La trahison de Darwin. Gerardo Bartolomé

La trahison de Darwin - Gerardo Bartolomé


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ans !

      — Exactement. Et sans compter que son altitude doit se compter depuis le fond de la mer, si nous en tenons compte, nous arrivons quasiment à un million d’années depuis la création. Le même calcul appliqué sur le ‘Pico da Coroa’ du Cap Vert, on obtient un chiffre qui donne un coup de pied à la Bible.

      Les deux jeunes hommes restèrent quelques minutes en silence alors que les vagues les faisaient monter et descendre et que les marins, étrangers à toute cette conversation, continuaient de ramer avec acharnement pour arriver au Beagle.

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      Le jeune John Lort Stokes, par Lely Bartolomé.

      Darwin reprit la parole.

      — Peu de temps avant de quitter l’Angleterre, le professeur Henslow, mon mentor à Cambridge, m’offrit le livre de Lyell intitulé « Principes de géologie ». Ce que disait Lyell dans son livre c’était que le monde était changeant et que les temps qui expliquaient les changements survenus étaient beaucoup plus longs que ce qu’établit la Bible.

      — Charles, vous avez découvert tout cela en une matinée sur une île solitaire au milieu de l’océan alors que le voyage ne fait que commencer ? Vous êtes un génie, c’est ahurissant ! Qu’allez vous découvrir de plus au cours des quatre prochaines années de notre expédition ?

      — Non John, il ne faut pas penser comme cela. Je n’ai rien découvert, je viens seulement de proposer une hypothèse qui doit se baser sur des preuves pour pouvoir évoluer en une théorie. Au cours des quatre prochaines années, j’ai l’intention de trouver la preuve qui me permettra d’exposer cette théorie devant la société scientifique.

      Le bateau arrivait déjà tout près du Beagle, on pouvait voir l’équipage se rapprochait de tribord pour les voir monter à bord.

      — John, je dois vous confesser que jusqu’à maintenant je me sentais un peu angoissé car je ne savais pas clairement quel était exactement mon rôle en tant que naturaliste dans cette expédition. Je me sentais sous pression parce que le capitaine attendait beaucoup des découvertes ou trouvailles que je pourrais faire, et plus grandes sont ses attentes, plus grande est ma peur de le décevoir. Mais…-Darwin se retourna et regarda pour la dernière fois les rochers de San Pablo-… ces rochers au milieu de nulle part ont tout changé pour moi, maintenant j’ai vraiment une mission à accomplir dans ce voyage.

      — Charles, comme le capitaine va être content ! Une réussite scientifique mettra son expédition dans une catégorie supérieure à n’importe quelle autre.

      — Je suis d’accord John, ça va l’enthousiasmer, je suis très impatient de lui raconter.

      Chapitre 4 : Le véritable Fitz Roy

      We finally arrived to South America. Fernando de Noronha, Bahia de todos los Santos, Abrolhos and Rio de Janeiro were the places whose coasts we surveyed...

      Enfin, nous atteignîment l’Amérique du Sud. Les côtes de Fernando de Noronha, Bahia de Todos los Santos, Abrolhos et Rio de Janeiro furent celles que nous avons relevées. Pour mon ami Darwin, ce fut la découverte de la forêt tropicale, avec son exubérance tant en termes de faune qu’en termes de flore. Je crois qu’à aucun autre moment du voyage il put collecter tant de spécimens différents. Cependant je peux affirmer de source sûre que ce qui choqua le plus le jeune Charles de cette étape au Brésil, ce fut de voir de près l’esclavage et de découvrir l’autre facette du capitaine Fitz Roy.

