Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 7 - (P). Eugene-Emmanuel Viollet-le-Duc

Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 7 - (P) - Eugene-Emmanuel Viollet-le-Duc


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où il s'abaissait de 30 à 40 centimètres 48. Du parvis on descendait sur la berge de la rivière, avant la construction du pont, par un degré de treize marches. C'est ce qui a fait supposer que devant la façade de l'église s'étendait un perron de treize marches. Il est à croire que du côté du Marché-Neuf, on descendait également plusieurs marches pour arriver à la voie publique qui passait entre l'Hôtel-Dieu et la chapelle Saint-Christophe; mais ce degré dut être supprimé dès le XIVe siècle, puisque alors les gens à cheval pouvaient arriver sur le sol même du parvis. L'enceinte avait environ 35 mètres de large sur autant de longueur 49.

      Le parvis de la cathédrale de Reims, beaucoup moins étendu que celui de Notre-Dame de Paris, demeura entier jusqu'au sacre de Louis XVI. C'était une charmante clôture dont il reste une amorce le long du contre-fort extérieur à la gauche de la façade. Des dessins et des gravures de cette clôture existent encore, et nous permettent de la restituer. Le plan du parvis de Notre-Dame de Reims ne présentait pas un parallélogramme, mais un trapèze, ainsi que le fait voir le plan, figure 1.

      Il n'était point relevé-au-dessus du sol de la voie publique, comme l'était le parvis de la cathédrale de Paris, et le grand degré montant au portail était posé à l'intérieur de l'enceinte, devant les contre-forts. Le pan coupé A (voy. le plan) avait été ménagé afin de faciliter l'accès vers l'entrée des cloîtres, situés sur le flanc nord de la nef.

      L'enceinte se composait de pilettes portant un appui avec pinacles aux entrées et aux angles, c'est-à-dire en B. Nous donnons en C le détail de cette clôture à l'extérieur, et en D sa coupe. Les deux pinacles B' de chaque côté de l'entrée principale étaient surmontés de supports avec écussons; des fleurons G amortissaient les autres pinacles.

      Le parvis de la cathédrale d'Amiens est relevé; mais sa clôture, si jamais elle a été faite, n'existe plus depuis longtemps 50.

      Les parvis des églises conventuelles dont les façades donnaient sur une place publique, étaient souvent établis en contre-bas du sol extérieur: tel était le parvis de l'église abbatiale de Saint-Denis 51. L'église abbatiale de Sainte-Radegonde, à Poitiers, a conservé encore cette disposition fort ancienne, mais rétablie vers la fin du XVe siècle.

      La figure 2 présente une vue à vol d'oiseau de la moitié de ce parvis, l'axe étant en A. Deux descentes sont ouvertes sur la face. Le terrain s'inclinait vers le portail de l'église; deux autres entrées sont pratiquées latéralement de plain-pied. Des figures d'anges agenouillés, tenant des écussons armoyés, surmontent les bahuts des deux entrées de face vers l'extérieur. Des animaux, chiens et lions, amortissent les angles des entrées latérales et le revers des bahuts des entrées de face. Un ressaut avec écusson se présente dans l'axe.

      Une coupe (fig. 3) faite sur l'un des degrés de face donne le détail de la disposition de cette clôture. Des bancs garnissent tout le bahut du côté intérieur. Le terre-plein du parvis est dallé, les eaux s'écoulant par les issues latérales.

      Il n'est pas besoin de faire ressortir l'effet monumental de ces aires clôturées en avant des églises. Quelquefois, comme devant le portail de l'église abbatiale de Cluny, une croix de pierre était plantée au milieu du parvis; des tombes étaient élevées dans l'enceinte. Ces dispositions, comme la plupart de celles qui tenaient à la dignité des églises cathédrales ou abbatiales, furent bouleversées par les abbés et les chapitres pendant le dernier siècle. Ces emplacements furent livrés, moyennant une redevance, à des marchands, les jours de foire, puis bientôt se couvrirent d'échoppes permanentes. Pour quelques rentes, le clergé des cathédrales et des abbayes aliénait ainsi les dépendances de l'église; le premier il portait le marteau sur tout ce qui devait inspirer le respect pour les monuments sacrés.

       PATIENCE, s. f. (miséricorde). Petit siége en forme de cul-de-lampe, placé sous la tablette mobile des stalles, et servant de point d'appui lorsque celle-ci est relevée (voy. STALLE).

