La Saga de Njal. Anonyme
de taille, fort, bon champion; il nageait comme un phoque et c'était le plus agile des hommes, impétueux et sans peur, prompt à parler et parlant bien, bon skald, et pourtant maître de lui en toutes choses. Il avait une chevelure brune et frisée, de beaux yeux, le visage pâle et dur, le nez de travers et des dents qu'il découvrait en riant, la bouche laide. Et malgré cela le plus beau guerrier qu'on pût voir.
Le second fils de Njal s'appelait Grim. Il avait les cheveux noirs et le visage plus beau que Skarphjedin. Il était grand et fort.
Le troisième fils de Njal s'appelait Helgi. Il était beau de visage et il avait de beaux cheveux. C'était un homme fort et un bon champion. Il était sage et réfléchi. Aucun des fils de Njal n'était marié.
Le quatrième fils de Njal s'appelait Höskuld. Il était bâtard. Sa mère s'appelait Hrodny et était fille d'Höskuld, sœur d'Ingiald de Kelda.
Njal demanda à Skarphjedin s'il voulait se marier. Il dit à son père de décider. Alors Njal demanda pour lui en mariage Thorhild, fille de Hrafn de Thorolfsfell. Et c'est pourquoi Skarphjedin eut depuis ce moment un autre domaine. Skarphjedin eut Thorhild et continua quand même à demeurer avec son père.
Pour Grim, Njal demanda Astrid de Djuparbakka. Elle était veuve et très riche. Grim l'eut et demeura aussi avec Njal.
XXVI
Il y avait un homme nommé Asgrim. Il était fils d'Ellidagrim, fils d'Asgrim, fils d'Öndott le corbeau. Sa mère s'appelait Jorunn et était fille de Teit, fils de Ketilbjörn le vieux, de Mosfell. La mère de Teit était Helga, fille de Thord Skeggji, fils de Hrap, fils de Björn Buna, fils de Grim seigneur de Sogn. La mère de Jorunn était Alof, fille de Bödvar le seigneur, fils de Kari le pirate. Le frère d'Asgrim fils d'Ellidagrim s'appelait Sigfus. Sa fille était Thorgerd mère de Sigfus, père de Sæmund le sage. Gauk fils de Trandil était le frère d'adoption d'Asgrim. C'était le plus brave et le plus beau des hommes. Ils se prirent de querelle, Asgrim et lui; et Asgrim tua Gauk.
Asgrim eut deux fils, et tous deux s'appelaient Thorhal. Ils étaient tous deux de grande espérance. Grim était le nom d'un autre fils d'Asgrim. Sa fille s'appelait Thorhalla. C'était la plus belle des femmes, et la plus accorte, et elle faisait bien toute chose.
Njal vint à parler avec Helgi son fils et lui dit: «J'ai pensé à un mariage pour toi, si tu veux suivre mon conseil».--«Je le veux certainement, dit Helgi, car je sais deux choses, que tu veux ce qui est bien, et que tu peux beaucoup. Mais de quel côté veux-tu te tourner?» Njal répondit: «Il faut que nous demandions la fille d'Asgrim fils d'Ellidagrim; car nous aurons fait là le choix le meilleur.»
XXVII
Un peu après, ils s'en allèrent faire la demande en mariage. Ils chevauchèrent vers l'est, passant la Thjorsa et allèrent devant eux jusqu'à ce qu'ils fussent arrivés à Tunga. Asgrim était à la maison, et il les reçut bien; et ils passèrent la nuit là. Le jour suivant ils se mirent à parler ensemble. Alors Njal présenta sa demande, et il demanda Thorhalla pour Helgi son fils. Asgrim fit une bonne réponse, et dit qu'il n'y avait pas d'hommes avec qui il fût plus empressé d'entrer en marché qu'avec eux. Après cela ils parlèrent de l'affaire; et l'entretien finit de telle sorte qu'Asgrim fiança sa fille à Helgi, et que le jour de la noce fut fixé. Gunnar vint au festin, et beaucoup d'autres des meilleurs hommes du pays. Et après la noce Njal proposa de prendre comme fils d'adoption Thorhal fils d'Asgrim. Et Thorhal s'en alla chez Njal et fut avec lui longtemps. Il aimait Njal plus que son propre père. Njal lui apprit si bien la loi qu'il devint le premier homme de loi de l'Islande.
