Chroniques de J. Froissart, Tome Premier, 1re partie. Froissart Jean

Chroniques de J. Froissart, Tome Premier, 1re partie - Froissart Jean


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proprement dite est revisé et développé dans la première rédaction appelée pour cette raison revisée.

      Ces deux dernières différences sont tout à l'avantage de la première rédaction revisée et prouvent surabondamment, comme nous l'avons dit plus haut, qu'elle a été composée après la première rédaction proprement dite sur laquelle elle constitue un progrès notable. Il n'en est pas ainsi de la première différence: on trouve dans les manuscrits de la branche plus ancienne un meilleur texte que dans ceux de la branche plus moderne. Serait-ce pour cette raison qu'il a été reproduit dans la seconde rédaction de préférence à celui de la première rédaction revisée?

      Suivant une remarque déjà faite, les manuscrits de Froissart sont d'autant plus nombreux que la rédaction qu'ils représentent est plus ancienne. Le nombre des exemplaires de la première rédaction revisée confirme cette observation. Cette rédaction ne compte aujourd'hui que trois manuscrits complets; mais notre Bibliothèque impériale en possède un quatrième exemplaire dont malheureusement le tome I, qui contenait la plus grande partie du premier livre, ne se retrouve plus. L'Anglais Johnes, qui vivait au commencement de ce siècle et dont il paraît que la riche collection a péri dans un incendie, devait aussi avoir en sa possession au moins un manuscrit de la rédaction dont il s'agit, puisqu'il a signalé et publié le premier certaines variantes propres à cette rédaction49; et la bonne leçon de 1350 à 1356, renvoyée en appendice à la fin du ms. du fonds Arundel 67 au British Museum, avait peut-être été extraite au quinzième siècle des manuscrits qui plus tard ont appartenu au châtelain de Hafod. On arrive ainsi pour la première rédaction revisée à un total de cinq manuscrits au moins contre quarante de la première rédaction proprement dite, deux de la seconde, un seulement de la troisième.

      Примечание 150

      Примечание 251

      Dans le tableau qui précède et dans le cours de cette édition, de même que la lettre A désigne la première rédaction proprement dite, la lettre B correspond à la première rédaction revisée dont les divers manuscrits sont indiqués par les chiffres qui suivent B.

      A défaut du tome I aujourd'hui perdu du manuscrit B2, le manuscrit B1, le plus ancien de beaucoup et le meilleur de la branche dont il fait partie, a été adopté comme texte du premier livre; et l'on exposera plus loin les raisons qui ont dicté ce choix52.

      Les mss. B2 et B3 offrent le même texte, plus ancien dans le ms. B2, plus moderne dans le ms. B3 qui n'est qu'une copie du premier; voilà pourquoi ces deux mss. ont été réunis par une accolade. Une main postérieure a pris à tâche de faire disparaître du ms. B2, en grattant ou en ajoutant des lettres à certains mots, une empreinte wallonne très-caractérisée ainsi que les signes usités dans notre ancienne langue pour marquer la distinction du cas sujet et du cas régime qui est encore généralement observée dans ce précieux ms. Il est fâcheux que nous ne connaissions pas la date précise de l'exécution du ms. B3: nous saurions ainsi à quelle époque la fameuse règle de l's est devenue, non-seulement une lettre close, mais encore un objet de scandale pour ceux qui faisaient copier ou copiaient les manuscrits. Ce qui prouve, malgré la différence de l'orthographe, que le ms. B3 a été copié sur le ms. B2, c'est que la plupart des notes marginales du t. II coté 5006 se trouvent reproduites sur les marges du t. II de l'exemplaire provenant du fonds de Gaignières coté 20357.

      Les mss. B1, B2-3 et B4 ont cela de particulier qu'aucun des trois n'a été copié sur l'un des deux autres53; en d'autres termes, chacun d'eux a sa valeur propre et indépendante. La rareté relative des exemplaires de la première rédaction revisée rend cette circonstance doublement précieuse.

      Comme le ms. du British Museum fonds Arundel no 67 appartient à la première rédaction proprement dite, il ne donne pour la partie du premier livre comprise entre 1350 et 1356 que le sec fragment qui caractérise les exemplaires de cette branche. Mais une note placée en marge du ms., au feuillet 173, renvoie à la leçon plus ample propre à la première rédaction revisée que le copiste du ms. Arundel avait sans doute connue trop tard pour l'insérer dans le corps du texte. Cette note est conçue en ces termes: «Après ceste presente rubriche de rouge coumensant: Coument le roy Phelippe de France trespassa, fault seize feiles lesquelx vous trouverez au dernier du livre. Et coumence la rubriche de rouge: Du chapelet de perles que le roy Edouart d'Angleterre donna…» Le fragment du ms. Arundel figure sous la rubrique B5 dans le tableau des mss. de la première rédaction revisée et sera désigné ainsi dans notre édition.

