La Cible Zéro. Джек Марс

La Cible Zéro - Джек Марс


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      “OK ?” Maya leva un sourcil. “OK, genre tu es d’accord de nous laisser toutes seules pour une fois ?”

      Il n’aimait toujours pas cette idée. Mais c’était seulement pour quelques heures et Thompson serait juste à côté. “Oui,” finit-il par dire.

      Maya poussa un soupir de soulagement. “Merci. Tout ira bien. Je te le jure.” Elle lui fit rapidement un nouveau câlin, puis se retourna pour descendre l’escalier. Mais, tout à coup, elle pensa à autre chose. “Je peux te poser une dernière question ?”

      “Bien sûr. Mais je ne peux pas te promettre de te donner la réponse.”

      “Est-ce que tu vas recommencer… à voyager ?”

      “Oh.” Une fois de plus, sa question l’avait pris par surprise. La CIA lui avait proposé de reprendre son poste. En fait, le Directeur du Renseignement National lui-même avait demandé que Kent Steele soit totalement réintégré dans ses fonctions. Mais Reid n’avait pas encore donné de réponse et l’agence n’en avait pas encore exigé une non plus. La plupart du temps, il évitait de penser à tout ça.

      “Je… voudrais vraiment pouvoir te répondre que non. Mais, en vérité, je n’en sais rien. Je n’ai pas encore pris ma décision.” Il s’interrompit un instant avant de demander, “Tu en penserais quoi, toi, si je le faisais ?”

      “Tu veux mon avis ?” demanda-t-elle, surprise.

      “Oui, bien sûr. Tu es honnêtement l’une des personnes les plus intelligentes que je connaisse et ton avis compte énormément pour moi.”

      “Disons que… d’un côté, c’est plutôt cool, sachant ce que je sais maintenant…”

      “Sachant ce que tu crois savoir,” rectifia Reid.

      “Mais c’est aussi plutôt flippant. Je sais qu’il y a de très grandes chances que tu sois blessé ou… ou pire.” Maya garda le silence un moment. “Est-ce que ça te plaît ? De travailler pour eux ?”

      Reid ne lui répondit pas directement. Elle avait raison : les épreuves qu’il avait vécues étaient terrifiantes et avaient menacé sa propre vie plus d’une fois, ainsi que la vie de ses deux filles. Il ne supporterait pas que quoi que ce soit leur arrive. Mais la dure vérité, et la raison principale pour laquelle il avait tâché de s’occuper en permanence l’esprit ces derniers temps, c’était qu’il aimait ça et que ça lui manquait. Kent Steele aspirait à la poursuite. À un moment, quand tout ça avait commencé, il avait découvert cette partie de lui comme si c’était quelqu’un d’autre, mais ce n’était pas le cas. Kent Steele était son pseudonyme. Il avait envie d’être cet alias. Il lui manquait. Il faisait partie de lui, tout comme enseigner l’Histoire de l’Europe ou élever deux filles. Même si ses souvenirs étaient embrouillés, c’était une part de lui, de son identité. Ne pas en disposer était comme se retrouver dans la peau d’un athlète qui souffre d’une blessure mettant fin à sa carrière : venait fatalement la question, Qui suis-je si je ne suis pas ça ?

      Il n’avait pas besoin de répondre à haute voix. Maya pouvait lire la réponse dans ses yeux brillant de mille feux.

      “Elle s’appelle comment déjà ?” demanda-t-elle soudain, changeant complètement de sujet.

      Reid sourit timidement. “Maria.”

      “Maria,” dit-elle pensivement. “OK. Amuse-toi bien.” Maya s’engagea dans les marches.

      Avant de la suivre, Reid décida de rajouter un petit quelque chose. Il ouvrit un tiroir en hauteur dans le dressing et chercha dans le fond, jusqu’à trouver ce qu’il cherchait : un petit flacon d’une eau de Cologne onéreuse qu’il n’avait pas portée depuis deux ans. C’était le parfum préféré de Kate. Il renifla le diffuseur et sentit un frisson lui parcourir l’échine. C’était une odeur familière et musquée qui lui rappelait un tas de bons souvenirs.

