Le Trône des Dragons. Морган Райс

Le Trône des Dragons - Морган Райс


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famille ayant un membre atteint de la maladie de l'homme de pierre complique quelque peu le mariage,” poursuivit Finnal. Il semblait vouloir s'excuser mais Godwin n'était pas dupe. Etait-ce la raison de la présence de son père, un autre noble avait divulgué la maladie de Nerra au grand jour ? Dans le seul but de négocier ?

      Godwin se leva de son trône, fou de rage. Il n'était pas certain de savoir quoi dire ni quoi faire, il n'en eut pas le temps, les portes du salon s'ouvrirent en grand sur une domestique tenue par un garde.

      Godwin ne prêtait en général pas attention aux servantes mais était presque convaincu que cette dernière faisait partie de l'escorte de Lenore, partie depuis quelques jours.

      Godwin s'arrêta net, sa colère céda la place à une froideur glaciale.

      “Votre Majesté,” commença le garde. “Votre Majesté, nous avons été attaqués !”

      Godwin mit une seconde à recouvrer la parole, tant sa peur était grande.

      “Attaqués ? Que s'est-il passé ?” demanda-t-il. Il regarda la jeune femme, qui ne tenait plus sur ses jambes.

      “Nous … nous étions …” elle secouait la tête, comme si elle avait du mal à s'exprimer. “Dans une auberge … il y avait du monde. Des hommes du Roi Ravin …”

      La crainte de Godwin se mua en horreur.

      “Où est Lenore ? Où est-elle ?”

      “Ils l'ont enlevée,” répondit la servante. “Ils ont tué les gardes, nous ont enlevées et …” Godwin comprit, alors qu'elle s'interrompait. “Ils en ont relâché certaines, ils voulaient qu'on vienne tout vous raconter.”

      “Et Lenore ? Et ma fille ?”

      “Ils la détiennent,” dit la jeune femme. “Ils veulent l'emmener vers le sud, franchir les ponts, la livrer au Roi Ravin.”

      Plus rien n'avait d'importance ; la réaction disproportionnée de son fils, les exigences de son futur gendre. Tout ce qui comptait était qu'une autre de ses filles était en danger, cette fois-ci il ne la laisserait pas tomber, pas comme pour Nerra.

      “Qu'on fasse venir mes chevaliers !” aboya-t-il. “Portez un message aux Chevaliers d'Argent. Appelez mes gardes. Je veux voir tous mes hommes ici ! Que faites-vous planté là ? Exécution !”

      Gardes et domestiques s'activèrent, certains couraient pour envoyer des messages, d'autres se dépêchaient de prendre les armes. Godwin sortit en trombe du grand salon, traversa le château sans prêter attention à ses suivants. Il courut dans l'escalier en colimaçon, ses pieds volaient littéralement sur les pierres émoussées. Il dépassa des corridors aux murs agrémentés de tapisseries, des couloirs aux dalles usées à force de passage. Il se dirigea vers l'armurerie, une immense porte en cuivre massif séparait le château de l'antre des armes forgées par les meilleurs artisans de la Maison des Armes. Les gardes s'écartèrent pour le laisser passer.

      Son armure reposait sur ses deux pieds, sa cuirasse usée par les ans, ses jambières arboraient un entrelacs d'arabesques. En temps normal, Godwin aurait attendu l'aide d'un page mais il l'enfila seul, ajusta les attaches, serra les lacets. Il devait aller trouver la reine dans ses appartements pour lui annoncer qu'une de ses filles était en danger. Godwin aurait pu affronter mille armées mais n'était pas prêt à ça.

      Ce qui l'attendait était bien pire. Lenore était en danger, elle avait probablement subi des horreurs inimaginables. Même avec toutes ses armées, Godwin ignorait s'ils arriveraient à temps pour la sauver, ni à quoi s'attendre de ses ennemis. Seule certitude, il ne pouvait pas se permettre de perdre une autre fille, pas maintenant.

      “Je la ramènerai,” dit-il à voix haute. “Je ramènerai ma fille, quoiqu'il arrive.”

