Quentin Durward. Вальтер Скотт

Quentin Durward - Вальтер Скотт


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atteindre.

      De même l'avarice de Louis faisait place à une apparence de prodigalité quand il fallait qu'il gagnât le favori ou le ministre d'un prince rival, soit pour détourner une attaque dont il était menacé, soit pour rompre une confédération dirigée contre lui. Il aimait le plaisir et les divertissemens; mais ni l'amour ni la chasse, quoique ce fussent ses passions dominantes, ne l'empêchèrent jamais de donner régulièrement ses soins aux affaires publiques et à l'administration de son royaume. Il avait une connaissance profonde des hommes, et il l'avait acquise en se mêlant personnellement dans tous les rangs de la vie privée. Quoique naturellement fier et hautain, il ne faisait aucune attention aux distinctions arbitraires de la société; et quoiqu'une telle conduite fût regardée à cette époque comme aussi étrange que peu naturelle, il n'hésitait pas à choisir dans le rang le plus bas les hommes à qui il confiait les emplois les plus importans; mais ces hommes, il savait si bien les choisir, qu'il se trompait rarement sur leurs qualités.

      Il y avait cependant des contradictions dans le caractère de ce monarque aussi habile qu'artificieux; car l'homme n'est pas toujours d'accord avec lui-même. Quoique Louis fût le plus faux, et le plus trompeur des hommes, quelques-unes des plus grandes erreurs de sa vie vinrent de la confiance trop aveugle qu'il accorda à l'honneur et à l'intégrité des autres. Les fautes qu'il commit dans ce genre semblent avoir eu pour cause un raffinement excessif de sa politique, qui lui persuadait de feindre une confiance sans réserve envers ceux qu'il se proposait de tromper; car, dans sa conduite ordinaire, il était aussi méfiant et aussi soupçonneux qu'aucun tyran qui ait jamais existé. Deux traits peuvent encore servir à compléter l'esquisse du portrait de ce monarque terrible parmi les souverains turbulens de son époque, et qui pourrait être comparé à un gardien au milieu des bêtes féroces qu'il domine par sa seule prudence et son habileté supérieure, mais par lesquelles il serait mis en pièces s'il ne les domptait en leur distribuant avec adresse et discernement la nourriture et les coups.

      Le premier de ces traits caractéristiques de Louis XI était une superstition excessive, fléau dont le ciel afflige souvent ceux qui refusent d'écouter les avis de la religion. Jamais Louis ne chercha à apaiser le remords de ses actes criminels en changeant quelque chose à son système machiavélique; mais il s'efforçait, quoique en vain, de calmer sa conscience et de la réduire au silence par des pratiques superstitieuses, des pénitences sévères, et des donations libérales au clergé.

      Le second, et il se trouve quelquefois étrangement associé au premier, était le goût des plaisirs crapuleux et des débauches secrètes. Le plus sage ou du moins le plus astucieux des souverains de son temps, il aimait passionnément la vie privée; homme d'esprit lui-même, il jouissait des plaisanteries et des reparties de la conversation plus qu'on n'aurait pu s'y attendre d'après les autres traits de son caractère. Il s'engageait même dans des intrigues obscures et dans des aventures comiques, avec une facilité qui n'était guère d'accord avec son naturel méfiant et ombrageux. Enfin, il avait un goût si prononcé pour les anecdotes de ce genre de galanterie ignoble, qu'il en fit faire une collection bien connue des bibliomanes, pour lesquels la bonne édition de cet ouvrage est d'un très-grand prix, et qui seuls doivent se permettre d'y jeter les yeux.

      Le ciel fit servir à ses desseins les ravages de la tempête comme la pluie la plus douce. Ce fut par le moyen du caractère prudent et énergique, quoique fort peu aimable, de ce monarque, qu'il lui plut de rendre à la grande nation française les bienfaits d'un gouvernement civil, qu'elle avait presque entièrement perdu au moment de son avènement à la couronne.

      Avant de succéder à son père, Louis avait donné plus de preuves de vices que de talens. Sa première femme, Marguerite d'écosse, avait succombé sous les traits de la calomnie, dans la cour de son mari, sans les encouragemens duquel personne n'eût osé prononcer un seul mot injurieux contre cette aimable princesse. Il avait été fils ingrat et rebelle, tantôt conspirant pour s'emparer de la personne de son père, tantôt lui faisant la guerre ouvertement. Pour le premier de ces crimes, il fut banni dans le Dauphiné, qui était son apanage, et qu'il gouverna avec beaucoup de sagesse. Après le second, il fut réduit à un exil absolu, et forcé de recourir à la merci et presque à la charité du duc de Bourgogne et de son fils, à la cour desquels il reçut, jusqu'à la mort de son père, arrivée en 1461, une hospitalité dont il les paya ensuite assez mal.

