Tolstoy: What is Art? & Wherein is Truth in Art (Essays on Aesthetics and Literature). Leo Tolstoy
proie à l'amour vagissant.
Les glaives sont brisés! comme notre jeunesse,
Ma chère! Mais les dents, les ongles acérés,
Vengent bientôt l'épée et la dague traîtresse.
O fureur des cœurs mûrs par l'amour ulcérés!
Dans le ravin hanté des chats-pards et des onces
Nos héros, s'étreignant méchamment, ont roulé,
Et leur peau fleurira l'aridité des ronces.
Ce gouffre, c'est l'enfer, de nos amis peuplé!
Roulons-y sans remords, amazone inhumaine,
Afin d'éterniser l'ardeur de notre haine! [107]
To be exact, I should mention that the collection contains verses less comprehensible than these, but not one poem which is plain and can be understood without a certain effort—an effort seldom rewarded; for the feelings which the poet transmits are evil and very low ones. And these feelings are always, and purposely, expressed by him with eccentricity and lack of clearness. This premeditated obscurity is especially noticeable in his prose, where the author could, if he liked, speak plainly.
Take, for instance, the first piece from his "Petits Poèmes":—
L'ETRANGER
Qui aimes-tu le mieux, homme énigmatique, dis? ton père, ta mère, ta sœur, ou ton frère?
Je n'ai ni père, ni mère, ni sœur, ni frère.
Tes amis?
Vous vous servez là d'une parole dont le sens m'est restê jusqu'à ce jour inconnu.
Ta patrie?
J'ignore sous quelle latitude elle est située.
La beauté?
Je l'aimerais volontiers, desse et immortelle.
L'or?
Je le hais comme vous haïssez Dieu.
Et qu'aimes-tu donc, extraordinaire étranger?
J'aime les nuages .... les nuages qui passent .... là bas, .... les merveilleux nuages! [108]
The piece called "La Soupe et les Nuages" is probably intended to express the unintelligibility of the poet even to her whom he loves. This is the piece in question:—
Ma petite folle bien-aimée me donnait à dîner, et par la fenêtre ouverte de la salle à manger je contemplais les mouvantes architectures que Dieu fait avec les vapeurs, les merveilleuses constructions de l'impalpable. Et je me disais, à travers ma contemplation: "Toutes ces fantasmagories sont presque aussi belles que les yeux de ma belle bien-aimée, la petite folle monstrueuse aux yeux verts."
Et tout à coup je reçus un violent coup de poing dans le dos, et j'entendis une voix rauque et charmante, une voix hystérique et comme enrouée par l'eau-de-vie, la voix de ma chère petite bien-aimée, qui me disait, "Allez-vous bientôt manger votre soupe, s.... b.... de marchand de nuages?" [108]
However artificial these two pieces may be, it is still possible, with some effort, to guess at what the author meant them to express, but some of the pieces are absolutely incomprehensible—at least to me. "Le Galant Tireur" is a piece I was quite unable to understand.
LE GALANT TIREUR
Comme la voiture traversait le bois, il la fit arrêter dans le voisinage d'un tir, disant qu'il lui serait agréable de tirer quelques balles pour tuer le Temps. Tuer ce monstre-là, n'est-ce pas l'occupation la plus ordinaire et la plus légitime de chacun?—Et il offrit galamment la main à sa chère, délicieuse et exécrable femme, à cette mystérieuse femme à laquelle il doit tant de plaisirs, tant de douleurs, et peut-être aussi une grande partie de son génie.
Plusieurs balles frappèrent loin du but proposè, l'une d'elles s'enfonça même dans le plafond; et comme la charmante créature riait follement, se moquant de la maladresse de son époux, celui-ci se tourna brusquement vers elle, et lui dit: "Observez cette poupée, là-bas, à droite, qui porte le nez en l'air et qui a la mine si hautaine. Eh bien! cher ange, je me figure que c'est vous." Et il ferma les yeux et il lâcha la détente. La poupée fut nettement décapitée.
Alors s'inclinant vers sa chère, sa délicieuse, son exécrable femme, son inévitable et impitoyable Muse, et lui baisant respectueusement la main, il ajouta: "Ah! mon cher ange, combien je vous remercie de mon adresse!" [109]
The productions of another celebrity, Verlaine, are not less affected and unintelligible. This, for instance, is the first poem in the section called "Ariettes Oubliés."
"Le vent dans la plaine
Suspend son haleine."—Favart.
C'est l'extase langoureuse,
C'est la fatigue amoureuse,
C'est tous les frissons des bois
Parmi l'étreinte des brises,
C'est, vers les ramures grises,
Le chœur des petites voix.
O le frêle et frais murmure!
Cela gazouille et susurre,
Cela ressemble au cri doux
Que l'herbe agitée expire....
Tu dirais, sous l'eau qui vire,
Le roulis sourd des cailloux.
Cette âme qui se lamente
En cette plainte dormante
C'est la nôtre, n'est-ce pas?
La mienne, dis, et la tienne,
Dont s'exhale l'humble antienne
Par ce tiède soir, tout bas? [110]
What "chœur des petites voix"? and what "cri doux que l'herbe agitée expire"? and what it all means, remains altogether unintelligible to me.
And here is another "Ariette":—
VIII
Dans l'interminable
Ennui de la plaine,
La neige incertaine
Luit comme du sable.
Le ciel est de cuivre,
Sans lueur aucune.
On croirait voir vivre
Et mourir la lune.
Comme des nuées
Flottent gris les chênes
Des forêts prochaines
Parmi les buées.
Le ciel est de cuivre,
Sans lueur aucune.
On croirait voir vivre
Et mourir la lune.
Corneille poussive
Et vous, les loups maigres,
Par ces bises aigres
Quoi donc vous arrive?
Dans l'interminable