Introduction à la vie dévote. Saint de Sales Francis

Introduction à la vie dévote - Saint de Sales Francis


Скачать книгу
Oh! que cette compagnie est heureuse! Le moindre de tous est mille fois plus beau que le monde entier: que sera-ce donc de les voir tous? Mais, mon Dieu, qu'ils sont heureux! toujours ils chantent le doux cantique de l'amour éternel: toujours ils jouissent d'une parfaite allégresse: toujours ils se communiquent les uns aux autres d'ineffables contentemens, et vivent sans nuages dans les liens d'une heureuse et indissoluble amitié.

      3. Considérez enfin quel bien ils ont tous de jouir de Dieu, qui les honore incessamment de son regard, et répand ainsi dans leurs cœurs des torrens de délices. Quel bien d'être à jamais uni à son principe! C'est là qu'environnés et pénétrés de Dieu, comme les oiseaux le sont de l'air, ils sont inondés de toutes parts de consolations incroyables; là, chacun à qui mieux mieux chante les louanges du Créateur: soyez à jamais béni, s'écrient-ils, ô vous qui êtes notre Créateur et notre Sauveur, vous qui nous êtes si bon, et qui nous communiquez si libéralement votre gloire. Et pareillement Dieu bénit tous ses saints d'une bénédiction perpétuelle: soyez à jamais bénies, dit-il, mes chères créatures, vous qui m'avez si bien servi, et qui me louerez éternellement avec un si grand zèle et un amour si parfait.

Affections et résolutions

      1. Admirez et louez cette patrie céleste. Oh! que vous êtes belle, ma chère Jérusalem, et que bienheureux sont vos habitans!

      2. Reprochez à votre cœur la lâcheté qui l'a jusqu'à présent détourné du chemin de cette glorieuse demeure. Pourquoi me suis-je tant éloigné de mon souverain bien? Ah! misérable que je suis! pour quelques méchans plaisirs d'un instant, j'ai mille et mille fois quitté ces éternelles et infinies délices! où donc avois-je l'esprit de mépriser des biens si désirables, et de désirer des choses si méprisables?

      3. Aspirez maintenant avec ardeur après ce séjour si délicieux. Oh! puisqu'il vous a plu, mon bon et souverain Seigneur, de me faire entrer dans vos voies, non, jamais plus je ne retournerai en arrière. Allons, ma chère ame, allons en ce repos infini: cheminons vers cette terre bénie qui nous est promise: que faisons-nous dans cette Egypte?

      Je me priverai donc de telles et telles choses qui me détournent ou me retardent en chemin.

      Je ferai donc telles et telles choses qui peuvent me conduire à mon but.

      Remerciez, offrez, priez.

      CHAPITRE XVII.

      Neuvième méditation. – Sur le choix du paradis

PRÉPARATION

      1. Mettez-vous en la présence de Dieu.

      2. Humiliez-vous devant lui, en le priant qu'il vous inspire.

CONSIDÉRATIONS

      1. Imaginez-vous que vous êtes en rase campagne, toute seule avec votre bon ange, comme étoit le jeune Tobie en allant à Ragès. Là, votre conducteur vous fait voir en haut le paradis ouvert, avec toutes les joies et toutes les délices qui ont fait le sujet de votre méditation précédente. Puis il vous montre à vos pieds l'enfer ouvert avec tous les tourmens sur lesquels vous avez médité.

      Vous pénétrant bien l'esprit de cette imagination, et vous mettant à genoux par la pensée devant votre bon ange.

      1. Considérez qu'il est très-vrai que vous êtes placée entre le paradis et l'enfer, et que l'un et l'autre sont ouverts pour vous recevoir, selon le choix que vous en ferez.

      2. Considérez que le choix que l'on fait de l'un ou de l'autre dans ce monde durera éternellement dans l'autre.

      3. Considérez que, bien que l'un et l'autre vous soit ouvert selon que vous le choisirez, Dieu, qui est prêt à vous donner, ou l'un, par sa justice, ou l'autre, par sa miséricorde, désire cependant d'un désir sans égal que vous donniez la préférence au paradis; et votre bon ange est là qui vous en presse de tout son pouvoir, vous offrant de la part de Dieu mille grâces et mille secours pour vous aider à la montée.

