Les enfants des bois. Reid Mayne

Les enfants des bois - Reid Mayne


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avec activité. Ils prévirent le cas où l'animal, furieux, se frayerait un passage à travers les flammes, et firent avancer leurs chevaux, dans l'intention de se mettre en route dès qu'ils auraient allumé l'incendie.

      Ils avaient entassé devant la porte du bois sec et des broussailles; Swartboy avait pris son briquet et s'apprêtait à frapper la pierre avec l'acier, lorsqu'un grattement tout particulier se fit entendre à l'intérieur. Le lion semblait se débattre avec violence et promener ses pattes contre le mur; sa voix était sourde et étouffée comme si elle fût venue de loin.

      Les trois chasseurs se regardèrent avec anxiété.

      Le grattement continuait; la voix était de moins en moins distincte; mais tout à coup elle fit entendre un rugissement si perçant qu'ils tressaillirent d'effroi. Ils ne pouvaient croire qu'il y eût une muraille entre eux et leur formidable adversaire. Le rugissement fut répété. Grand Dieu, il ne partait plus de l'intérieur, il grondait au-dessus de leurs têtes! le lion était-il sur le toit?

      Tous trois reculèrent et levèrent les yeux. Le spectacle qu'ils aperçurent les remplirent de surprise et de terreur. La tête du lion sortait du tuyau de la cheminée. Ses yeux étincelants et ses dents blanches formaient un effrayant contraste avec la suie dont il était souillé. Il s'efforçait de grimper. Déjà il avait un pied en dehors du couronnement.

      Nos aventuriers se seraient enfuis s'ils n'avaient remarqué que l'animal avait la partie inférieure du corps engagée et retenue par quelque obstacle. Pourtant ses dents et ses griffes étaient à l'œuvre. Les pierres et le mortier pleuvaient autour de lui, et il allait bientôt débarrasser sa large poitrine.

      Von Bloom ne lui en laissa pas le temps.

      Il arma son roer; Hendrik visa avec sa carabine, et les deux coups partirent à la fois.

      Les yeux du lion se fermèrent. Il agita convulsivement la tête. Ses pattes tombèrent inertes sur le couronnement; ses mâchoires s'ouvrirent et le sang ruissela sur sa langue. Au bout de quelques minutes il était mort. Toutefois, Swartboy, pour sa satisfaction personnelle, décocha une vingtaine de flèches à la tête de l'animal qui devint semblable à celle d'un porc-épic.

      L'énorme bête était tellement serrée dans le tuyau que, même après sa mort, elle conserva sa bizarre position. En d'autres circonstances on l'aurait descendue pour prendre sa peau, mais on n'avait pas le temps de l'écorcher. Von Bloom et ses compagnons remontèrent à cheval et se remirent en route sans délai.

      CHAPITRE XII

      LA VÉRITÉ SUR LES LIONS

      Chemin faisant, la conversation roula sur les lions. Swartboy, né et élevé dans les bois, pour ainsi dire au milieu de leurs tannières, était instruit de leurs habitudes beaucoup mieux que Buffon lui-même.

      Il serait inutile de décrire l'extérieur du lion. Il n'est aucun de nos lecteurs qui ne le connaisse pour l'avoir vu vivant dans une collection zoologique, ou empaillé dans un muséum. On sait que la femelle se distingue du mâle par ses dimensions et par l'absence de crinière. Il n'y a pas deux espèces de lions, mais il y a sept variétés reconnues:

      Le lion de Barbarie;

      Le lion du Sénégal;

      Le lion indien;

      Le lion persan;

      Le lion jaune du Cap;

      Le lion noir du Cap;

      Le lion sans crinière.

      On ne remarque pas entre ces variétés les différences essentielles qui distinguent celles de la plupart des animaux, et l'on peut constater au premier coup d'œil qu'elles appartiennent toutes à la même espèce.

      Le lion de Perse est un peu plus petit que les autres.

      Le lion de Barbarie est d'un brun plus foncé et porte une épaisse crinière. Celle du lion du Sénégal est comparativement insignifiante. Ce dernier est d'un jaune clair et brillant.

      On prétend que le lion sans crinière se trouve en Asie, mais quelques naturalistes ont révoqué en doute son existence.

      Les deux lions du Cap se distinguent principalement l'un de l'autre par la couleur de la crinière. Celle de l'un est noire ou d'un brun foncé; celle de l'autre fauve, comme le reste de son corps.

