Histoire de la magie. Eliphas Levi

Histoire de la magie - Eliphas Levi


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temps plus ou moins long, suivant la sensibilité des sujets, l'extase, la catalepsie, et même l'évanouissement léthargique.

      Pour se procurer des visions, pour arriver aux phénomènes de la seconde vue, il faut se mettre dans un état qui tient du sommeil, de la mort et de la folie. C'est en cela surtout que les Indiens sont habiles, et c'est à leurs secrets peut-être qu'il faut rapporter les facultés étranges de certains médiums américains.

      On pourrait définir la magie noire l'art de se procurer et de procurer aux autres une folie artificielle. C'est aussi par excellence la science des empoisonnements. Mais ce que tout le monde ne sait pas, et ce que M. Dupotet, parmi nous, a le premier découvert, c'est qu'on peut tuer par congestion ou par soustraction subite de lumière astrale, lorsque, par une série d'exercices presque impossibles, semblables à ceux que décrit le sorcier indien, on a fait de son propre appareil nerveux assoupli à toutes les tensions et à toutes les fatigues, une sorte de pile galvanique vivante, capable de condenser et de projeter avec force cette lumière qui enivre et qui foudroie.

      Mais là ne s'arrêtent pas les secrets magiques de l'Oupnek'hat; il en est un dernier que l'hiérophante ténébreux confie à ses initiés, comme le grand et suprême arcane, et c'est, en effet, l'ombre et l'inverse de ce grand secret de la haute magie.

      Le grand arcane des vrais mages c'est l'absolu en morale, et par conséquent eu direction des oeuvres et en liberté.

      Le grand arcane de l'Oupnek'hat c'est l'absolu en immoralité, en fatalité et en quiétisme mortel.

      Voici comment s'exprime l'auteur du livre indien:

      «Il est permis de mentir pour faciliter les mariages et pour exalter les vertus d'un bramine ou les qualités d'une vache.

      »Dieu s'appelle vérité, et en lui l'ombre et la lumière ne font qu'un. Celui qui sait cela ne ment jamais, car s'il veut mentir il fait de son mensonge une vérité.

      »Quelque péché qu'il commette, quelque mauvaise oeuvre qu'il fasse, il n'est jamais coupable. Quand même il serait deux fois parricide, quand même il tuerait un brahme initié aux mystères des Védas, quelque chose qu'il commette enfin, sa lumière n'en sera pas diminuée, car, dit Dieu, je suis l'âme universelle, en moi sont le bien et le mal qui se corrigent l'un par l'autre. Celui qui sait cela n'est jamais pécheur; il est universel comme moi.» (Oupnek'hat, instruction 108, pages 35 et 92 du tome Ier de la traduction d'Anquetil.)

      De pareilles doctrines sont loin d'être civilisatrices, et d'ailleurs l'Inde, en immobilisant sa hiérarchie sociale, parquait l'anarchie dans les castes; la société ne vit que d'échanges. Or l'échange est impossible quand tout appartient aux uns et rien aux autres. A quoi servent les échelons sociaux dans une prétendue civilisation où personne ne peut ni descendre ni monter? Ici se montre enfin le châtiment tardif du fratricide, châtiment qui enveloppe toute sa race et le condamne à mort. Vienne une autre nation orgueilleuse et égoïste, elle sacrifiera l'Inde, comme les légendes orientales racontent que Lamech a tué Caïn. Malheur toutefois au meurtrier même de Caïn! disent les oracles sacrés de la Bible.

      Vingt et unième Clé du Tuol

       Égyptien primitif.

       Table des matières

       Table des matières

      SOMMAIRE.--Le dogme d'Hermès Trismégiste.--La magie hermétique.--L'Égypte et ses merveilles.--Le patriarche Joseph et sa politique.--Le Livre de Thot.--La table magique de Bembo.--La clef des oracles.--L'éducation de Moïse.--Les magiciens de Pharaon.--La pierre philosophale et le grand oeuvre.

