Actes et Paroles, Volume 3. Victor Hugo

Actes et Paroles, Volume 3 - Victor Hugo


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siecles) dits par M. Noel Parfait, au benefice de la ville de Chateaudun; les deux soirees de lectures organisees par M. Bonvalet, maire du 5e arrondissement, l'une pour les blesses, l'autre pour les orphelins et les veuves; la soiree de Mlle Thurel, directrice d'une ambulance, pour les malades; les representations donnees par le club Drouot pour les orphelins et les veuves; par le commandant Fourdinois pour les blesses; par les carabiniers parisiens pour les blesses; les soirees ou Mlle Suzanne Lagier chantait, sur la musique de M. Darcier, Petit, petit (Chatiments) au profit des ambulances; la representation du Comite des artistes dramatiques pour un canon; celle du 18e arrondissement pour la bibliotheque populaire; celle de M. Dumaine, a la Gaite, pour les blesses; celle de Mme Raucourt, au theatre Beaumarchais, pour contribuer a l'equipement des compagnies de marche; celle de la mairie de Montmartre, pour les pauvres; celle de la mairie de Neuilly, pour les pauvres; celle du 5e arrondissement, pour son ouvroir municipal; la soiree donnee le 25 decembre au Conservatoire pour la caisse de secours de la Societe des victimes de la guerre; les diverses lectures des Chatiments organisees, pour les canons et les blesses, par la legion d'artillerie et par dix-huit bataillons de la garde nationale, qui sont les 7e, 24e, 64e, 90e, 92e, 93e, 95e, 96e, 100e, 109e, 134e, 144e, (deux representations), 152e, 153e, 166e, 194e, 239e, 247e.

      Pour toutes ces representations, M. Victor Hugo a fait l'abandon de son droit d'auteur.

      Ces representations ont cesse par la force majeure en janvier, les theatres n'ayant plus de bois pour le chauffage ni de gaz pour l'eclairage.

* * * * *

      Le 30 octobre, vers minuit, M. Victor Hugo, rentrant chez lui, rencontra, rue Drouot, M. Gustave Chaudey, sortant de la mairie dont il etait adjoint. Il etait accompagne de M. Philibert Audebrand. M. Victor Hugo avait connu M. Gustave Chaudey a Lausanne, au congres de la Paix, tenu en septembre 1869; ils se serrerent la main.

      Quelques semaines apres, M. Gustave Chaudey vint avenue Frochot pour voir M. Victor Hugo, et, ne l'ayant pas trouve, lui laissa deux mots par ecrit pour lui demander l'autorisation de faire dire les Chatiments au profit de la caisse de secours de la mairie Drouot.

      M. Victor Hugo repondit par la lettre qu'on va lire:

A M. GUSTAVE CHAUDEY

      22 novembre. Mon honorable concitoyen, quand notre eloquent et vaillant Gambetta, quelques jours avant son depart, est venu me voir, croyant que je pouvais etre de quelque utilite a la republique et a la patrie, je lui ai dit: Usez de moi comme vous voudrez pour l'interet public. Depensez-moi comme l'eau.

      Je vous dirai la meme chose. Mon livre comme moi, nous appartenons a la France. Qu'elle fasse du livre et de l'auteur ce qu'elle voudra.

      C'est du reste ainsi que je parlais a Lausanne, vous en souvenez-vous? Vous ne pouvez avoir oublie Lausanne, ou vous avez laisse, vous personnellement, un tel souvenir. Je ne vous avais jamais vu, je vous entendais pour la premiere fois, j'etais charme. Quelle loyale, vive et ferme parole! laissez-moi vous le dire. Vous vous etes montre a Lausanne un vrai et solide serviteur du peuple, connaissant a fond les questions, socialiste et republicain, voulant le progres, tout le progres, rien que le progres, et voulant cela comme il faut le vouloir; avec resolution, mais avec lucidite.

      En ce moment-ci, soit dit en passant, j'irais plus loin que vous, je le crois, dans le sens des aspirations populaires, car le probleme s'elargit et la solution doit s'agrandir. Mais vous etes de mon avis et je suis absolument du votre sur ce point que, tant que la Prusse sera la, nous ne devons songer qu'a la France. Tout doit etre ajourne. A cette heure pas d'autre ennemi que l'ennemi. Quant a la question sociale, c'est un probleme insubmersible, et nous la retrouverons plus tard. Selon moi, il faudra la resoudre dans le sens a la fois le plus sympathique et le plus pratique. La disparition de la misere, la production du bien-etre, aucune spoliation, aucune violence, le credit public sous la forme de monnaie fiduciaire a rente creant le credit individuel, l'atelier communal et le magasin communal assurant le droit au travail, la propriete non collective, ce qui serait un retour au moyen age, mais democratisee et rendue accessible a tous, la circulation, qui est la vie decuplee, en un mot l'assainissement des hommes par le devoir combine avec le droit; tel est le but. Le moyen, je suis de ceux qui croient l'entrevoir. Nous en causerons.