      CHAPITRE TROIS

      Rodry était furieux, il bouillait de colère, tel le magma des volcans des territoires du Nord, le pire était à venir. Des domestiques passèrent précipitamment à ses côtés, Rodry s'écarta prudemment sur leur passage ; il n'était pas comme son frère Vars, pas du genre à faire payer à autrui sa mauvaise humeur.

      Sa mauvaise humeur ? Le terme était mal choisi pour illustrer l'humiliation subie par son père, il aurait dû mettre son plan à exécution bien avant.

      Rodry attendit le groupe de ses amis qui approchaient. Aucun d'eux ne pouvait se targuer d'être un chevalier digne de ce nom mais il pouvait compter sur leur soutien.

      “Ton père a l'air furieux,” annonça Kay, l'un de ses amis, des plus nerveux.

      “Tu es en colère parce que c'est toi qui as escorté l'ambassadeur juste à la frontière,” répondit Mautlice, fils d'un comte, toujours prêt à chasser, et doué de surcroît.

      “Il ne vous fera aucun mal,” déclara Rodry. “Je lui ai dit que j'avais agi seul.”

      “Inutile,” renchérit Seris, replet, tout de velours vêtu, toujours partant, Rodry pouvait compter sur lui pour le soutenir.

      “Merci,” répondit Rodry. “Mes deux frères tournent toujours autour du pot lorsqu'ils ont quelque chose à dire. J'apprécie la franchise et l'honnêteté.”

      “Tu me paraît tout de même bien remonté,” affirma Kay.

      Doux euphémisme pour illustrer ce que Rodry ressentait à l'instant présent. "Humilié" serait plus à propos. Frustré de se sentir inutile. Frustré contre son père pour avoir renvoyé Nerra, qui semblait fâché contre lui, bien qu'il n'ait fait que ce que l'honneur lui dictait avec cet ambassadeur, bien résolu à faire des ronds de jambes avec Finnal et sa famille en dépit des rumeurs qui couraient sur son compte.

      Rodry se demandait parfois s'il comprendrait un jour quelque chose à la politique. Et pourquoi d'ailleurs ? Un homme devait bien se comporter, en homme d'honneur, il estimait que ses semblables devaient faire de même. Il se montrerait assez fort pour protéger ses amis et combattre le mal. Tout le reste n'était que … des enfantillages.

      Il prit la direction de ses appartements, parcourut le dédale de couloirs qui s'entrelaçaient dans le château, les autres lui emboîtèrent le pas. Ils traversèrent une galerie ornée de vitraux qui laissaient passer une lumière chamarrée, jusqu'à une vaste salle de réception pourvue de meubles en chêne massif. Rodry poussa une table en travers de son passage et poursuivit son chemin.

      Le château était en effervescence mais Rodry était trop fâché pour le remarquer. C'était probablement lié au mariage. Le château peinait à suivre le rythme depuis que son père avait avancé le départ de la procession.

      Rodry arriva dans ses appartements, plus spartiates et fonctionnels que ceux de ses frères, des malles et des coffres s'alignaient le long d'un mur. Ses armures d'une propreté irréprochable, minutieusement entretenues, comme le lui avaient appris les Chevaliers d'Argent, reposaient sur des socles.

      Il songea à la confrérie et Erin, le Commandant Harr avait envoyé un message à la cour les avisant de sa présence parmi eux. Rodry aurait dû se douter que sa petite sœur aurait filé droit chez les Chevaliers mais il n'y avait pas cru, les filles ne faisaient généralement pas ce genre de chose.

      Il devrait peut-être la rejoindre et la ramener. Il avait le droit de pénétrer dans la forteresse, étant lui-même un Chevalier d'Argent. En tant que demi-frère d'Erin, il pourrait lui parler, voire, la ramener. En même temps, Rodry était content qu'au moins un des membres de la famille mène sa vie librement.

      “Allons nous entraîner à la Maison des Armes,” déclara-t-il.

      “Encore ?” rétorqua Kay. “Je préfèrerais chasser.”

      “Vous affirmez tous vouloir devenir chevalier,” poursuivit Rodry. “Vous devez savoir vous battre. Prenez des leçons avec le Maître d'armes Wendros, et après on verra.”

      Ce qui impliquerait de nombreuses leçons, ils devaient garder espoir.

      “Viens.


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