Leçons de cosmographie à l'usage des lycées et collèges. A. Guilmin
On peut indiquer sur une figure la disposition apparente de la sphère céleste par rapporta l'horizon d'un lieu, cette figure fera comprendre ce qui a été dit relativement au mouvement diurne apparent des astres (fig. 46).
Le cercle PEP'E', vu de face, est le méridien céleste d'un lieu m, dont nous supposerons le zénith à gauche en M. L'horizon de m est le cercle HCH'L perpendiculaire au méridien PEP'E', qui contient la verticale OM. Nous avons figuré quelques parallèles célestes, parmi lesquels l'équateur céleste EC'E'L', tous perpendiculaires au méridien PEP'E' qui contient l'axe du monde PP'.
On voit tout de suite, sur cette figure, que la sphère céleste se partage en trois zones: 1º la zone HPF' au-dessus du parallèle HF', dite de perpétuelle apparition, parce que toutes les étoiles de cette zone sont toujours visibles pour le lieu m; 2º la zone intermédiaire HFH'F', où sont les étoiles qui ont un lever L et un coucher C. On peut se figurer l'une de ces étoiles circulant sur cette zone dans le sens LD'CD, se levant sous nos yeux en L, parcourant l'arc LD'C au-dessus de l'horizon, se couchant en C ; puis, invisible pour nous, parcourant l'arc CDL au-dessous de l'horizon; 3º enfin on remarque la zone FP'H' où se trouvent les étoiles constamment invisibles pour le lieu m, parce qu'elles décrivent leurs cercles diurnes tout entiers au-dessous de l'horizon H'H de ce lieu m.
La même figure montre que le méridien divise par moitié, en D', l'arc que décrit une étoile au-dessus de l'horizon; que ce milieu D' est le point de l'arc visible LD'C le plus élevé au-dessus de l'horizon HCH'L.
Enfin, il est facile de voir que le pôle P est le milieu de l'arc I'PI de méridien qui sépare le passage supérieur, I', et le passage inférieur, I, d'une étoile circompolaire quelconque.
MOUVEMENT DE ROTATION DE LA TERRE.
26. Les étoiles ne tournent pas réellement autour de la terre, avons-nous dit précédemment, leur mouvement diurne n'est qu'une apparence produite par le mouvement de rotation de la terre. C'est ce que nous allons essayer d'expliquer.
Nous dirons d'abord comment on est conduit à mettre en doute la réalité du mouvement diurne des étoiles, puis les raisons qui nous portent à croire au mouvement de la terre. Enfin nous montrerons que toutes les apparences du mouvement diurne s'expliquent parfaitement dans l'hypothèse que voici:
La terre tourne sur elle-même autour d'un axe central; elle effectue, d'un mouvement uniforme, une révolution entière en 24 heures sidérales.
1º Le mouvement diurne des étoiles est invraisemblable.
En effet, le nombre des étoiles, que nous voyons, ou que les télescopes nous laissent apercevoir, est incalculable; les distances qui nous en séparent sont d'une grandeur incommensurable. Eu égard à ces distances, il faut attribuer à la sphère céleste un rayon immense; il en résulte que les cercles que les étoiles nous paraissent décrire ont des étendues excessivement diverses; petits relativement, aux environs des pôles, leurs périmètres deviennent, pour ainsi dire, infinis quand on arrive à l'équateur céleste. Pour que ces périmètres si différents soient parcourus dans le même temps, dans un jour sidéral, il faut que les vitesses réelles des étoiles, modérées relativement aux. environs des pôles, aillent en augmentant jusqu'à devenir d'une grandeur excessive sur l'équateur céleste. Néanmoins ces mouvements, si divers dans leurs rapidité, doivent être tellement réglés, tellement mesurés, que ces corps répandus en nombre infini dans l'espace, immensément éloignés les uns des autres, ne paraissant liés par aucune dépendance mutuelle, conservent invariablement leurs positions relatives, puisque la sphère céleste, gardant toujours le même aspect, semble se mouvoir tout d'une pièce. Quelle force, quelle influence produirait un pareil mouvement général? Cette influence devrait être en grande partie attribuée à la terre, puisque ce mouvement aurait lieu autour d'un axe dont la position paraît dépendre uniquement de celle de la terre. Mais comment concevoir qu'une pareille influence puisse être exercée par notre globe, dont la petitesse est inappréciable relativement aux espaces célestes à travers lesquels il lui faudrait agir sur des corps qui, à en juger par les dimensions connues de quelques-uns, sont beaucoup plus considérables que lui. Toutes ces considérations rendent aussi incompréhensible qu'invraisemblable le mouvement diurne des étoiles 10.