      Ce qui me plait en vous, c'est votre haute et simple raison. Les hommes tels que vous sont precieux. Vous marcherez un peu plus de notre cote, parce que votre coeur le voudra, parce que votre esprit le voudra, et vous etes appele a rendre aux idees et aux faits de tres grands services.

      Pour moi l'homme n'est complet que s'il reunit ces trois conditions, science, prescience, conscience.

      Savoir, prevoir, vouloir. Tout est la.

      Vous avez ces dons. Vous n'avez qu'un pas de plus a faire en avant.

      Vous le ferez.

      Je reviens a la demande que vous voulez bien m'adresser.

      Ce n'est pas une lecture des Chatiments que je vous concede. C'est autant de lectures que vous voudrez.

      Et ce n'est pas seulement dans les Chatiments que vous pourrez puiser, c'est dans toutes mes oeuvres.

      Je vous redis a vous la declaration que j'ai deja faite a tous.

      Tant que durera cette guerre, j'autorise qui le veut a dire ou a representer tout ce qu'on voudra de moi, sur n'importe quelle scene et n'importe de quelle facon, pour les canons, les combattants, les blesses, les ambulances, les municipalites, les ateliers, les orphelinats, les veuves et les enfants, les victimes de la guerre, les pauvres, et j'abandonne tous mes droits d'auteur sur ces lectures et sur ces representations.

      C'est dit, n'est-ce pas? Je vous serre la main.

V. H.

      Quand vous verrez votre ami M. Cernuschi, dites-lui bien combien j'ai ete touche de sa visite. C'est un tres noble et tres genereux esprit. Il comprend qu'en ce moment ou la grande civilisation latine est menacee, les italiens doivent etre francais. De meme que demain, si Rome courait les dangers que court aujourd'hui Paris, les francais devraient etre italiens. D'ailleurs, de meme qu'il n'y a qu'une seule humanite, il n'y a qu'un seul peuple. Defendre partout le progres humain en peril, c'est l'unique devoir. Nous sommes les nationaux de la civilisation.

      VI

ELECTIONS A L'ASSEMBLEE NATIONALESCRUTIN DU 8 FEVRIER 1871SEINE

      M. Victor Hugo est elu par 214,169 suffrages

      BORDEAUX

      I

ARRIVEE A BORDEAUX

      Le 14 fevrier, lendemain de son arrivee a Bordeaux, M. Victor Hugo, a sa sortie de l'Assemblee, invite a monter sur un balcon qui domine la grande place, pour parler a la foule qui l'entourait, s'y est refuse. Il a dit a ceux qui l'en pressaient:

      A cette heure, je ne dois parler au peuple qu'a travers l'Assemblee. Vous me demandez ma pensee sur la question de paix ou de guerre. Je ne puis agiter cette question ici. La prudence fait partie du devouement. C'est la question meme de l'Europe qui est pendante en ce moment. La destinee de l'Europe adhere a la destinee de la France. Une redoutable alternative est devant nous, la guerre desesperee ou la paix plus desesperee encore. Ce grand choix, le desespoir avec la gloire ou le desespoir avec la honte, ce choix terrible ne peut se faire que du haut de la tribune. Je le ferai. Je ne manquerai, certes, pas au devoir. Mais ne me demandez pas de m'expliquer ici. Une parole de trop serait grave dans la place publique. Permettez-moi de garder le silence. J'aime le peuple, il le sait. Je me tais, il le comprendra.

      Puis, se tournant vers la foule, Victor Hugo a jete ce cri: Vive la

      Republique! Vive la France!

      II

POUR LA GUERRE DANS LE PRESENT ET POUR LA PAIX DANS L'AVENIRASSEMBLEE NATIONALE

      SEANCE DU 1er MARS 1871

      Presidence de M. JULES GREVY

      M. LE PRESIDENT. – La parole est a M. Victor Hugo. (Mouvement d'attention.)

      M. VICTOR HUGO. – L'empire a commis deux parricides, le meurtre de la republique, en 1851, le meurtre de la France, en 1871. Pendant dix-neuf ans, nous avons subi – pas en silence – l'eloge officiel et public de l'affreux


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