Une Cour de Voleurs . Морган Райс

Une Cour de Voleurs  - Морган Райс


Скачать книгу
Sophia lui tenait fermement la main. On entendit encore du fracas mais elle ne se retourna pas. Elle se contenta d'avancer, de suivre les couloirs, ne s'arrêtant que pour se cacher alors que passaient des silhouettes mystérieuses. Elles coururent jusqu'à trouver une porte-fenêtre ouverte, sortirent de la maison, dans l'obscurité …

      Kate cligna des yeux et revint à elle-même. Au-dessus d'elle, la lumière matinale avait l'air trop brillante, son éclat éblouissant. Quand elle se réveilla, elle essaya de retenir son rêve, essaya de voir ce qui s'était passé ensuite, mais le rêve fuyait déjà trop vite pour qu'elle puisse le retenir. Kate poussa un grognement de contrariété parce qu'elle savait que la dernière partie n'avait pas été un rêve mais un souvenir que Kate voulait retrouver plus que tous les autres.

      Toutefois, à présent, elle avait le visage de ses parents en tête. Elle les garda dans son esprit en se forçant à ne pas les oublier. Elle se redressa lentement. Après tout ce qu'elle venait de voir, elle avait la tête qui tournait.

      “Tu devrais y aller lentement”, dit Siobhan. “Les eaux de la fontaine peuvent avoir des effets secondaires.”

      Elle était assise sur le rebord de la fontaine, qui avait à nouveau l'air en ruine, maintenant, alors qu'elle avait eu l'air flambant neuve quand Siobhan y avait puisé de l'eau pour que Kate la boive. Siobhan avait exactement la même apparence que la dernière fois, c'est-à-dire probablement une nuit avant. Même les fleurs qu'elle avait emmêlées dans ses cheveux avaient l'air intactes, comme si elle n'avait pas bougé pendant tout ce temps-là. Elle regardait Kate avec une expression qui ne révélait rien de ce qu'elle pensait et, avec les murs dont elle entourait son esprit, elle restait impénétrable, même face aux pouvoirs de Kate.

      Kate essaya de se lever simplement parce qu'elle refusait que cette femme l'en empêche. Quand elle le fit, la forêt qui l'entourait lui sembla flotter et Kate vit une brume multicolore autour des bordures des arbres, des pierres et des branches. Elle trébucha et dut poser une main contre une colonne brisée pour ne pas tomber.

      “Il va falloir que tu apprennes à m'écouter si tu veux devenir mon apprentie”, dit Siobhan. “Ne t'imagine pas que tu vas pouvoir te relever aussi simplement après tous les changements que ton corps a subis.”

      Kate serra les dents et attendit que la sensation de vertige passe. Cela ne prit pas longtemps. A en juger par son expression, même Siobhan fut étonnée quand Kate s'éloigna de la colonne.

      “Pas mal”, dit-elle. “Tu t’habitues plus vite que j'aurais cru. Comment te sens-tu ?”

      Kate secoua la tête. “Je ne sais pas.”

      “Dans ce cas, prends le temps de réfléchir”, lui répondit sèchement Siobhan avec un soupçon d'agacement. “Je veux une étudiante qui réfléchisse sur le monde au lieu de se contenter d'y réagir. Je pense que c'est toi. Veux-tu me donner tort ?”

      Kate secoua encore la tête. “Je … le monde a l'air différent quand je le regarde.”

      “Tu commences à le voir comme il est, avec les courants de vie”, dit Siobhan. “Tu t'y habitueras. Essaie de bouger.”

      Kate fit un pas hésitant, puis un autre.

      “Tu peux faire mieux que ça”, dit Siobhan. “Cours !”

      C'était une activité qui se rapprochait un peu trop de ses rêves pour que Kate en ait envie et elle se mit à se demander si Siobhan avait tout vu. Elle avait dit qu'elle était différente de Kate mais, si elles étaient assez proches pour que l'autre femme veuille lui donner des leçons, alors, elles étaient peut-être assez proches pour que Siobhan puisse voir ses rêves.

      Cela dit, Kate n'avait pas le temps d'y réfléchir parce qu'elle était trop occupée à courir. Elle fonçait dans les bois, frôlant de ses pieds la mousse et la boue, les feuilles mortes et les branches cassées. Ce ne fut que quand elle vit les arbres défiler à grande vitesse qu'elle se rendit compte qu'elle courait très vite.