      Louis XI commençait à peine à régner, qu'il fut presque subjugué par une ligue que formèrent contre lui les grands vassaux de sa couronne, et à la tête de laquelle était le duc de Bourgogne, ou, pour mieux dire, son fils le comte de Charolais. Ils levèrent une armée formidable, firent le blocus de Paris, et livrèrent, sous les murs même de cette capitale, une bataille dont le succès douteux mit la monarchie française à deux doigts de sa perte. Il résulte souvent de ces batailles, dont l'événement est contesté, que le plus sage des deux généraux en recueille, sinon l'honneur, du moins le véritable fruit. Louis, qui avait donné, à celle de Montlhéri, des preuves de courage, sut, par sa prudence, tirer de cette journée incertaine autant de profit que si elle eût été pour lui une victoire complète. Il temporisa jusqu'à ce que ses ennemis eussent rompu leur ligue, et il sema avec tant d'adresse la méfiance et la jalousie entre ces grandes puissances, que leur ligue du bien public, comme ils la nommaient, mais dont le véritable but était de renverser la monarchie française et de n'en laisser subsister que l'ombre, fut complètement dissoute, et ne se renouvela jamais d'une manière si formidable.

      Depuis cette époque, Louis, n'ayant rien à craindre de l'Angleterre, déchirée par ses guerres civiles entre les maisons d'York et de Lancastre, s'occupa, pendant plusieurs années, en médecin habile, mais sans pitié, à guérir les blessures du corps politique, ou plutôt à arrêter, tantôt par des remèdes doux, tantôt en employant le fer et le feu, les progrès de la gangrène mortelle dont il était attaqué. Ne pouvant réprimer entièrement les brigandages des compagnies franches et les actes d'oppression d'une noblesse enhardie par l'impunité, il chercha du moins à y mettre des bornes, et peu à peu, à force d'attention et de persévérance, il augmenta d'une part l'autorité royale, et diminua de l'autre le pouvoir de ceux qui la contrebalançaient.

      Le roi de France était pourtant toujours entouré d'inquiétudes et de périls. Quoique les membres de la ligue du bien public ne fussent pas d'accord entre eux, ils existaient encore, et les tronçons du serpent pouvaient se réunir et redevenir dangereux; mais Louis avait surtout à craindre la puissance croissante du duc de Bourgogne, alors un des plus grands princes de l'Europe, et qui ne perdait guère de son rang par la dépendance précaire où se trouvait son duché de la couronne de France.

      Charles, surnommé l'Intrépide, ou plutôt le Téméraire, car son courage était allié à une folle audace, portait alors la couronne ducale de Bourgogne, et il brûlait de la changer en couronne royale et indépendante. Le caractère de ce prince formait, sous tous les rapports, un contraste parfait avec celui de Louis XI.

      Celui-ci était calme, réfléchi et plein d'adresse, ne poursuivant jamais une entreprise désespérée, et n'en abandonnant aucune dont le succès était probable, quoique éloigné. Le génie du duc était tout différent: il se précipitait dans le péril, parce qu'il l'aimait, et n'était arrêté par aucune difficulté, parce qu'il les méprisait. Louis ne sacrifiait jamais son intérêt à ses passions. Charles, au contraire, ne sacrifiait ni ses passions, ni même ses fantaisies, à aucune considération. Malgré les liens de parenté qui les unissaient, malgré les secours que le duc et son père avaient accordés à Louis pendant son exil, lorsqu'il était dauphin, il régnait entre eux une haine et un mépris réciproques. Le duc de Bourgogne méprisait la politique cauteleuse du roi; il l'accusait de manquer de courage, quand il le voyait employer l'argent et les négociations pour se procurer des avantages dont, à sa place, il se serait assuré à main armée; et il le haïssait, non-seulement à cause de l'ingratitude dont ce prince avait payé ses services, mais pour les injures personnelles qu'il en avait reçues. Il ne pouvait lui pardonner les imputations que les ambassadeurs de Louis s'étaient permises contre lui pendant la vie de son père, et surtout l'appui que le roi de France accordait en secret aux mécontens de Gand, de Liège et d'autres grandes villes de Flandre. Ces cités, jalouses de leurs privilèges et fières de leurs richesses y étaient souvent en insurrection contre


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