       PAVAGE, s. m. Le pavage des voies publiques, des places, des cours des palais, est un travail que l'on ne voit entreprendre que dans un État civilisé. Les Romains apportaient, comme chacun sait, une grande attention aux pavages des rues des villes, et partout où ils ont séjourné, on retrouve de ces grandes pierres dures, granit, grès, lave, basalte, posées irrégulièrement au moyen d'une sauterelle, et formant, sur une couche de béton, une surface assez unie et d'un aspect monumental. Ces pavages, établis de manière à durer plusieurs siècles, servirent en effet jusque pendant les premiers temps du moyen âge. Peu à peu, n'étant pas renouvelés ni même entretenus, ils se dégradèrent, furent remblayés, afin de boucher les ornières les plus profondes, et disparurent sous une épaisse couche de boue ou de poussière. Les grandes voies des villes gallo-romaines, pendant la période carlovingienne, conservèrent tant bien que malles pavages antiques, mais les égouts s'obstruaient, les pavés s'écrasaient, et ces voies ne formaient plus que des cloaques immondes. Cependant, déjà au XIIe siècle, on pavait certaines places ou des voies fréquentées.

      Nous avons retrouvé parfois des restes de ces pavages, faits habituellement de petits cubes de grès ou de pierre résistante 52 (fig. 1).

      Philippe-Auguste passe pour avoir fait paver les rues de Paris au moyen de grandes pierres de grès 53. Guillaume le Breton prétend que ce pavage était fait de pierres carrées et assez grosses, Il n'existe pas trace de ce pavé. Lorsque, il y a quelques années, on découvrit les fondations du petit Châtelet pour rebâtir le Petit-Pont, on enleva une assez grande quantité de pavés de grès posés à 1 mètre en contre-bas du sol actuel. Ces pavés avaient environ 0m,40 carrés et 0m,20 d'épaisseur. Très-usés sur leur face externe, ils avaient dû servir pendant un assez long temps, et dataient probablement de l'époque de la construction du Châtelet (fin du XIIIe siècle). Pendant les XVe et XVIe siècles on employait fréquemment les cailloux pour paver les voies publiques, les cours et les places. Ces cailloux étaient damés sur un fond de sable, ainsi que cela se pratique encore dans quelques villes du midi de la France, notamment à Toulouse. À Paris, la rue de la Juiverie avait été repavée d'après ce système et comme essai, pendant la Ligue.

      Quand les pentes étaient roides, on pavait les voies au moyen de pierres dures posées de champ. Nous avons découvert des pavés de ce genre en bon état de conservation, aux alentours du château de Pierrefonds.

      Les étages inférieurs des habitations étaient souvent pavés, et l'on voyait encore des maisons du moyen âge, il y a peu d'années, dont le sol à rez-de-chaussée était couvert de petits cubes de pierre de 0m,10 de côté environ, posés pointifs sur une aire de mortier ou de ciment.

       PEINTURE, s. f. Plus on remonte vers les temps antiques, plus on reconnaît qu'il existait une alliance intime entre l'architecture et la peinture. Tous les édifices de l'Inde, ceux de l'Asie Mineure, ceux d'Égypte, ceux de la Grèce, étaient couverts de peintures en dedans et au dehors. L'architecture des Doriens, celles de l'Attique, de la grande Grèce et de l'Étrurie étaient peintes. Les Romains paraissent avoir été les premiers qui aient élevé, sous l'empire, des monuments de marbre blanc ou de pierre sans aucune coloration; quant à leurs enduits de stuc, ils étaient colorés à l'extérieur comme à l'intérieur. Les populations barbares de l'Europe septentrionale et occidentale peignaient leurs maisons et leurs temples de bois, et les Scandinaves prodiguaient les couleurs brillantes et les dorures dans leurs habitations.

      Nous devons seulement ici constater ces faits bien connus aujourd'hui


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<p>48</p>

Cet ancien sol a été découvert en 1847.

<p>49</p>

Nous avons pu, sur plusieurs points, retrouver les fondations de cette enceinte. Des restes romains existent sous toute la surface de la place actuelle, immédiatement sous le pavé: ce qui prouve que le sol du parvis était au niveau du dallage de l'église.

<p>50</p>

Ce parvis, devenu inabordable, doit être prochainement restauré.

<p>51</p>

Nous avons trouvé des traces du dallage de ce parvis, auquel on descendait évidemment dès une époque ancienne, c'est-à-dire du temps de Suger.

<p>52</p>

Dans la cité, à Paris; à Vézelay, à Senlis, à Provins, à Coucy-le-Château.

<p>53</p>

Guillaume de Nangis, Chronicon, 1184, édit. de la Société de l'histoire de France, t. I, p. 78.