sembla réfléchir l'espace d'un instant puis haussa les épaules et le versa sur Ceres, qui reçut une douche d'eau glacée.
“Je dis que je n'ai pas à être gentille, idiote de paysanne”, répondit-elle sèchement pendant que Ceres frissonnait. “Nous vivons dans un monde qui essaie toujours de nous prendre tout ce que nous avons sans nous demander la permission, surtout si on est une femme. Il y a toujours des voyous comme Lucious. Il y a toujours ceux qui veulent prendre sans s'arrêter.”
“Dans ce cas, on se bat contre eux !” dit Ceres. “On libère le peuple ! On le protège.”
Elle entendit Stephania rire à ces paroles.
“Tu crois vraiment que ce genre d'ânerie marche, n'est-ce pas ?” dit Stephania. “Tu crois que les gens sont essentiellement bons et que tout ira bien si on veut bien leur donner leur chance.”
Elle le dit comme si c'était une chose digne de dérision plutôt qu'une bonne philosophie de vie.
“La vie n'est pas comme ça”, poursuivit Stephania. “La vie est une guerre où on se bat comme on le peut. On ne donne à personne de pouvoir sur soi-même et on prend tout le pouvoir qu'on peut parce que, comme ça, on a la force de les écraser quand ils essaient de nous trahir.”
“Je ne me sens pas particulièrement écrasée”, répliqua Ceres. Elle n'allait pas permettre à Stephania de voir à quel point elle se sentait faible et vidée en ce moment. Elle allait faire semblant d'être forte en espérant arriver à trouver le moyen de faire de cette force une réalité.
Elle vit Stephania hausser les épaules.
“Ça viendra. Actuellement, ta rébellion est en train d'affronter l'armée de Felldust. Felldust gagnera peut-être et, à ce moment-là, je te vendrai à eux contre le droit de quitter la cité avec toute la richesse que je pourrai prendre. Cela dit, je crois plutôt que Felldust va traverser la cité comme une vague. Je vais les