      Le Beagle était arrivé à la première zone que nous devions relever. Sur aucune carte marine n’était correctement signalé l’accès au port de Bahia. Le capitaine effectua une grande partie des relevés, mais il décida de les interrompre pour se rendre à Rio de Janeiro et de là faire son rapport au siège de l’Amirauté (d’Angleterre) qui avait juridiction sur la flotte anglaise en Amérique du Sud. A Rio, ils rencontrèrent plusieurs navires de la marine Royale. Une fois les formalités passées, Fitz Roy reçut pour instructions de terminer les relevés de Bahia, et ensuite de poursuivre le chemin vers le Rio de la Plata. Darwin, accompagné de Augustus Earle, resterait à Rio de Janeiro jusqu’au retour du Beagle. Charles en profita pour explorer la forêt dense qui entoure la ville. Depuis son logement à Botafogo il voyait, toute proche, la montagne qui dominait la zone : le Corcovado. Avec ses deux mille pieds d’altitude, il avait une paroi parfaitement verticale de mille pieds environ. A ses pieds s’étendaient une épaisse forêt et un lac d’eau salé.

      Darwin et Earle devinrent amis avec un marchand irlandais, Patrick Lennon, qui les guida non seulement dans les endroits les plus intéressants mais aussi à travers les méandres d’une société impériale et esclavagiste. L’expérience renforça l’opinion de Darwin au sujet de la barbarie que représentait l’esclavage, si commun dans ce pays, et qui perdurerait plus de cinquante ans encore.

      Presque deux mois plus tard, le Beagle fut de retour et Darwin apprit la mort de trois membres d’équipage : le brave Morgan ainsi que Boy James et Musters qui n’étaient encore que des enfants. Ils succombèrent tous trois d’une fièvre qui se déclara à la suite d’une expédition sur le fleuve Macacu, et ils moururent sur le chemin du retour vers Bahia. Ces décès affectèrent profondément le moral de l’équipage.

      The death of poor little Musters was such a heavy blow to me that many years after that, during our next voyage aboard the Beagle under the command of Mr Wickham, we stopped at Bahia to visit the his tomb.

      La mort du jeune Musters fut un coup si dur pour moi que bien des années après, au cours de l’expédition du Beagle qui suivit sous le commandement de Mr Wickham, nous nous sommes arrêtés à Bahia pour aller sur sa tombe. Pour un capitaine, la mort d’un membre de son équipage est beaucoup plus difficile à accepter que pour les autres puisqu’il ressent toujours la responsabilité des décès qui se produisent en conséquence de ses décisions. Le poids de ses évènements affecta énormément l’état d’esprit de Fitz Roy et cela explique sûrement un peu l’humeur terrible dans laquelle il se trouvait les jours suivants. Ceux qui ne le connaissaient pas bien pouvaient découvrir une autre facette de Fitz Roy. Cela faillit coûter le voyage à Darwin.

      * * *

      Le 5 juillet, le Beagle partit de Rio de Janeiro vers Montevideo. Peu à peu, on revint à une situation normale. Depuis plusieurs mois, Darwin partageait les repas avec le capitaine Fitz Roy dans sa cabine. Le déjeuner du 6 juillet 1832 serait un de ceux que Charles n’oublierait jamais.

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      San Salvador de Bahia, Brésil, par Augustus Earle.

      Tout commença par une plaisanterie comme tant d’autres. Fitz Roy fit un bref compte rendu de ce qu’il vit pendant la seconde visite à Bahia et à Abrolhos. Le capitaine lui raconta qu’il avait découvert d’où provenait le nom « Abrolhos » ; les navigateurs portugais savaient que de dangereux récifs de corail y étaient peu visibles et le message qu’il se donnaient quand ils allaient dans cette zone était : « Ouvre l’œil quand tu passes par là » ce qui se dit en portugais « Abra os olhos quando passares pela região » ; c’est de la contraction de la première partie que vient le nom « Abrolhos »-« Et ceci est exactement ce qu’il faut faire lorsque l’on navigue par ici, —dit Fitz Roy-il faut bien ouvrir l’œil ».

      Après avoir discuté du tragique « manglar » de l’embouchure du fleuve Macacu, qui avait coûté la vie à trois membres de l’équipage, Darwin raconta ce qu’il avait observé aux alentours de Rio de Janeiro lorsque le Beagle se trouvait beaucoup plus au nord.

      — Une des choses qui m’a le plus choqué, capitaine, c’est d’avoir rencontré trois hommes armés jusqu’aux dents et d’un aspect très fier lorsque nous sommes montés sur le Corcovado. Mr Patrick Lennon, qui nous accompagnait et était notre guide, nous expliqua qu’il


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