Les chasseurs de chevelures. Reid Mayne

Les chasseurs de chevelures - Reid Mayne


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sous leur ombre, on avait place de nombreux sieges de maconnerie vernissee, dans le style propre aux contrees espagnoles. Il y avait un escalier taille dans la berge, au-dessus duquel pendaient les branches d'arbustes pleureurs, et qui conduisait jusqu'au bord de l'eau. J'avais remarque une petite barque amarree sous les saules, aupres de la derniere marche. De ce cote seulement, les yeux pouvaient franchir les limites de l'enclos. Le point de vue etait magnifique, et commandait le cours sinueux du Del-Norte a la distance de plusieurs milles.

      Le pays, de l'autre cote de la riviere, paraissait inculte et inhabite. Aussi loin que l'oeil pouvait s'etendre, le riche feuillage du cotonnier garnissait le paysage, et couvrait la riviere de son ombre. Au sud, pres de la ligne de l'horizon, une fleche solitaire s'elancait du milieu des massifs d'arbres. C'etait l'eglise d'El-Paso del Norte dont les coteaux couverts de vignes se confondaient avec les plans interieurs du ciel lointain. A l'est, s'elevaient les hauts pics des montagnes Rocheuses; la chaine mysterieuse des Organos, dont les lacs sombres et eleves, avec leurs flux et reflux, impriment a l'ame du chasseur solitaire une superstitieuse terreur. A l'ouest, tout au loin, et a peine visibles, les rangees jumelles des Mimbres, ces montagnes d'or, dont les defiles resonnent si rarement sous le pas de l'homme. Le trappeur intrepide lui-meme rebrousse chemin quand il approche de ces contrees inconnues qui s'etendent au nord-ouest du Gila: c'est le pays des Apaches et des Navajoes anthropophages.

      Chaque soir nous allions sous les bosquets de cotonniers, et, assis pres l'un de l'autre sur un des bancs, nous admirions ensemble les feux du soleil couchant. A ce moment de la journee nous etions toujours seuls, moi et ma petite compagne. Je dis ma petite compagne, et cependant, a cette epoque, j'avais cru voir en elle un changement soudain; il me semblait que sa taille s'etait elevee, et que les lignes de son corps accusaient de plus en plus les contours de la femme! A mes yeux, ce n'etait plus une enfant. Ses formes se developpaient, les globes de son sein soulevaient son corsage par des ondulations plus amples, et ses gestes prenaient ces allures feminines qui commandent le respect. Son teint se rehaussait de plus vives couleurs, et son visage revetait un eclat plus brillant de jour en jour. La flamme de l'amour, qui s'echappait de ses grands yeux noirs, ajoutait encore a leur humide eclat. Il s'operait une transformation dans son ame et dans son corps, et cette transformation etait l'oeuvre de l'amour. Elle etait sous l'influence divine!

      Un soir, nous etions assis comme d'habitude, sous l'ombre solennelle d'un bosquet. Nous avions pris avec nous la guitare et la mandoline, mais a peine en avions-nous tire quelques notes, la musique etait oubliee et les instruments reposaient sur le gazon a nos pieds. Nous preferions a tout la melodie de nos propres voix. Nous etions plus charmes par l'expression de nos sentiments intimes que par celle des chants les plus tendres. Il y avait assez de musique autour de nous: le bourdonnement de l'abeille sauvage, disant adieu aux corolles qui se fermaient, le "whoup" du gruya dans les glaieuls lointains, et le doux roucoulement des colombes perchees par couples sur les branches des arbres voisins et se murmurant comme nous leurs amours. Le feuillage des bois avait revetu les tons chauds et varies de l'automne. L'ombre des grands arbres se jouait sur la surface de l'eau, et diaprait le courant calme et silencieux. Le soleil allait atteindre l'horizon, le clocher d'El-Paso, reflechissant ses rayons, scintillait comme une etoile d'or. Nos yeux erraient au hasard, et s'arretaient sur la girouette etincelante.

      – L'eglise! murmura ma compagne, comme se parlant a elle-meme. C'est a peine si je puis me rappeler comment elle est. Il y a si longtemps que je ne l'ai vue!

      – Depuis combien de temps, donc?

      – Oh! bien des annees, bien des annees; j'etais toute jeune alors.

      – Et depuis lors vous n'avez pas depasse l'enceinte de ces murs?

      – Oh! si fait. Papa nous a conduites souvent en bateau, en descendant la riviere; mais pas dans ces derniers temps.

      – Et vous n'avez pas envie d'aller la-bas dans ces grands bois si gais?

      – Je ne le desire pas. Je suis heureuse ici.

      – Mais serez-vous toujours heureuse ici?

      – Et pourquoi pas, Henri? Quand vous etes pres de moi, comment ne serais-je pas heureuse?

      – Mais quand…

      Une triste pensee sembla obscurcir son esprit. Tout entiere a l'amour, elle n'avait jamais reflechi a la possibilite de mon depart, et je n'y avais pas reflechi plus qu'elle. Ses joues palirent soudainement, et je lus une profonde douleur dans ses yeux qu'elle fixa sur moi; mais les mots etaient prononces.

      – … Quand il faudra que je vous quitte?

      Elle se jeta entre mes bras avec un cri aigu, comme si elle avait ete frappee au coeur, et, d'une voix passionnee, cria:

      – Oh! mon Dieu! mon Dieu! me quitter! me quitter! – Oh! vous ne me quitterez pas vous qui m'avez appris a aimer.

      – Oh! Henri, pourquoi m'avez-vous dit que vous m'aimiez? Pourquoi m'avez-vous enseigne l'amour?

      – Zoe!

      – Henri! Henri! Dites que vous ne me quitterez pas?

      – Jamais! Zoe! je vous le jure! Jamais! jamais.

      – Il me sembla entendre a ce moment le bruit d'un aviron. Mais l'agitation violente de la passion, le contact de ma bien-aimee, qui, dans le transport de ses craintes, m'avait enlace de ses deux bras, m'empecherent de tourner les yeux vers le bord.

      C'est sans doute un osprey7 qui plonge, pensai-je, et, ne m'occupant plus de cela, je me laissai aller a l'extase d'un long et enivrant baiser. Au moment ou je relevais la tete, une forme qui s'elevait de la rive frappa mes yeux: un noir sombrero borde d'un galon d'or. Un coup d'oeil me suffit pour reconnaitre celui qui le portait: c'etait Seguin. Un instant apres, il etait pres de nous.

      – Papa! s'ecria Zoe, se levant tout a coup et se jetant dans ses bras.

      Le pere la retint aupres de lui en lui prenant les deux mains qu'il tint serrees dans les siennes. Pendant un moment il garda le silence, fixant sur moi un regard dont je ne saurais rendre l'expression. C'etait un melange de reproche, de douleur et d'indignation. Je m'etais leve pour aller a sa rencontre; mais ce regard etrange me cloua sur place, et je restai debout, rougissant et silencieux.

      – Et c'est ainsi que vous me recompensez de vous avoir sauve la vie? Un noble remerciment, mon cher monsieur, qu'en pensez-vous?

      Je ne repondis pas.

      – Monsieur, continua-t-il, la voix tremblante d'emotion, vous ne pouviez pas m'offenser plus cruellement.

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      1

      Mustenos, chevaux mexicains de race espagnole.

      2

      Mot a mot: Collines a fruit.

      3

      Chat sauvage de montagne.

      4

      Nom


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<p>7</p>

Aigle pecheur.