      Il en vaporisa sur son poignet, puis tapota chaque côté de son cou avec. L’odeur était plus forte que dans ses souvenirs, mais agréable.

      C’est alors qu’un autre souvenir survint dans sa tête.

      La cuisine en Virginie. Kate est en colère, elle gesticule des mains en direction de quelque chose, sur la table. Elle n’est pas juste en colère… elle a peur. “Pourquoi est-ce que tu possèdes un truc pareil, Reid ?” demande-t-elle d’un ton accusateur. “Et si l’une des filles était tombée dessus ? Réponds-moi !”

      Il chassa cette vision avant que n’arrive l’inévitable migraine, mais cela ne rendait pas cette expérience moins perturbante pour autant. Il ne parvenait pas à se rappeler quand, ou pourquoi, cette dispute avait éclaté. Kate et lui se disputaient rarement et, dans ses souvenirs, elle avait l’air effrayée… soit à cause du sujet de leur dispute, soit peut-être même à cause de lui. Il ne lui avait jamais donné aucune raison de l’être. Du moins pas qu’il s’en souvienne…

      Ses mains se mirent à trembler, alors qu’il réalisait quelque chose. Il ne se rappelait pas ce souvenir, ce qui voulait dire que c’était certainement l’un de ceux qui avaient été supprimés par l’implant. Mais pourquoi est-ce que des souvenirs de Kate auraient-ils été effacés avec ceux de l’Agent Zéro ?

      “Papa !” Maya l’appelait au bas des marches. “Tu vas être en retard !”

      “Ouais,” marmonna-t-il. “J’arrive.” Il allait bien falloir qu’il affronte la réalité, soit en cherchant une solution à son problème, soit en acceptant que ses souvenirs refassent occasionnellement surface, luttant pour sortir, confus et surprenants.

      Mais il affronterait la réalité plus tard. Là, tout de suite, il avait une promesse à tenir.

      Il descendit l’escalier, embrassa chacune de ses filles au sommet de la tête, puis se dirigea vers sa voiture. Avant de descendre l’allée, il s’assura que Maya avait bien mis l’alarme derrière lui, puis il grimpa dans le SUV gris métallisé, acheté quelques semaines plus tôt.

      Même s’il était très nerveux, et certainement excité à l’idée de revoir Maria, il n’arrivait pas à se débarrasser de la boule d’angoisse dans son estomac. Il ne pouvait pas s’empêcher de penser que laisser les filles seules, même pour un petit moment, était une très mauvaise idée. Si les éléments du mois précédent lui avaient appris quelque chose, c’était surtout que les personnes qui voulaient le faire souffrir ne manquaient pas.

      CHAPITRE TROIS

      “Comment vous sentez-vous ce soir, Monsieur ?” demanda poliment l’infirmière de nuit en entrant dans sa chambre d’hôpital. Il savait qu’elle s’appelait Elena et qu’elle était Suisse, même si elle lui parlait anglais avec un accent. Elle était petite, jeune, jolie même, et plutôt gaie comme personne.

      Rais ne répondit rien. Il ne répondait jamais. Il se contenta de l’observer, alors qu’elle posait un gobelet en polystyrène sur sa table de chevet. Puis, elle se mis à inspecter soigneusement ses blessures. Il savait bien que sa gaité servait à donner le change pour ne pas montrer qu’elle avait peur. Il savait bien qu’elle n’aimait pas se retrouver seule avec lui, malgré les gardes armés derrière elle, observant chacun de ses mouvements. Elle n’aimait pas le soigner, ni même lui parler.

      Personne n’en avait envie.

      Pourtant, l’infirmière Elena inspecta soigneusement ses blessures. Il pouvait sentir sa nervosité d’être si près de lui. Ils savaient tous ce qu’il avait fait : tuer au nom d’Amon.

      Ils auraient encore plus peur s’ils savaient combien de personnes, songea-t-il avec ironie.

      “Vous guérissez bien,” lui dit-elle. “Plus vite que prévu.” Elle lui disait ça chaque soir, ce qu’il décodait comme


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