2º Au contraire, bien des analogies et des faits observés nous portent à croire au mouvement de rotation de la terre.
Il y a d'abord des analogies frappantes. Tous les corps célestes qui sont assez près de nous pour que nous puissions distinguer quelque chose de leur aspect extérieur, par exemple, le soleil, la lune, les planètes, tournent tous sans exception sur eux-mêmes autour d'un axe central. Il est naturel de penser que la terre, qui nous paraît dans les mêmes conditions que les planètes, tourne de. la même manière. Ce mouvement d'un corps solide, isolé de toutes parts 11, est plus simple et plus naturel que celui qu'il nous faudrait attribuer à une multitude de corps isolés, indépendants les uns des autres comme les étoiles.
Note 10: (retour) Les mêmes objections peuvent être exposées avec plus de précision comme il suit:
1º L'observation nous montre les étoiles répandues par millions dans l'espace, isolées, indépendantes et immensément éloignées les unes des autres; il est peu vraisemblable que cette multitude innombrable de corps isolés, indépendants, tournent autour de la même droite avec autant d'ensemble, autant d'accord que s'ils étaient liés invariablement les uns aux autres.
2º Eu égard à l'indépendance des étoiles, on ne pourrait expliquer le mouvement circulaire de chacun de ces astres que par l'action d'un corps placé au centre de son cercle diurne. Il devrait donc y avoir sur l'axe du monde autant de corps capables d'exercer une pareille influence qu'il y a d'étoiles; or, l'observation ne nous en montre aucun; nous n'y voyons que la terre.
L'observation nous apprend aussi que les distances qui séparent les étoiles de la terre sont immenses, tellement grandes qu'on ne peut les évaluer. La plus petite de ces distances surpasse 8 trillions de lieues; c'est donc là le plus petit rayon que nous puissions attribuer à la sphère céleste. Les étoiles qui nous paraissent décrire l'équateur céleste parcourraient donc en 24 heures une circonférence de plus de 50 trillions de lieues de longueur; plus de 500000 lieues par seconde. Comment la terre, dont la petitesse est inappréciable par rapport à ces espaces célestes, pourrait-elle imprimer à plus de 8 millions de millions de lieues de distance un pareil mouvement à des corps plus considérables qu'elle-même?
Note 11: (retour) V. le commencement du chapitre II.
Comme faits observés, nous citerons la diminution de la pesanteur à la surface de la terre quand on descend du pôle vers l'équateur, qui ne peut être, attribuée qu'à l'augmentation de la force centrifuge due à la rotation de la terre; nous citerons encore la belle expérience de M. Foucault sur le mouvement du pendule, la forme même de la terre renflée à l'équateur, aplatie vers les pôles, puis les vents alisés, etc.
3º Toutes les apparences du mouvement diurne des corps célestes s'expliquent parfaitement dans l'hypothèse que la terre, animée d'un mouvement uniforme de rotation autour d'un axe central, effectuerait une révolution entière en 24 heures sidérales 12.
Note 12: (retour) Les étoiles nous paraissent s'élever au-dessus de l'horizon; elles nous semblent décrire des cercles autour d'un axe dont la direction nous est connue. Ça apparences peuvent fort bien se produire sans que ce mouvement soit réel? Est-ce que les arbres d'une route ne paraissent pas fuir, et se mouvoir tous ensemble