      On conserve à notre Bibliothèque impériale sous le numéro 10144 un abrégé du premier livre tellement original qu'on pourrait le considérer presque comme une quatrième rédaction. Cet abrégé se termine par l'explicit suivant: «Che sont les croniques de Froissart. Cest croniques escript Bertoulet Lebrun, archiés de corps de Phelippe duc de Bourgoigne, que Dieu absol! et le commencha au Noel mil CCCLXXVII54; et furent fait quinze jours devant le Saint Jehan Baptiste en sievant. Et priés à Dieu pour luy, et il pri[er]a à Dieu pour vout (sic) et pour tous vos amis. Et avoit le dit Bertoulet soissante trois ans quant il furent parfait.» Le caractère paléographique du ms. 10144 s'accorde bien avec la date de 1477 que le copiste a voulu écrire, et l'orthographe de ce ms. sent, comme on vient de le voir, son archer d'une lieue. D'ailleurs, rien dans le contenu de cet abrégé n'autorise à mettre en doute l'authenticité de l'exemplaire unique qui nous l'a conservé. Il porte comme tous les bons manuscrits des Chroniques une forte empreinte de dialecte wallon; et il rectifie ou complète parfois heureusement les autres rédactions du premier livre55.

      Le ms. 10144 contient, du feuillet 423 au feuillet 532, pour les années 1350 à 1356, le même texte, mais plus abrégé, que les mss. de la première rédaction revisée. Il renferme aussi, à partir du feuillet 809, pour les années 1372 à 1375, un sommaire de la version particulière à ces mêmes manuscrits. Ces deux circonstances nous ont déterminé à le classer sous la rubrique B6 parmi les exemplaires de la première rédaction revisée.

      CHAPITRE II.

      DE LA SECONDE RÉDACTION; – MANUSCRITS D'AMIENS ET DE VALENCIENNES; – CARACTÈRES DISTINCTIFS DE CETTE RÉDACTION

      La seconde rédaction ne nous est parvenue que dans les deux manuscrits d'Amiens et de Valenciennes.

      Le manuscrit d'Amiens56 est le seul qui représente la seconde rédaction d'une manière complète; il contient le premier livre tout entier de 1325 à 1377 et se termine par la même phrase que le ms. de notre Bibliothèque impériale 6477 à 6479, le plus ancien texte aujourd'hui conservé de la première rédaction revisée: «En ce temps se faisoit une grant assamblée de gens d'armes en le marce de Bourdiaux au mandement dou ducq d'Anjou et du conestable, car il avoient une journée arestée contre les Gascons englès de laquelle je parlerai plus plainement quant j'en seray mieux enfourmez.»

      Le manuscrit de Valenciennes57 renferme seulement la partie du premier livre qui embrasse le récit des événements de 1325 à 1340. Sauf l'addition d'un chapitre où Froissart décrit la cérémonie d'investiture d'Édouard III comme vicaire de l'Empire58, le manuscrit de Valenciennes n'est, malgré de nombreuses variantes de détail, qu'un abrégé de la partie correspondante de la seconde rédaction; et si cet abrégé n'a pas été rédigé d'après le manuscrit d'Amiens lui-même, comme la reproduction de certaines fautes qui ne peuvent provenir que de la distraction du copiste de ce dernier manuscrit le fait supposer59, du moins il a été certainement exécuté d'après un modèle commun.

      Les armes de la maison de Croy, écartelées de Craon et


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<p>49</p>

Voyez l'édition imprimée par Johnes en son château d Hafod en 1803, formats in-4o et in-8o. Johnes est également l'auteur d'une traduction anglaise des Mémoires de la Curne de Sainte-Palaye sur Froissart, qui parut à Londres en 1801. Notre chroniqueur a su toujours inspirer de belles passions à nos voisins; espérons que Johnes aura des successeurs.

<p>50</p>

Dans ce tableau, comme dans le précédent, les manuscrits désignés par un simple chiffre appartiennent à notre Bibliothèque impériale.

<p>51</p>

Ce manuscrit, qui provient du fonds de Gaignières, est toujours appelé dans les variantes du texte de ce volume: Ms. de Gaignières. Dans les volumes suivants, il sera désigné sous la rubrique B3, le ms. 6477 à 6479 sous la rubrique B1, le ms. de Mouchy-Noailles sous la rubrique B4.

<p>52</p>

Voyez le chapitre I de la seconde partie de cette introduction.

<p>53</p>

Sur la manière dont se termine le premier livre dans les divers manuscrits de la première rédaction revisée, voyez plus haut la fin du § 2, p. XIII et XIV, XXVII et XXVIII.

<p>54</p>

Le copiste doit avoir oublié un C. Ces mots: que Dieu absol ne peuvent se rapporter qu'à Philippe le Bon, duc de Bourgogne, mort à Bruges le 14 juin 1467.

<p>55</p>

Notre édition est la seule où l'on ait utilisé ce précieux abrégé.

<p>56</p>

Grand in-fol. vélin de 208 feuillets. Le texte est disposé sur deux colonnes dont chacune a soixante lignes. Ecriture de la première moitié du quinzième siècle.

<p>57</p>

In-4o papier de 123 feuillets. Le texte est disposé sur une seule colonne. Écriture de la fin du quinzième siècle.

<p>58</p>

P. 425 à 427 de ce volume.

<p>59</p>

Voyez la note de la p. 329.