XXVIII
Il vint un vaisseau dans l'embouchure d'Arnarbæli, et le vaisseau avait pour chef Hallvard le blanc, un homme de Vik. Il alla loger à Hlidarenda et fut avec Gunnar tout l'hiver; et il le priait souvent de voyager à l'étranger avec lui. Gunnar n'en disait pas grand'chose, mais il laissait voir que ce n'était pas tout à fait impossible. Au printemps il alla à Bergthorshval et demanda à Njal s'il lui semblait qu'il ferait bien de s'en aller à l'étranger. «Il me semble que tu feras bien, dit Njal: tu te montreras là-bas tel que tu es ici».--«Veux-tu veiller à mes biens, dit Gunnar, pendant que je serai parti? Car je veux que Kolskegg mon frère vienne avec moi; et je voudrais que pendant ce temps tu eusses l'œil sur ma maison avec ma mère».--«Je n'y manquerai pas, dit Njal; je t'aiderai en tout ce que tu voudras».--«Grand bien t'en fasse» dit Gunnar. Et il retourne chez lui.
L'homme de l'est vient encore à parler à Gunnar, comme quoi il devrait aller à l'étranger. Gunnar lui demande s'il a jamais navigué vers d'autres pays. Il répond qu'il a navigué vers tous les pays qui sont entre la Norvège et Gardariki, «et j'ai aussi navigué, dit-il, jusqu'au Bjarmaland». «Veux-tu naviguer avec moi vers les pays de l'est?» dit Gunnar.--«Je le veux certainement» dit-il. Et après cela Gunnar décida de partir avec lui. Njal prit en sa garde tous les biens de Gunnar.
XXIX
Gunnar partit pour l'étranger, et Kolskegg son frère avec lui. Ils naviguèrent jusqu'à Tunberg et furent là tout l'hiver. Il y avait eu un changement de chefs en Norvège, Harald Grafeld était mort et aussi Gunhild. Celui qui régnait alors sur le royaume était le jarl Hakon fils de Sigurd, fils d'Hakon, fils de Griotgard. Sa mère s'appelait Bergljot et était fille du jarl Thorir le taciturne. La mère de Bergljot s'appelait Alof Arbot et était fille d'Harald aux beaux cheveux.
Hallvard demanda à Gunnar s'il voulait aller trouver le jarl Hakon. «Je ne veux pas» dit Gunnar.--«As-tu un vaisseau long?» dit-il.--«J'en ai deux» dit Hallvard. «Alors je voudrais partir tous deux pour faire la guerre, dit Gunnar, et rassembler des hommes pour venir avec nous».--«Je veux bien» dit Hallvard.
Après cela ils s'en allèrent à Vik, prirent là deux vaisseaux et s'apprêtèrent à partir. Ils étaient bien montés en hommes; car on disait beaucoup de bien de Gunnar.
«Où veux-tu aller maintenant?» dit Gunnar. «D'abord au sud à Hising, dit Hallvard, trouver Ölvir mon parent».--«Que lui veux-tu?» dit Gunnar.--«C'est un bon compagnon, dit Hallvard, il nous donnera bien quelque renfort pour notre expédition».--«Allons-y donc» dit Gunnar.
Sitôt qu'ils furent prêts, ils s'en allèrent vers l'est, à Hising, et ils trouvèrent là un bon accueil. Peu de temps s'était passé depuis l'arrivée de Gunnar, qu'Ölvir faisait déjà grand état de lui. Ölvir le questionna sur son voyage. Hallvard répond que Gunnar veut guerroyer et gagner des richesses. «Ce n'est pas une idée sage, dit Ölvir, quand vous n'avez point de monde».--«Tu peux y ajouter» dit Hallvard. «Je veux bien donner quelque renfort à Gunnar, dit Ölvir, et quoique tu puisses te compter dans ma parenté, il me semble pourtant que j'aurai plus de profit avec lui».--«Que donneras-tu donc?» dit Hallvard».--«Deux vaisseaux longs, l'un à vingt rameurs, l'autre à trente» a dit Ölvir.--«Quelles gens les monteront?» dit Hallvard.--«Je ferai l'équipage de l'un avec mes serviteurs, et celui de l'autre avec des hommes du pays. Mais voici que j'ai appris qu'il y a du trouble dans la rivière; et je ne sais pas comment vous pourrez vous en aller».--«Qui donc est venu là?» dit Hallvard.--«Deux frères, dit Ölvir. L'un s'appelle Vandil et l'autre Karl; ils sont fils de Snæulf le vieux, du Gautland, dans l'est». Hallvard dit à Gunnar qu'Ölvir leur a donné des vaisseaux, et Gunnar s'en réjouit.
Ils s'apprêtèrent à