      4. Considérez aussi Jésus-Christ au haut du Ciel, vous regardant avec bonté, et vous invitant par ces douces paroles: Viens, ô ma chère ame! viens au repos éternel: viens entre les bras de ton père qui t'a préparé d'immortelles délices dans l'abondance de son amour. Voyez de vos yeux intérieur la sainte Vierge qui vous convie tout maternellement: Courage! vous dit-elle; garde-toi, ô ma fille! de mépriser les désirs de mon Fils, non plus que les soupirs de sa Mère, qui respire avec lui ton salut éternel. Voyez les saints qui vous appellent, et un million de saintes ames qui vous conjurent de venir les rejoindre, afin de n'avoir avec elles qu'une seule voix pour louer Dieu et qu'un seul cœur pour l'aimer à jamais: Venez, vous disent-elles, ô notre sœur et notre amie! prenez courage: le chemin du Ciel n'est pas si difficile que le monde le fait. Entrez-y seulement, et vous verrez que la dévotion qui nous a menées aux délices éternelles, a elle-même des délices incomparablement plus grande que toutes les joies du monde.

ÉLECTION

      1. O enfer! je te déteste maintenant et à toujours. Je déteste tes tourmens et tes peines: je déteste ta malheureuse éternité, et surtout ces éternels blasphèmes et ces malédictions sans fin que tu vomis perpétuellement contre mon Dieu. Mais, au contraire, gloire et félicité éternelle à toi, beau paradis, vers lequel s'élancent mon cœur et mon ame! oui, je choisis à jamais mon séjour dans tes sacrés palais, et dans tes aimables tabernacles. Je bénis, ô mon Dieu! votre miséricorde, j'accepte l'offre qu'il vous plaît de m'en faire. O Jésus! mon Sauveur, j'accepte votre amour éternel. Je reconnois et je confirme l'acquisition que vous avez faite pour moi d'une place et d'une retraite dans cette bienheureuse Jérusalem, où je ne veux faire autre chose que vous aimer et vous bénir à jamais.

      2. Acceptez les faveurs que la sainte Vierge et les saints vous présentent; promettez-leur que vous en profiterez pour aller les rejoindre; tendez la main à votre bon ange, afin qu'il vous conduise, et encouragez votre ame à bien persévérer dans ce choix.

      CHAPITRE XVIII.

      Dixième méditation. – Sur le choix de la vie dévote

PRÉPARATION

      1. Mettez-vous en la présence de Dieu.

      2. Abaissez-vous devant sa face, et implorez son secours.

CONSIDÉRATIONS

      1. Imaginez-vous encore une fois que vous êtes avec votre bon ange au milieu d'une vaste campagne. A votre gauche, vous voyez le démon assis sur un trône élevé, ayant à ses côtés plusieurs esprits infernaux, et tout autour de lui une grande troupe de mondains, qui tous, la tête nue, le saluent et lui font hommage, les uns par un péché, les autres par un autre. Voyez la contenance de tous les infortunés courtisans de ce misérable: voyez les uns furieux de haine, d'envie et de colère; les autres qui s'entretuent; les autres hâves, pensifs et empressés à amasser des richesses; les autres livrés à la vanité et ne recherchant que des plaisirs frivoles; les autres perdus et abrutis par leurs indignes passions. Voyez comme ils sont tous sans repos et sans ordre, voyez comme ils se méprisent les uns les autres, et comme ils se haïssent, en faisant semblant de s'aimer. Voilà donc cette malheureuse république du monde, telle qu'elle est tyrannisée par son roi maudit. Oh! qu'elle vous fera compassion.

      2. Voyez maintenant à votre droite Jésus-Christ crucifié, qui avec un amour sans égal, prie pour ces pauvres esclaves, afin qu'ils brisent leurs chaînes, et qui les conjure de venir à lui. Voyez une multitude de dévots qui l'environnent de tous côtés, chacun avec son ange. Contemplez la beauté de ce royaume de dévotion. Qu'il fait beau voir cette troupe de vierges, toutes plus blanches que le lis! cette assemblée de veuves pleines de mortifications et d'humilité: ces époux et ces épouses, vivant doucement ensemble avec un grand respect et une mutuelle charité. Voyez comme ces dévotes ames accordent bien ensemble le soin de la maison extérieure avec le soin de l'intérieure, l'amour du mari avec l'amour de l'époux céleste. Regardez partout où vous voudrez, vous les verrez tous dans une contenance sainte, douce, aimable, écoutant Notre-Seigneur, et aspirant à le planter dans leur cœur. Ils se réjouissent, mais d'une joie gracieuse, charitable et bien réglée: ils s'entr'aiment, mais d'un amour pur et saint. Ceux mêmes qui sont affligés parmi eux ne se tourmentent pas beaucoup, et ne perdent rien de la paix intérieure. En un mot, voyez les yeux du Sauveur


Скачать книгу