      Kate bondit et, soudain, elle se retrouva dans les branches inférieures d'un des arbres qui l'entouraient, aussi facilement que si elle avait quitté un bateau pour monter sur le quai. Kate se posta sur la branche, semblant sentir chaque souffle de vent avant qu'il ne puisse la faire tomber. Elle bondit, se retrouva sur le sol et, impulsivement, elle se déplaça vers une lourde branche brisée qu'elle n'aurait jamais pu espérer soulever auparavant. Quand elle saisit la branche, Kate sentit la rugosité de l'écorce contre ses mains et elle la souleva sans difficulté et la hissa au-dessus de sa tête comme un des colosses qui venaient à la fête foraine d'Ashton de temps à autre. Elle jeta la branche et la regarda disparaître entre les arbres, où elle atterrit avec fracas.

      Kate l'entendit et, pendant un moment, elle entendit tous les autres sons qui l'entouraient dans la forêt. Elle entendit le bruissement des feuilles alors que de petits insectes bougeaient sous elles, le gazouillis des oiseaux là-haut dans les branches. Elle entendit le son sourd produit par des pieds minuscules qui frappaient le sol et sut à quel endroit un lièvre allait apparaître avant qu'il ne devienne effectivement visible. Au premier abord, elle trouva que cette abondance de sons la désorientait. Kate fut forcée de se mettre les mains sur les oreilles pour arrêter d'entendre l'eau qui gouttait des feuilles et le mouvement des insectes sur l'écorce. Elle y mit un frein comme elle avait appris à le faire avec son talent d'écoute des pensées.

      Kate retourna à l'endroit où se dressait la fontaine en ruines. Siobhan y était et souriait avec ce qui semblait être un soupçon de fierté.

      “Que m'arrive-t-il ?” demanda Kate.

      “Seulement ce que tu as demandé”, dit Siobhan. “Tu voulais avoir la force de vaincre tes ennemis.”

      “Mais tout ça …”, commença Kate. En vérité, elle n'avait jamais cru qu'il pourrait lui arriver tant de choses.

      “La magie peut prendre beaucoup de formes”, dit Siobhan. “Tu ne maudiras pas tes ennemis. Tu ne les espionneras pas de loin. Tu ne feras pas tomber la foudre, tu n'invoqueras pas les esprits des morts en souffrance. Ces moyens-là sont pour d'autres que toi.”

      Kate leva un sourcil. “Tout cela est-il même possible ?”

      Elle vit Siobhan hausser les épaules. “Peu importe. Maintenant, la force de la fontaine coule en toi. Tu seras plus rapide et plus forte. Tes sens seront plus fins. Tu verras des choses que la plupart des gens ne peuvent pas voir. Ajoute cela à tes propres talents et tu seras redoutable. Je t'apprendrai à frapper tes ennemis au combat ou par la ruse. Je ferai de toi une tueuse.”

      Kate avait toujours voulu être forte mais, malgré cela, elle se sentait un peu effrayée par tout cela. Siobhan lui avait déjà dit qu'il y aurait un prix à payer pour tout ça et, plus ce que Kate obtenait comme pouvoirs était impressionnant, plus elle soupçonnait que le prix serait élevé. Elle repensa à ce qu'elle avait rêvé et espéra que ce n'était pas un avertissement.

      “J'ai vu quelque chose”, dit Kate. “Je l'ai rêvé mais ça n'avait pas l'air d'être un rêve.”

      “Quelle impression cela te donnait-il ?” demanda Siobhan.

      Kate allait dire qu'elle ne savait pas mais elle aperçut l'expression de Siobhan et changea d'avis. “On aurait dit que c'était la vérité. Cela dit, j’espère que ça ne l'était pas. Dans mon rêve, Ashton était en train de se faire détruire. La ville était en feu et les gens se faisaient massacrer.”

      Elle s'attendait à moitié à ce que Siobhan se moque d'elle pour avoir osé mentionner cette broutille ou elle l'espérait peut-être. En fait, Siobhan hocha la tête d'un air pensif.

      “J'aurais dû m'y attendre”, dit la femme. “Les choses évoluent plus vite que je ne l'avais prévu mais, même moi, je ne peux rien contre le temps, ou, du moins, pas de façon permanente.”

      “Vous savez ce qui se passe ?” demanda Kate.

      En entendant la question de Kate,


Скачать книгу