L'art de faire le vin avec les raisins secs. Audibert Joseph-François

L'art de faire le vin avec les raisins secs - Audibert Joseph-François


Скачать книгу
des vins de raisins frais.

      CHAPITRE VI

      Du Foulage

      On comprend sans peine la nécessité d’écraser les raisins afin d’obtenir le moût et de le préparer à la fermentation. Cette opération, dont tous les viticulteurs ont toujours reconnu l’efficacité, s’imposait donc naturellement à notre fabrication. Cependant, on s’étonne de voir avec quelle persistance la critique l’a toujours poursuivie. Il est assurément peu de pays au monde où le foulage soit fait autrement que par des hommes nus, foulant les raisins avec leurs pieds.

      Certainement, les hommes accomplissant cette fonction y apportent certains avantages, tels qu’un foulage intelligent, la rupture des grains sans écrasement des pépins, que la peau des pieds laisse intacts.

      Mais, que des pays aussi où l’on refuse aveuglément le concours d’instruments animés pour le foulage des raisins, sous prétexte de l’écrasement des pépins et d’un foulage irrégulier, où les hommes écrasent les raisins et les pépins avec des souliers et des sabots!

      Dans mes voyages dans les départements de l’Hérault, de l’Aude, des Pyrénées-Orientales, je remarquai presque partout le foulage ainsi pratiqué.

      Cependant les machines en général, rendent de 4 à 5 0/0 de vin de plus que par le foulage avec les pieds. Ce n’est peut-être pas toujours un avantage réel, mais ce qu’on est sûr de gagner, c’est énormément de temps est beaucoup de propreté.

      On comprend facilement l’importance d’un bon foulage. Il est essentiel que cette opération soit faite entièrement, car si on laisse dans la cuve en fermentation, des grains entiers, le jus qu’ils contiennent ne fermente pas, et c’est ce qui bien souvent, surtout dans la fabrication des vins de raisins secs, occasionne, après le soutirage et le pressage, des fermentations secondaires et parfois presque tumultueuses.

      Aussi, j’appelle toute l’attention du fabricant sur cette opération, dont on n’apprécie généralement pas assez l’importance. Loin d’être une opération purement mécanique, comme on le croit vulgairement, c’est une véritable opération chimique.

      Le but est de réunir et de mettre en contact toutes les parties séparées du raisin, de l’aérer et de lui fournir tout l’oxygène dont le moût a si grand besoin de s’imprégner pour commencer la fermentation.

      Il ne faut pas craindre de remuer et d’agiter les raisins, soit en les foulant avec des hommes et en les jetant par pelletées dans la machine12. On doit aussi faire couler le moût d’un peu haut, en divisant, le plus possible, le liquide dans la cuve à fermenter.

      L’air, loin de produire l’effet désastreux que l’on constate dans les vins faits, est l’agent le plus actif de la fermentation; aussi s’établit-elle promptement et activement quand on a pris les mesures nécessaires et donné les soins que je viens d’énoncer.

      Il est convenable que l’appartement dans lequel est la cuve à tremper, soit plutôt humide et chaud que sec et froid.

      Comme je l’ai dit, une seule qualité de raisins secs fait exception à la règle générale; ce sont les Corinthe. Leurs grains très petits et surtout leur fine pellicule évitent aux fabricants cette opération13. Dès leur contact avec l’eau, les Corinthe se gonflent et commencent à fermenter, à condition qu’on les brasse bien à mesure qu’ils tombent dans la cuve, et qu’on répète l’opération pendant les deux premiers jours.

      Avec l’appareil pour la fabrication mathématique des vins de raisins secs, on évite le foulage, et chose importante, le pressurage. L’appareil fournit l’eau chaude dont on charge la cuve. Les raisins secs se gonflent immédiatement, et laissent échapper leur sucre, qui se liquéfie. On évite une main d’œuvre considérable en pratiquant ainsi. Nous reviendrons sur ce point en parlant des divers modes de fermentation.

      CHAPITRE VII

      De la Fermentation

      Pour obtenir une fermentation prompte et régulière, il faut, comme je l’ai dit dans le Chapitre III, que la température du cellier au moment de la mise en cuve, ait au moins 20 degrés de chaleur. Dans la fermentation du moût de raisins frais, cette condition est à rechercher, mais elle n’est pas, comme ici, indispensable.

