Le Leurre Zéro. Джек Марс

Le Leurre Zéro - Джек Марс


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ni radio, ni détecteur de mouvements, ni dispositif d’écoute, pas même un téléphone. La CIA pourrait le localiser grâce à son téléphone… ou, bien plus dangereux encore, sa fille Maya pourrait le localiser avec son téléphone. Elle n’avait pas cru une seule seconde qu’il se rendait chez un neurologue en Californie pour la blessure qu’il avait subie à la main quelques années auparavant. Comme d’habitude, elle avait raison.

      Zéro ne se trouvait pas en Californie. Il ne se trouvait même pas aux États-Unis. Au lieu de cela, il était allongé à moitié enseveli sous un amas de neige dans un coin reculé du Nord-Est de la province Saskatchewan, au Canada. Parce qu’il ne pouvait compter que sur l’utilisation de cartes papier et de stylos, il n’avait qu’une vague idée de l’endroit où il se trouvait. Le paysage qui l’entourait ne se résumait qu’à une vaste bande de prairie qui s’étalait à perte de vue, seulement entachée par la neige que des bourrasques avaient arrangée çà et là en congères et par de rares arbres décharnés.

      Et bien sûr, il y avait le chalet.

      Il se trouvait à environ cinq cents mètres de lui, une modeste construction modulaire de plain-pied qui ne semblait ni ancienne ni moderne. Il avait à peu près la taille et la forme d’un semi-remorque (sur lequel, supposait Zéro, on l’avait transporté jusqu’ici) et avait été déposé sans plus de cérémonie sur une fondation en parpaings, dont certains s’étaient affaissés sous son poids, le faisant pencher légèrement d’environ trois degrés.

      Sur le côté est du chalet, Zéro pouvait apercevoir une citerne en acier inoxydable, certainement destinée à collecter la neige fondue et les eaux souterraines. Même à cette distance, il pouvait entendre le faible ronronnement du générateur diesel et n’arrivait pourtant pas à l’apercevoir d’où il était. On distinguait par ailleurs, très clairement, deux panneaux solaires sur le toit. Le chalet était petit, auto-suffisant et presque complètement introuvable.

      Enfin, presque, sinon, il ne l’aurait jamais trouvé.

      Après ce qui lui parut des heures, le soleil se coucha finalement derrière l’horizon, obscurcissant suffisamment la plaine pour que Zéro puisse sortir de sa tanière. Il en était reconnaissant car, avec la tombée de la nuit, la température avait chuté et le froid était mordant malgré les précautions qu’il avait prises pour s’en prémunir. La partie nord du Saskatchewan était tout sauf clémente au mois de février.

      Avant de se diriger prudemment vers le chalet, il procéda à une rapide vérification mentale. C’était un exercice qu’il avait commencé à pratiquer quotidiennement, puis presque toutes les heures, et ce rituel, devenu comme une seconde nature, lui permettait de s’assurer que sa mémoire ne commençait pas à lui faire défaut ou à se détériorer. Tout d’abord, il pensait à ses filles, Maya et Sara, qui avaient respectivement dix-huit et seize ans. Il visualisait leur nom, leur visage, leur âge, le son de leur rire. Ensuite, il pensait à Maria Johansson, ses cheveux blonds lui descendant en cascade le long du dos et ses yeux d’une teinte gris ardoise qui, d’une certaine façon, réussissaient à paraître vifs et froids en même temps. Pour finir, il pensait à Kate, sa femme.

      « Kate. » En fait, il avait murmuré son nom à voix haute, plus comme un mantra qu’autre chose, comme un Amen ponctuant une brève prière ; son nom avait été la première chose qu’il avait oublié lorsque les défaillances latentes de sa mémoire avaient commencé à se manifester. Il revoyait son visage, son odeur, son rire et le petit sifflement qu’elle émettait lorsqu’elle fulminait. Il se souvenait qu’elle avait été assassinée par un ancien agent de la CIA nommé John Watson, un homme que Zéro avait, par le passé, considéré comme étant son ami. Un homme qui s’était enfui et dont on avait perdu toute trace depuis que Zéro avait décidé de l’épargner.

      Alors, il avança doucement et prudemment en direction du chalet, sur la pointe des pieds et balançant son poids à chacun de ses pas. Il ne pouvait pas faire grand-chose pour les traces qu’il laissait dans la neige mais, au moins, il pouvait essayer d’éviter le crissement à chacun de ses pas.

