La Nuit des Braves . Морган Райс

La Nuit des Braves  - Морган Райс


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au-dessous d'elle. Elle observa tous les corps flottants qui longeaient le navire, la mer de cadavres qui se heurtait contre la coque. Les autres marins, eux aussi, cherchaient des survivants depuis des heures, scrutant les visages comme elle, et pourtant, ils n'avaient rien trouvé.

      “Ma dame, le navire attend vos ordres”, insista doucement Merk.

      “Cela fait des heures que nous scrutons les eaux”, ajouta Sovos. “Thurn est mort. Nous devons le laisser partir.”

      Lorna secoua la tête.

      “Je sens qu'il n'est pas mort”, répliqua-t-elle.

      “J'aimerais plus que quiconque que ce soit le cas”, répondit Merk. “Je lui dois la vie. Il nous a sauvés du feu des dragons. Pourtant, nous l'avons vu prendre feu et tomber dans la mer.”

      “Mais nous ne l'avons pas vu mourir”, répondit-elle.

      Sovos soupira.

      “Même si, d'une façon ou d'une autre, il a survécu à sa chute, ma dame”, ajouta Sovos, “il n'a pas pu survivre dans ces eaux. Nous devons le laisser partir. Notre flotte a besoin d'ordres.”

      “Non”, dit-elle, décidée, d'une voix où résonnait l'autorité. Elle sentait monter en elle une prémonition, un picotement entre les yeux. Cette prémonition lui disait que Thurn était en vie là-bas, quelque part au milieu des épaves, au milieu des milliers de corps flottants.

      Lorna inspecta les eaux, attendant, espérant, à l'écoute. Elle lui devait ça et elle n'abandonnait jamais un ami. La Baie de la Mort était sinistrement silencieuse depuis que tous les trolls étaient morts et les dragons partis, et pourtant, elle avait encore un son qui lui était propre, le hurlement incessant du vent, le clapotis de mille moutons, le gémissement de leur navire que le courant berçait sans arrêt. Alors qu'elle écoutait, le vent se mit à souffler plus fort.

      “Une tempête se prépare, ma dame”, dit finalement Sovos. “Nous devons partir. Nous avons besoin de vos ordres.”

      Elle savait qu'ils avaient raison. Et pourtant, elle ne pouvait pas abandonner.

      Juste au moment où Sovos ouvrait la bouche pour parler, soudain, Lorna ressentit une poussée d'excitation. Elle se pencha et observa quelque chose qui, au loin, montait et descendait dans les eaux, porté vers le navire par les courants. Elle sentit un picotement à l'estomac et sut que c'était lui.

      “LÀ-BAS !” cria-t-elle.

      Les hommes se précipitèrent vers la balustrade, regardèrent par-dessus le bord et le virent tous, eux aussi : c'était Thurn qui flottait dans l'eau. Lorna ne perdit pas de temps. Elle fit deux grands pas, bondit du bastingage et plongea la tête la première. Elle fit une chute de six mètres vers les eaux glaciales de la baie.

      “Lorna !” cria Merk derrière elle, d'une voix pleine d'inquiétude.

      Lorna vit les requins rouges grouiller au-dessous d'elle et comprit l'inquiétude de Merk. Ils décrivaient des cercles autour de Thurn mais, bien qu'ils lui donnent des petits coups, elle vit qu'ils n'avaient pas encore réussi à percer son armure. Lorna comprit que Thurn avait de la chance d'être encore dans son armure, à laquelle il devait la vie, et qu'il avait encore plus de chance de s'être accroché à une planche en bois qui lui permettait de flotter. Pourtant, les requins se faisaient de plus en plus nombreux, de plus en plus téméraires, et elle savait qu'il ne lui restait plus beaucoup de temps.

      Elle savait aussi que les requins s'attaqueraient à elle, et pourtant, il était hors de question d'hésiter alors que la vie de Thurn était en jeu. Elle lui devait ça.

      Lorna atterrit dans l'eau, choquée par son froid glacial et, sans attendre, donna des coups de pied et nagea sous la surface jusqu'à atteindre Thurn, se servant de sa force pour nager plus vite que les requins. Elle l'enlaça, le saisit, sentit qu'il était en vie, bien qu'inconscient. Les requins se mirent à nager vers elle et elle se prépara à les affronter, à faire le nécessaire pour qu'elle et Thurn survivent.

