Essais d'un dictionnaire universel. Fournier Edouard

Essais d'un dictionnaire universel - Fournier Edouard


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Les Latins l'appellent stibium, & les Grecs stimmi.

      L'Antimoine crud est celui qu'on broye sur le porphyre, tel qu'il vient de la mine.

      L'Antimoine préparé est celui qui a passé par les mains des Artistes, pour le purger de ses mauvaises qualitez, & faire diverses operations.

      Le Verre d'Antimoine est de l'antimoine broyé, cuit & calciné par un feu violent dans un pot de terre, jusqu'à ce qu'il ne jette plus de fumée: ce qui est une marque que tout son soulfre est évaporé. On le réduit en verre dans le fourneau à vent, & alors il est fort diaphane, rouge & brillant & de couleur d'hyacinthe.

      Le Regule d'Antimoine est le culot, ou ce qu'on trouve au fond & au dessous dans le creuset, où il y a de l'Antimoine, aprés qu'il a été fondu avec des matiéres capables de séparer ses parties pures d'avec les impures. On en fait des balles purgatives qui servent toûjours, & des gobelets, ou laissant reposer quelque temps des liqueurs, elles deviennent aussi purgatives.

      Les Fleurs d'Antimoine sont de l'Antimoine en poudre sublimé dans un aludel, dont les parties volatiles s'attachent à ses pots, en projettant peu à peu la poudre.

      Le Beurre d'Antimoine est une liqueur blanche & gommeuse, qu'on nomme autrement Liqueur glaciale d'Antimoine, qui se fait avec du Regule d'Antimoine & du sublimé corrosif. Cette liqueur se coagule en forme de glace dans le récipient, & est fort caustique, de sorte qu'on ne l'employe qu'à l'exterieur, pour arrêter la cangrene, guérir la carie des os, des cancers, des fistules, &c.

      Le Safran d'Antimoine se fait d'Antimoine & de nitre mis en poudre & au feu, lequel aprés la détonation & la fusion, fait descendre au fond du vaisseau les parties les plus pures de l'Antimoine. Elles ont la figure d'un foye, qui font qu'on lui donne aussi le nom de Foye d'Antimoine, ou de Safran des métaux. On le nomme aussi Magnesie Opaline, à cause qu'il a la figure de Marchasite, & la couleur de l'Opale: on en fait les poudres & le vin Emetiques.

      L'Antimoine Diaphoretique est celui qui est mêlé & préparé avec du nitre, qui change ses qualitez vomitives & purgatives en diaphoretiques.

      L'Huile d'Antimoine est de l'Antimoine pilé & mêlé, mis en digestion dans un vase plein de fort vinaigre sous du fumier pendant plusieurs jours, & aprés cette operation plusieurs fois réïterée, le vinaigre qu'on distile, donne une liqueur sanguine, qu'on appelle Huile d'Antimoine, & qui colore l'argent en or.

      La Chaux d'Antimoine s'appelle quelquefois Ceruse à cause de son extrême blancheur.

      La fortune de l'Antimoine a souvent changé dans l'Ecole de Medecine. Elle fit donner un Arrest du Parlement en l'année 1566. qui fit défenses d'employer l'Antimoine en médicamens, parce qu'elle prétendit qu'il avoit une qualité veneneuse, qui ne se peut corriger par quelque préparation que ce soit. Mais depuis, la même Faculté le fit mettre au rang des médicamens purgatifs dans l'Antidotaire, qui fut imprimé par son ordre en 1637. Et enfin elle a fait donner un Arrest du 29. Mars 1668. qui a donné permission aux Docteurs de Medecine de s'en servir, avec défenses aux autres personnes de l'employer que par leur avis.

      Ce mot d'Antimoine vient selon quelques-uns de ce qu'un Moine Allemand qui cherchoit la Pierre Philosophale, ayant jetté aux pourceaux de l'Antimoine, dont il se servoit pour avancer la fonte des métaux, reconnut que les pourceaux qui en avoient mangé, aprés avoir été purgez trés-violemment, en étoient devenus bien plus gras: ce qui lui fit penser qu'en purgeant de la même sorte ses confreres, ils s'en porteroient beaucoup mieux. Mais cet essai lui réüssit si mal, qu'ils en moururent tous: ce qui fut cause qu'on appella ce mineral Antimoine, comme qui diroit contraire aux Moines. Cette étymologie vient d'un vieux manuscrit d'Allemagne, qui est dans la Bibliotheque de M. Moreau Medecin du Roi, cité par M. Perrault dans son livre du Rabat-joye de l'Antimoine.