      Son rituel, sa « vérification mentale » comme il l’appelait, était un peu plus important que de s’assurer qu’il n’avait pas de simples trous de mémoire. Huit semaines auparavant, il avait consulté un neurologue suisse, le D. Guyer, le même homme qui lui avait auparavant implanté le suppresseur de mémoire, et qui lui avait annoncé de funestes nouvelles. Il l’avait informé que sa mémoire continuerait de se dégrader à un rythme inconnu jusqu’à disparaître complètement et les dommages infligés à son système limbique finiraient, selon toute vraisemblance, par le tuer.

      Tout cela était en grande partie la raison pour laquelle il surveillait un chalet dans un coin isolé du Saskatchewan en pleine nuit et au beau milieu de l’hiver. Il avait besoin de tout reprendre depuis le début et de trouver quelqu’un qui pourrait lui fournir des réponses. Du moins, il l’espérait.

      Il s’arrêta à une cinquantaine de mètres de l’habitation, posa un genou à terre et demeura ainsi pendant plusieurs minutes dans un silence complet en observant ce qui se passait. De là où il se trouvait, Zéro n’aperçut aucune lumière dans le chalet. Peut-être pour économiser de l’énergie ? Ou bien, les fenêtres étaient-elles recouvertes de planches en bois ? Ou peut-être n’y avait-il personne dans la maison. Toutefois, il pouvait entendre le ronronnement du générateur Diesel un peu plus nettement à présent. S’il n’y avait vraiment personne à l’intérieur, pourquoi était-il en marche ?

      Zéro se hissa sur la pointe des pieds et reprit sa marche. Même de nuit, il pouvait voir la façade extérieure du chalet et ne remarqua ni caméra, ni détecteur, ni tourelles automatiques armées qui le déchireraient en lambeaux à la seconde même où il entrerait dans leur champ de vision. Aussi ridicule que cela puisse paraître, connaissant sa cible, ses craintes étaient bel et bien justifiées.

      Il réalisa alors que sa main s’était automatiquement glissée dans la poche de sa veste et avait agrippé son PPK. Il le relâcha. Il n’aurait pas besoin de son arme, pas ici. Il ne l’avait apportée que par simple mesure de précaution. Cependant, tandis que Zéro atteignait la porte d’entrée du chalet, il était vaguement conscient que sa minutieuse planification s’arrêtait là. Il avait imaginé ce scénario des centaines de fois, notamment durant les dernières heures qu’il avait passées allongé sur la congère et, pourtant, il n’avait aucun moyen de savoir avec certitude ce qui l’attendait derrière cette porte. S’il s’était agi d’un assaut, les choses auraient été bien plus simples ; généralement, il surgissait à l’intérieur, arme au poing et prêt à affronter n’importe quelle situation. Il tirait en premier et posait des questions ensuite.

      Cette fois-ci, cependant, il tourna simplement la poignée de la porte. Elle s’ouvrit facilement, car elle n’était pas fermée à clef. Il poussa la porte et enjamba le seuil prudemment. Comme il l’avait soupçonné depuis l’extérieur, la cabane était entièrement plongée dans le noir. Pourtant, le générateur vrombissait quelque part derrière lui.

      C’est un piège.

      Son cerveau eût à peine le temps d’enregistrer le message qu’il avait déjà fait un autre pas à l’intérieur. Une dalle sous son poids s’enfonça légèrement, pas plus de cinq ou six millimètres.

      Une plaque de pression.

      Zéro se figea.

      « Je ne relèverais pas ce pied si j’étais toi. » La voix lui était familière et pourtant lui semblait venir de toute part, comme si elle provenait d’un microphone multi-directionnel. « Lève les mains, s’il te plaît. »

      Zéro fit ce que la voix lui ordonnait. « Je ne suis pas armé », dit-il d’une voix rendue serrée et rauque pour avoir passé des heures de silence dans le froid dehors.

      « Si, tu l’es », le contredit simplement l’ingénieur. « Tu viens de passer environ quatre heures, allongé derrière une congère. Des caméras dissimulées dans deux des arbres étaient braquées sur toi. Le gros rocher que tu as dépassé


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