Hokousaï. Edmond de Goncourt

Hokousaï - Edmond de Goncourt


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       LIX

       LX

       BIBLIOGRAPHIE

       CATALOGUE DES LIVRES ET ALBUMS DE HOKOUSAÏ

       POSTFACE

       TABLE DES PARAGRAPHES

       Table des matières

      L'Écho de Paris publiait, sous ma signature, le 7 juin 1892, cet article.

      La vie littéraire, en ses duretés, a parfois d'aimables surprises, mais au bout de bien des années.

      Cet hiver, je recevais cette lettre du Japon:

      Yokohama (Hôpital général).

      Monsieur,

      Voulez-vous permettre à un jeune Français de vous exprimer tout le plaisir que lui a causé Outamaro, mieux placé que tout autre pour le comprendre puisque je suis au milieu des Japonais…

      J'avais quinze ans quand j'ai lu Soeur Philomène et j'ai voulu être interne, et je suis médecin… La Maison d'un Artiste m'a fait venir au Japon. En un mot, comme cette étoile qui guide le marin, ignorante elle-même des destins qu'elle mène, vous avez eu une influence dominatrice sur toute ma vie.

      Je vous le dis, pourquoi ne vous l'ai-je pas dit plus tôt,—cette timidité bête qui fait qu'on est muet devant la femme qu'on aime, fait aussi qu'on renferme en soi ses amours littéraires;—c'est peut-être la raison qui fait que je n'ai jamais osé aller vous rendre une seule visite quand j'étais à Paris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

      Permettez-moi de me mettre à votre disposition. Je suis au Japon, j'aime le Japon, je parle le japonais et, comme on dit dans les vieux drames: «Profitez, usez de moi…»

      Docteur MICHAUT.

      Cette lettre me faisait demander au docteur, sans grand espoir de réussite, la traduction de la biographie d'Hokousaï tirée du livre manuscrit: Oukiyoyé Rouikô, par Kiôdén, complété successivement par Samba, Moumeiô, Guekkin, Kiôsan, Tanéhiko, traduction que je n'avais pu obtenir des Japonais habitant Paris, et je la reçois aujourd'hui, cette traduction, de l'aimable docteur, en collaboration avec le Japonais Ourakami.

      Cette traduction, j'ai le projet de la faire entrer dans l'étude annoncée en un volume sur Hokousaï, mais, à mon âge, on n'est jamais sûr du lendemain, et je veux que cette étude biographique des Vasari japonais sur le grand artiste qui préoccupe si vivement le monde de l'art européen,—et qui n'a encore été ni imprimée, ni traduite en français, paraisse dans l'Écho de Paris pour la première fois.

       Table des matières

      Né à Yédo, Hokousaï est, dit-on, le fils d'un fabricant de miroirs de la cour de Tokougawa.

      Son nom d'enfance est Tokitaro; plus tard, il le changea contre celui de

       Tétsoujiro.

      Il entre d'abord comme élève chez Katsoukawa Shunshô et, pour nom d'artiste, il prend le nom de Katsoukawa Shunrô. Là, il peint des acteurs et des scènes de théâtre dans le style de Tsoutzoumi Tô-rin et produit beaucoup de dessins sur des feuilles volantes, appelés Kiôka Sourimono.

      Chassé de la maison de son maître pour des raisons restées inconnues, il va prendre la succession du peintre Tawaraya-Sôri, et se fait reconnaître pour le successeur de ce peintre.

      Depuis, il change son style, en crée un tout nouveau, qui lui est personnel. Alors il repasse son nom de Sôri à son élève Sôji, et rend à la famille Tawaraya la signature qu'il avait reçue d'elle.

      C'est seulement à la dixième année de l'ère Kwanseï (1789) que le public, pour la première fois, lit, au bas des impressions du maître, le nom d'Hokousaï (Hokousaï, Tokimasa Taïto) nom qu'il prit, dit-on, à cause de sa profonde vénération pour le dieu Hokoushin-Miôkén. Quant au nom de Taïto, il l'abandonna plus tard à son gendre Shighénobou.

      Le style appelé Hokousaï-riou est le style de la vraie peinture Oukiyoyé, la peinture naturiste, et Hokousaï est le vrai et le seul fondateur d'une peinture qui, prenant ses assises dans la peinture chinoise, est la peinture de l'école japonaise moderne.

      Et son oeuvre, lorsqu'il a paru, a eu la bonne fortune, non seulement d'exciter l'admiration de ses confrères les peintres, mais encore de séduire le gros public, tant il était une nouveauté particulière.

      Durant les années de l'ère Kwanseï (1789-1800) Hokousaï écrit de nombreux contes et romans pour la lecture des femmes et des enfants: romans dans lesquels il fit lui-même des illustrations, romans où il signe comme écrivain Tokitaro-Kakô, et comme peintre Gwakiôjin-Hokousaï. Et ce fut grâce à ses pinceaux spirituels et précis que les contes populaires et les romans commencèrent à se répandre dans le public.

      Il fut aussi un excellent poète dans la poésie Haï-Kai (poésie populaire).

      Dans ce temps, il habita Asakousa où de nombreux élèves-peintres de Kiôto et d'Ohsaka vinrent le trouver et entrèrent dans son atelier, et, dans ce temps où il y avait bien des peintres dans les villes de Nagoya, de Kiôto, d'Ohsaka, aucun ne put le surpasser.

      C'est alors que sortent, de dessous ses pinceaux, des livres ou modèles de gravures, et des impressions, et des dessins innombrables.

      Bientôt (c'est l'habitude là-bas, pour les peintres, de changer perpétuellement de noms), le maître léguait sa signature d'Hokousaï à un de ses élèves qui tenait un restaurant dans le Yoshiwara, le quartier des maisons publiques, et qui peignait dans son établissement des peintures de 16 ken (32 mètres) chaque fois que Hokousaï faisait l'ouverture de réunions d'artistes pour l'adoption de nouvelles signatures.

      À partir de ce temps, il signa ses impressions Sakino Hokousaï, Taïto (ancien Hokousaï Taïto). Il changea encore une fois son nom propre et s'appela Tamé Kazou ou I-itsou.

      N'ayant pas eu assez de temps pour donner les modèles de la peinture à ses élèves, il en fit graver des volumes qui, plus tard, obtinrent beaucoup de succès.

      Il fut encore très habile dans la peinture dite Kiokou yé, peinture de fantaisie, faite avec des objets ou des services de table trempés dans l'encre de Chine, tels qu'une boîte servant de mesure de capacité, des oeufs, des bouteilles[1].

      [Note 1: Hokousaï affirmait par là que l'exécution d'un beau dessin ne tient pas aux instruments de la peinture, à d'excellente pinceaux, mais est tout entière dans l'art de dessiner du peintre.]

      Il peignait encore admirablement bien avec sa main gauche, ou bien de bas en haut. Et sa peinture faite au moyen des ongles de ses doigts était tout à fait étonnante et, quant à ce fait particulier, il fallait être témoin soi-même du travail de l'artiste, sans quoi on eût pris ses peintures à l'ongle pour des peintures faites avec des pinceaux.

      «Après avoir étudié, dit-il quelque part, pendant de longues années, la peinture des diverses écoles, j'ai pénétré leurs secrets et j'en ai recueilli tout ce qu'il y a de meilleur. Rien n'est inconnu pour moi en


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