Troïlus et Cressida. William Shakespeare

Troïlus et Cressida - William Shakespeare


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légère.

      Si cette pièce n'est pas une des plus morales et des plus fortement conçues de Shakspeare, elle n'est pas une des moins amusantes et des moins instructives. Naturellement, Shakspeare ne se passionne pour aucun de ses personnages; nulle part, peut-être, il n'est entièrement sérieux ou entièrement comique; mais c'est ici surtout qu'il s'est fait un jeu du caprice de ses idées, et qu'il semble avoir voulu donner un double sens à sa composition.

      Johnson observe que le style de Shakspeare, dans Troïlus et Cressida, est plus correct que dans la plupart de ses pièces; on doit y remarquer aussi une foule d'observations politiques et morales, cachet d'un génie supérieur.

      Dryden a refait cette tragédie avec des changements. Il a donné au fond une nouvelle forme; il a omis quelques personnages, et ajouté Andromaque: en général, il y a plus d'ordre et de liaison dans ses scènes, et quelques-unes sont neuves et du plus bel effet.

      Troïlus and Cressida, or Truth found too late (ou la Vérité connue trop tard). London, 1679.

       PERSONNAGES

      PRIAM, roi de Troie.

      HECTOR, )

      TROÏLUS, )

      PARIS, ) ses fils.

      DÉIPHOBE, )

      HÉLÉNUS, )

      ÉNÉE, )

      ANTÉNOR, ) chefs troyens.

      PANDARE, oncle de Cressida.

      CALCHAS, prêtre troyen du parti des Grecs.

      MARGARÉLON, fils naturel de Priam.

      AGAMEMNON, général des Grecs.

      MÉNÉLAS, son frère.

      ACHILLE, )

      AJAX, )

      ULYSSE, ) chefs des Grecs.

      NESTOR, )

      DIOMÈDE, )

      PATROCLE, )

      THERSITE, Grec difforme et lâche.

      ALEXANDRE, serviteur de Cressida.

      UN SERVITEUR DE TROÏLUS.

      UN SERVITEUR DE PARIS.

      UN SERVITEUR DE DIOMÈDE.

      HÉLÈNE, femme de Ménélas.

      ANDROMAQUE, femme d'Hector.

      CASSANDRE, fille de Priam, proph.

      CRESSIDA, fille de Calchas.—SOLDATS GRECS ET TROYENS, etc.

      La scène est tantôt dans Troie, et tantôt dans le camp des Grecs.

       Table des matières

      Troie est le lieu de la scène. Des îles de la Grèce, une foule de princes enflammés d'orgueil et de courroux ont envoyé au port d'Athènes leurs vaisseaux chargés de combattants et des apprêts d'une guerre cruelle. Soixante-neuf chefs, rois couronnés d'autant de petits empires, sont sortis de la baie athénienne et ont vogué vers la Phrygie, tous liés par le voeu solennel de saccager Troie. Dans ses fortes murailles, Hélène, l'épouse du roi Ménélas, dort en paix dans les bras de son ravisseur Pàris; et voilà la cause de cette grande querelle. Les Grecs abordent à Ténédos, et là leurs vaisseaux vomissent de leurs larges flancs sur le rivage tout l'appareil de la guerre. Déjà les Grecs, pleins d'ardeur et fiers de leurs forces encore entières, plantent leurs tentes guerrières sur les plaines de Dardanie. Les six portes de la cité de Priam, la porte Dardanienne, la Thymbrienne, l'Ilias, la Chétas, la Troyenne et l'Anténoride, avec leurs lourds verroux et leurs barres de fer, enferment et défendent les enfants de Troie.—Maintenant l'attente agite les esprits inquiets dans l'un et l'autre parti; Grecs et Troyens sont disposés à livrer tout aux hasards de la fortune:—Et moi je viens ici comme un Prologue armé;—mais non pas pour vous faire un défi dans la confiance que m'inspire la plume de l'auteur, ou le jeu des acteurs, mais simplement pour offrir le costume assorti au sujet, et pour vous dire, spectateurs bénévoles, que notre pièce, franchissant tout l'espace antérieur et les premiers germes de cette querelle, court se placer au milieu même des événements, pour se replier ensuite sur tout ce qui peut entrer et s'arranger dans un plan. Approuvez ou blâmez, faites à votre gré; maintenant, bonne ou mauvaise fortune, c'est la chance de la guerre.

       Table des matières

       Table des matières

      La scène est devant le palais de Priam.

      Entrent TROÏLUS armé et PANDARE.

      Ci-gît Hakin et son varlet

       Tout déarmé et tout défaict

       Avec son espée et sa loche.

      PANDARE.—N'y a-t-il point de remède à toutes ces plaintes?

      TROÏLUS.—Les Grecs sont forts, habiles autant que forts, fiers autant qu'habiles, et vaillants autant que fiers. Mais moi, je suis plus faible que les pleurs d'une femme, plus paisible que le sommeil, plus crédule que l'ignorance. Je suis moins brave qu'une jeune fille pendant la nuit, et plus novice que l'enfance sans expérience.

      PANDARE.—Allons! je vous en ai assez dit là-dessus: quant à moi, je ne m'en mêlerai plus. Celui qui veut faire un gâteau du froment doit attendre la mouture.

      TROÏLUS.—Ne l'ai-je pas attendu?

      PANDARE.—Oui, la mouture; mais il faut attendre le blutage.

      TROÏLUS.—N'ai-je pas attendu?

      PANDARE.—Oui, le blutage: mais il vous faut attendre la levure.

      TROÏLUS.—Je l'ai attendue aussi.

      PANDARE.—Oui, la levure: mais ce n'est pas tout, il faut encore pétrir, faire le gâteau, chauffer le four, cuire; et il faut bien attendre encore que le gâteau se refroidisse, ou vous risquez de vous brûler les lèvres.

      TROÏLUS.—La patience elle-même, toute déesse qu'elle est, supporte la souffrance moins paisiblement que moi. Je m'assieds à la table royale de Priam, et lorsque la belle Cressida vient s'offrir à ma pensée,—que dis-je, traître, quand elle vient?—Quand en est-elle jamais absente?

      PANDARE.—Eh bien! elle était plus belle hier au soir que je ne l'ai jamais vue, ni elle ni aucune autre femme.

      TROÏLUS.—J'en


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