      Lorna vit soudain des cordes atterrir autour d'elle. Elle en agrippa une et se sentit rapidement tirée vers l'arrière. Elle s'envola et il était temps car un requin rouge bondit hors de l'eau et donna un coup de mâchoires là où ses jambes s'étaient trouvées une seconde auparavant.

      Lorna, tenant Thurn, fut tirée vers le haut dans le vent glacial et se balança rudement en frappant contre la coque du navire. Un moment plus tard, ils furent remontés par l'équipage et, avant de se retrouver à bord, Lorna aperçut pour la dernière fois les requins qui grouillaient au-dessous d'elle, furieux d'avoir perdu leur repas.

      Lorna atterrit sur le pont en produisant un bruit sourd, Thurn dans les bras. Elle le retourna immédiatement et l'examina. Il était à moitié défiguré, brûlé par les flammes mais, au moins, il avait survécu. Il avait les yeux fermés. Au moins, ils ne fixaient pas le ciel; c'était un bon signe. Elle posa les mains sur son cœur et sentit quelque chose. C'était un battement de cœur, quoique faible.

      Lorna appliqua les paumes sur son cœur et, quand elle le fit, elle sentit une poussée d'énergie, une chaleur intense le pénétrer par l'intermédiaire de ses paumes. Elle invoqua ses pouvoirs et demanda que Thurn revienne à la vie.

      Thurn ouvrit soudain les yeux et se redressa en inspirant profondément, en haletant et en crachant de l'eau. Il toussa et les autres hommes se ruèrent en avant et l'enveloppèrent dans des fourrures pour le réchauffer. Lorna était ravie. Elle regarda la couleur lui revenir au visage et comprit qu'il vivrait.

      Lorna sentit soudain qu'on lui entourait les épaules d'une fourrure chaude, se retourna et vit Merk qui se tenait au-dessus d'elle en souriant et l'aidait à se relever.

      Les hommes se rassemblèrent bientôt autour d'elle en la regardant avec encore plus de respect.

      “Et maintenant ?” demanda sérieusement Merk en s'approchant d'elle. Il était presque obligé de crier pour se faire entendre en dépit du vent et du grincement de leur navire qui tanguait.

      Lorna savait qu'il leur restait peu de temps. Elle ferma les yeux, leva les paumes vers le ciel et, lentement, sentit la charpente de l'univers. L'Épée de Flammes était détruite, Knossos aussi, les dragons étaient en fuite et elle avait besoin de savoir où Escalon avait le plus besoin d'eux en cette période de crise.

      Elle sentit soudain la vibration de l'Épée Inachevée à côté d'elle et elle comprit. Elle se tourna vers Alec, qui la regardait fixement, attendant visiblement sa décision.

      Elle sentit la destinée spéciale d'Alec monter en elle.

      “Tu ne poursuivras plus les dragons”, dit-elle. “Ceux qui se sont enfuis ne viendront pas te retrouver : ils ont peur de toi, maintenant, et si tu les recherches, tu ne les trouveras pas. Ils sont partis se battre en d'autres endroits d'Escalon. C'est maintenant à quelqu'un d'autre de les détruire.”

      “Que ferai-je, alors, ma dame ?” demanda-t-il, visiblement surpris.

      Elle ferma les yeux et sentit la réponse venir à elle.

      “Les Flammes”, répondit Lorna, sentant avec certitude que c'était la réponse. “Il faut les rétablir. C'est la seule façon d'empêcher Marda de détruire Escalon. C'est ce qui compte le plus, maintenant.”

      Alec avait l'air perplexe.

      “Quel rapport avec moi ?” demanda-t-il.

      Elle le regarda fixement.

      “L'Épée Inachevée”, répondit-elle. “C'est le dernier espoir. Elle est seule à pouvoir rétablir le Mur de Flammes. Il faut la ramener à l'endroit d'où elle vient. Tant que ce ne sera pas fait, Escalon ne pourra jamais être en sécurité.”

      Il la regarda fixement, clairement surpris.

      “Et où est cet endroit ?” demanda-t-il, alors que les hommes se rapprochaient pour écouter.

      “Au nord”, répondit-elle. “Dans la Tour d'Ur.”

      “Ur ?” demanda Alec, dérouté. “La tour n'a-t-elle pas déjà été détruite ?”

      Lorna


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