      Les lions de l'Afrique méridionale sont plus grands que les autres, et la variété noire est la plus féroce et la plus dangereuse.

      Les lions habitent tout le continent africain et la partie méridionale de l'Asie. Ils étaient jadis communs au sud de l'Europe, d'où ils ont disparu. Il n'y en a pas en Amérique. L'animal appelé lion dans les colonies espagnoles est le couguar ou puma (felis concolor), qui n'a pas un tiers de la taille du lion, et ne lui ressemble que par sa couleur fauve. Le puma a quelque analogie avec un lionceau de six mois.

      L'Afrique est la terre natale du lion. On l'y rencontre partout, excepté dans les pays où la population s'est agglomérée.

      On a donné au lion le titre de roi des forêts; mais il ne le mérite pas. A proprement parler, ce n'est pas un animal des bois. Il n'est pas organisé pour monter sur les arbres, et il trouverait sa nourriture moins aisément dans une forêt qu'en plaine. La panthère, le léopard, le jaguar peuvent suivre l'oiseau dans son nid et le singe sur les cimes les plus élevées. La forêt est leur domicile naturel; mais le lion hante les grandes plaines où paissent les ruminants, et se cache dans les taillis dont elles sont bordées. Il se repaît de la chair de divers animaux, préférant les uns aux autres, suivant le pays où il se trouve. Il les tue pour lui, bien qu'il lui arrive parfois d'enlever une proie au loup, au chacal et à la l'hyène. C'est à tort qu'on a supposé que le chacal était son pourvoyeur. Si cet animal l'accompagne souvent, c'est pour recueillir ses restes, et on peut dire avec plus de raison que le lion est le pourvoyeur du chacal.

      Le lion ne court pas vite, et la plupart des grands ruminants pourraient le distancer sans peine; s'il s'en empare, c'est par la ruse, par la soudaineté de l'attaque et par l'agilité de son bond. Il se glisse près d'eux à la dérobée, ou se tient en embuscade, et s'élance de l'endroit où il est tapi. Sa structure anatomique lui permet de franchir en sautant une intervalle que certains écrivains, témoins oculaires, évaluent à seize pas. S'il manque sa proie du premier bond, il est rare qu'il la poursuive. Quelquefois pourtant il fait une seconde et même une troisième tentative; mais en cas d'insuccès, il s'éloigne sans inquiéter davantage la victime qu'il comptait immoler.

      Les lions vivent isolés; cependant on en trouve jusqu'à dix à la fois qui chassent de compagnie et se renvoient le gibier. Ils attaquent presque tous les autres animaux. Le bison, la girafe, l'oryx, l'élan, le gnou, les jeunes éléphants succombent sous leurs coups. Le rhinocéros lui-même n'est pas à l'abri de leurs atteintes; mais on s'abuserait en croyant qu'ils sont toujours vainqueurs, tantôt ils sont terrassés, tantôt les deux combattants restent sur le champ de bataille.

      La chasse au lion n'est pas une profession. Sa dépouille n'a point de valeur, et comme on ne saurait l'attaquer sans danger, on ne songerait pas à le détruire s'il ne prenait l'offensive en dévorant les chevaux et les bœufs des fermiers. Ceux-ci, brûlant de se venger, se mettent en campagne; et dans certains districts on chasse le lion avec une infatigable activité; mais dans les contrées où l'on n'élève pas de bestiaux on le laisse généralement tranquille. Il y a plus, les Bosjesmans et autres tribus errantes respectent sa vie et ne voient en lui qu'un pourvoyeur!

      Hendrick, qui avait entendu parler de ce fait, demanda à Swartboy s'il était vrai, et le Bosjesman répondit affirmativement.

      – Mes compatriotes, dit-il, ont l'habitude d'épier le lion, de suivre ses traces jusqu'à ce qu'ils le rencontrent. Quelquefois ils sont guidés par les vautours. Quand on a découvert son gîte, on attend qu'il ait fini son repas et qu'il s'éloigne. Alors on s'approche et on s'approprie ses restes. De cette façon, le Bosjesman s'empare souvent des trois quarts d'un animal de haute taille qu'il aurait eu de la peine à tuer lui-même. Sachant que le lion est peu disposé à l'attaquer, il n'en a pas peur; au contraire, il se félicite de le voir. Il est heureux quand les lions sont en grand nombre dans une contrée, parce que


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