      Cette eau, nouvellement ajoutée au fruit, n’est point encore intimement unie avec lui, et des soins vigilants au début de ces fermentations sont impérieux. Si vous avez plusieurs cuves, évitez qu’elles se trouvent au courant d’air, devant une porte ou une fenêtre; leur place est toute indiquée dans les côtés du cellier.

      Dans le cas où les cuves seraient déjà placées, voici un moyen pratique et bien simple pour conserver leur chaleur et les préserver de l’influence de l’air ambiant. Sitôt qu’elles sont chargées, on essuie parfaitement leur surface, et on les entoure le mieux possible d’un paillasson de 10 à 12 centimètres d’épaisseur dont la paille, de froment, de seigle, etc., doit-être le moins serrée possible. On recouvre ensuite le paillasson d’une grande bâche en toile que l’on attache solidement avec des cordes. Ce moyen très simple et peu coûteux, donne des résultats merveilleux. Il ne laisse plus la chaleur, développée naturellement par le liquide en fermentation, se perdre, et il conserve à cette fermentation son degré de calorique presqu’en entier. Le moût reste ainsi, après un bon début, dans les bonnes conditions de température. Le froid même n’atteint pas sa chaleur qui demeure jusqu’au bout.

      Par ce procédé, une fois la fermentation commencée, on évite bien des ennuis, car il est inutile de chauffer le cellier et de maintenir la température à grand renfort de chauffage, ce qui est très coûteux. Une température de 10 degrés suffit, car la fermentation développe assez de chaleur par elle-même pour se suffire et arriver jusqu’au bout avec de bons résultats.

      Il est, cependant des cas où les fabricants devront employer des moyens énergiques pour faire atteindre au moût les 20 degrés de chaleur, nécessaires pour sa mise en fermentation. Il est certain que, durant l’hiver de 1879, où le thermomètre dans presque toutes les parties de la France a accusé de 5 à 25 degrés au-dessous de zéro, le chauffage des celliers ont été trop dispendieux et pour quelques-uns impossible. On emploie alors la méthode qui consiste à réchauffer le moût.

      Cette idée très ancienne nous vient des Grecs, qui avaient compris tout l’avantage qu’on peut tirer de cette méthode qui se trouve consignée dans le recueil des Géoponiques, livre VII chap. IV.

      Cette opération au premier abord frappe par sa simplicité: «Verser dans la cuve à fermenter, une partie du moût à la température de 60 à 80 degrés environ, afin de mettre la masse en fermentation au degré nécessaire, soit 15 à 20 degrés»14. L’idée est ingénieuse et assez pratique. Cependant je ne saurais trop appeler l’attention sur les altérations que cette application peut amener dans le vin.

      Je signalerai, à ceux qui l’emploient ou qui désirent l’employer, ces deux grands inconvénients: 1º Par le chauffage du moût dans un vase en métal, on ne peut éviter la dissolution d’une partie bien faible, je le reconnais, de ce métal. Or, cette partie, si faible qu’elle soit, n’en constitue pas moins dans le vin un principe non seulement défavorable à la fermentation, mais encore quelquefois un véritable danger pour les consommateurs.

      Le deuxième inconvénient résulte du goût de cuit, de brûlé, que le moût réchauffé donne au vin. Il est impossible d’empêcher l’altération du sucre, du tartre, de l’acide tartrique, etc., de se produire au contact du feu, malgré toutes les précautions qu’on a pu prendre.

      On voit donc, d’après ce qui précède, que le chauffage du moût, dans ces conditions, est mauvais.

      Maumené15 conseille de se servir d’un vase de grès et de chauffer au bain-marie.

      On peut calculer, aisément, la quantité


Скачать книгу

<p>12</p>

Voir la note page 35.

<p>13</p>

Pourtant je le répète, la division des grains, passant dans le fouloir, est un excellent moyen de procéder, quand on le peut.

<p>14</p>

Un petit excès de chaleur ne peut jamais nuire au début de la fermentation.

<p>15</p>

Maumené, paragr. 364, page 271.