      B

      BAN. s. m. publication à haute voix au son du tambour, ou de la trompette, ou des tymbales, de l'ordre d'un Superieur, ou de la part du Roi & de la Justice: On a fait un ban portant défenses de sortir du camp, d'aller à la petite guerre: On a fait un ban dans les carrefours, qui défend les passements d'or & d'argent. On trouve ces phrases dans les Coûtumes, Crier au ban, Cas de ban, A peine de ban, Proceder à ban, &c. On appelle aussi ban la publication & le cri que fait faire le Seigneur feodal pour se faire rendre les hommages, ou lui payer les redevances, & le venir reconnoître. On dit aussi, ban de vendanges, ouverture de ban, &c. pour dire, la publication de la permission des vendanges. Ménage dérive ce mot de l'Allemand ban, qui signifie proprement publication, & en suite proscription, parce qu'elle se faisoit à son de trompe, d'où sont venus les mots de Bannir, Ban, Bannissement, de Bandi, de Ban & arriére-Ban, Banlieuë, Banniére, Bannal, abandonner, &c. Nicod le dérive d'un autre mot Allemand Ban, qui signifie champ & territoire, dautant que c'est en vertu de ce qu'on tient des fiefs, champs & heritages, qu'on est obligé au ban & arriére-ban, & que le four à ban est le four du territoire de la Seigneurie. Borel le dérive du Grec pan, qui signifie tout, parce que la convocation est generale.

      Ban se dit aussi des publications qui se font aux Prônes des Paroisses, des noms de ceux qui veulent se marier, ou prendre les Ordres. Le Concile de Trente a ordonné la publication de trois Bans, pour empêcher les mariages clandestins. Ces publications ne sont pas de l'essence du mariage, on obtient aisément dispense des Bans, on achete les deux derniers Bans, quand le premier a été publié.

      Ban se dit aussi de la publication qui se fait pour convoquer tous les Nobles d'une Province pour servir le Roi dans ses armées, suivant qu'ils y sont obligez par la Loy des Fiefs. On a publié le Ban & l'Arriere-ban.

      Ban est aussi l'Assemblée de ces Nobles en corps d'armée. Le Ban & l'Arriereban est long-temps à se mettre en campagne.

      Ban se dit aussi des assignations qui se font à cri public aux vassaux pour comparoir devant leur Souverain en certaines occasions, & pour rendre compte de leurs actions. Les Princes d'Allemagne sont souvent assignez, sont mis au Ban de l'Empire, & on confisque leurs Fiefs faute d'y rendre l'hommage, & le service dont ils sont tenus.

      Ban signifie aussi bannissement, & on dit en termes de Palais: Il lui est enjoint de garder son Ban à peine de la hart: Il a obtenu un Rappel de Ban.

      Ban signifie encore un droit & un lieu public qu'ont les Seigneurs des grands Fiefs, pour obliger les Habitans d'une Seigneurie de venir cuire au four du Seigneur, moudre à son moulin, ou d'apporter leur vendange à son pressoir. Ainsi on dit, un four à Ban, un moulin à Ban, un pressoir à Ban; & on appelle sujets banniers & droit de bannée, ceux qui sont obligez à ce droit. En quelques Coûtumes on appelle four bandier, moulin banquier, ce qu'on appelle ailleurs Bannal.

      BANQUE. s. f. Trafic d'argent qu'on fait remettre de place en place, d'une Ville à une autre, par des lettres de change & par correspondance. Il est permis à toutes sortes de personnes de faire la Banque sans être Marchand. Ce Marchand a quitté le négoce, il ne fait plus que la Banque. Ce mot vient de l'Italien banca, qui a été fait de banco. C'étoit un siége où les Banquiers s'asseoient dans les places de commerce, d'où on a fait aussi banqueroute. Ménage.

      Banque se dit aussi du lieu public où s'exerce ce trafic, où les Banquiers s'assemblent, & où ils avoient autrefois un Banc. On l'appelle aussi d'autres noms; à Londres, c'est la Bourse; à Lyon, le Change; à Paris, la place du Change. On met son argent à la Banque, on y prête, & on y fait valoir son argent à gros interest, même en quelques lieux à fonds perdu.

      Banque se dit aussi des Sociétez, Villes ou Communautez qui se chargent de l'argent des Particuliers, pour le leur faire valoir à gros interest: la Banque de Venise, de


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