      C'est en Égypte que la magie se complète comme science universelle et se formule en dogme parfait. Rien ne surpasse et rien n'égale comme résumé de toutes les doctrines du vieux monde les quelques sentences gravées sur une pierre précieuse par Hermès et connues sous le nom de table d'émeraude; l'unité de l'être et l'unité des harmonies, soit ascendantes, soit descendantes, l'échelle progressive et proportionnelle du Verbe; la loi immuable de l'équilibre et le progrès proportionnel des analogies universelles, le rapport de l'idée au Verbe donnant la mesure du rapport entre le créateur et le créé; les mathématiques nécessaires de l'infini, prouvées par les mesures d'un seul coin du fini; tout cela est exprimé par cette seule proposition du grand hiérophante égyptien:

      «Ce qui est supérieur est comme ce qui est inférieur, et ce qui est en bas est comme ce qui est en haut pour former les merveilles de la chose unique.»

      Puis vient la révélation et la description savante de l'agent créateur, du feu pantomorphe, du grand moyen de la puissance occulte, de la lumière astrale en un mot.

      «Le soleil est son père, la lune est sa mère, le vent l'a porté dans son ventre.»

      Ainsi cette lumière est émanée du soleil, elle reçoit sa forme et son mouvement régulier des influences de la lune, elle a l'atmosphère pour réceptacle et pour prison.

      «La terre est sa nourrice.»

      C'est-à-dire qu'elle est équilibrée et mise en mouvement par la chaleur centrale de la terre.

      «C'est le principe universel, le TELESMA du monde.»

      Hermès enseigne ensuite comment de cette lumière, qui est aussi une force, on peut faire un levier et un dissolvant universel, puis aussi un agent formateur et coagulateur.

      Comment il faut tirer des corps où elle est latente, cette lumière à l'état de feu, de mouvement, de splendeur, de gaz lumineux, d'eau ardente, et enfin de terre ignée, pour imiter, à l'aide de ces diverses substances, toutes les créations de la nature.

      La table d'émeraude, c'est toute la magie en une seule page.

      Les autres ouvrages attribués à Hermès, tels que le Pymandre, l'Asclepius, la Minerve du monde, etc., sont regardés généralement par les critiques comme des productions de l'école d'Alexandrie. Ils n'en contiennent pas moins les traditions hermétiques conservées dans les sanctuaires de la théurgie. Les doctrines d'Hermès ne sauraient être perdues pour qui connaît les clefs du symbolisme. Les ruines de l'Égypte sont comme des pages éparses avec lesquelles on peut encore, en les rassemblant, reconstruire le livre entier, livre prodigieux dont les grandes lettres étaient des temples, dont les phrases étaient des Cités toutes ponctuées d'obélisques et de sphinx!

      La division même de l'Égypte était une synthèse magique; les noms de ses provinces correspondaient aux figures des nombres sacrés: le royaume de Sésostris se divisait en trois parties: la haute Égypte ou la Thébaïde, figure du monde céleste et patrie des extases; la basse Égypte, symbole de la terre; et l'Égypte moyenne ou centrale, pays de la science et des hautes initiations. Chacune de ces trois parties était divisée en dix provinces appelées nomes, et placées sous la protection spéciale d'un dieu. Ces dieux, au nombre de trente, groupés trois par trois, exprimaient symboliquement toutes les conceptions du ternaire dans la décade, c'est-à-dire la triple signification naturelle, philosophique et religieuse des idées absolues attachées primitivement aux nombres. Ainsi, la triple unité ou le ternaire originel, le triple binaire ou le mirage du triangle, qui forme l'étoile de Salomon; le triple ternaire ou l'idée tout entière sous chacun de ses trois termes; le triple quaternaire, c'est-à-dire le nombre cyclique des révolutions astrales, etc. La géographie de l'Égypte, sous Sésostris, est donc un pantacle, c'est-à-dire un résumé symbolique de tout le dogme magique de Zoroastre, retrouvé et formulé d'une manière plus précise par Hermès.

      Ainsi, la


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