Coeur de panthère. Gustave Aimard
entendu il ne reçut pas de réponse.
Alors le lieutenant sortit de sa chambre et ouvrit la grande porte d’entrée: le Sauvage, aussitôt qu’il entendit ses pas craquer sur le gravier des allées, s’élança, prompt comme la pensée, dans la chambre vacante et se blottit sous le lit.
Un sourire diabolique contracta ses traits, lorsque son oreille attentive saisit les ordres de recherche donnés par Blair à haute voix.
– Personne n’aura l’idée de regarder par ici, pensa-t-il; Wontum est plus rusé que le serpent, plus subtil que l’oiseau de la nuit: il se rit des Faces-Pâles.
Au bout de quelques minutes l’officier rentra dans sa chambre, s’assit devant sa table et se mit à feuilleter des papiers en attendant le résultat des perquisitions. Au bout d’une heure, un caporal se présenta et informa son chef que tout avait été visité dans le fort sans aucun résultat. Alors le lieutenant ferma ses volets, puis se coucha.
Une heure après, la respiration égale et retentissante du jeune homme annonça à son dangereux hôte qu’il était profondément endormi. Wontum rampa hors de sa cachette avec des précautions infinies, s’assit sur le bord du lit, et se mit à contempler le lieutenant, qui, certes, ne soupçonnait point le terrible péril auquel il était exposé.
Le Sauvage tira de sa ceinture un couteau long et acéré; il en essaya la pointe sur le bout de son doigt, et éprouva un mouvement de satisfaction intime en se voyant maître de la situation, en voyant un de ses ennemis mortels complètement à sa discrétion.
Il se redressa de toute la hauteur de sa grande faille et se pencha sur le dormeur en levant son couteau qui jeta, dans l’ombre, un éclair sinistre.
Puis, sa main s’abaissa sans frapper… Le jeune lieutenant souriait au milieu d’un rêve… peut-être son âme, libre pendant quelques instants des liens terrestres, s’était envolée aux régions heureuses où tout est joie, bonheur et amour.
Presque en même temps, troublé par les effluves magnétiques rayonnant autour de l’Indien, son sommeil fut interrompu soudain; Blair ouvrit les yeux.
En apercevant près de lui cette forme sombre et menaçante, le jeune officier chercha à se lever; sa poitrine rencontra la pointe du poignard.
– Silence! gronda le Sauvage.
– Que voulez-vous?
– Vous tuer— de suite— voilà!
Le malheureux lieutenant ferma ses paupières, poussa un soupir; la lame s’était enfoncée toute entière dans sa gorge.
Le bandit regarda froidement le cadavre et resta quelques moments immobile. Tournant ensuite sur ses talons, il marcha vers la porte, l’ouvrit et fit quelques pas dans le vestibule: la mèche fumeuse et carbonisée d’un quinquet jetait dans l’ombre quelques lueurs mourantes, un profond silence régnait partout. Wontum s’enfonça dans le corridor d’un pas de fantôme, cherchant l’escalier qui menait aux étages supérieurs.
L’ayant trouvé aisément, il en gravit légèrement les degrés, s’orienta habilement, et finit par découvrir la porte de la chambre où reposait Manonie.
Là, il s’arrêta pour écouter; point de bruit… la mère et l’enfant dormaient. Au travers d’une crevasse l’Indien reconnut que la veilleuse éclairait encore. Il mit la main sur le loquet pour ouvrir; la serrure était fermée à clef.
Cet obstacle imprévu faillit déconcerter le Sauvage: attendre, c’était perdre un temps précieux, et, aux premiers rayons du jour, courir risque d’une mort certaine; enfoncer la porte, c’était jeter sur lui toute la garnison que Manonie, réveillée, appellerait à grands cris…
Que faire donc?… Wontum sentait chanceler son audace.
Mais, lorsqu’un de ses favoris accomplit l’œuvre du mal, Satan leur procure parfois une chance toute spéciale: ainsi arriva-t-il en cette occasion.
La démarche lourde et cadencée d’une ronde de nuit se fit soudain entendre, tirant de leur silence les échos endormis sous les voûtes sombres. Un mouvement se fit entendre dans la chambre de Manonie. Wontum prêta l’oreille avec avidité, puis il fit un bond en arrière, et eût à peine le temps de se cacher dans l’embrasure d’une autre porte. Manonie sortait, un bougeoir à la main, et se dirigeait vers l’escalier.
Tout en descendant légèrement les marches elle murmurait quelques mots, comme si elle eût répondu à ses propres pensées.
– Le voilà peut-être arrivé! dit-elle avec joie.
Et elle courut vers la porte, croyant aller au-devant de son mari.
Pendant qu’elle s’éloignait, le Sauvage se glissa à pas de loup dans la chambre, se cacha derrière les doubles rideaux de la fenêtre et attendit les événements.
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