Aventures de Monsieur Pickwick, Vol. I. Чарльз Диккенс

Aventures de Monsieur Pickwick, Vol. I - Чарльз Диккенс


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voisin; ou quand elle ralentissait le pas pour regarder, avec l'orgueil et la tendresse d'une mère, son enfant, rose et bien portant, qui jouait devant elle avec quelques petits camarades, sa figure fatiguée s'éclairait d'une expression de gratitude profondément ressentie, et elle paraissait être sinon heureuse ou gaie, du moins résignée et tranquille.

      Cinq ou six ans s'écoulèrent: l'enfant était devenu un jeune homme robuste et bien bâti, mais le temps, qui avait renforcé ses membres délicats, avait courbé la taille de sa mère et affaibli sa démarche; et cependant le bras qui aurait dû la supporter n'était plus enchaîné sous le sien, le visage qui aurait dû la réjouir ne la regardait plus en souriant. Elle occupait toujours le même banc, mais il y avait une place vacante à côté d'elle; sa bible était toujours tenue avec autant de soin, elle y faisait des signets pour l'ouvrir aux différentes lectures; mais il n'y avait plus personne pour la lire avec elle, et ses larmes coulaient sur son livre, et dérobaient à ses yeux le texte sacré. Ses voisins étaient encore aussi bienveillants qu'autrefois, mais maintenant elle détournait la tête pour éviter leur salut; elle ne s'arrêtait plus sous les vieux ormes, et elle n'enfermait plus dans son cœur des trésors de bonheur et d'espérance. Dans sa désolation elle enfonçait sa coiffe sur son visage et elle s'éloignait d'un pas précipité. Faut-il vous le dire? Ce jeune homme qui aurait dû conserver pieusement dans sa mémoire le souvenir des privations volontaires, des mauvais traitements que sa mère avait endurés pour lui; oubliant au contraire tout ce qu'il lui devait, et méprisant cruellement les angoisses de son cœur brisé, s'était lié avec les hommes les plus dépravés, les plus abandonnés de Dieu, et suivait une carrière de vices et de crimes, qui devait aboutir à la mort pour lui, à la honte pour elle. Hélas! pauvre nature humaine! Vous avez déjà deviné cela depuis longtemps.

      La malheureuse femme était sur le point de voir compléter la mesure de ses infortunes. Des délits nombreux avaient été commis dans le voisinage. Les coupables étaient restés impunis, et leur audace s'en augmentait. Un vol nocturne, accompagné de circonstances aggravantes, occasionna des poursuites actives, des recherches sévères, auxquelles il était impossible d'échapper. Le jeune Edmunds fut soupçonné, ainsi que trois de ses compagnons; il fut arrêté, jugé et condamné à mort.

      Le cri perçant et égaré, le cri maternel qui effraya l'audience quand le jugement solennel fut prononcé, retentit encore à mon oreille. Ce cri frappa de terreur le cœur du coupable, que le jugement, la condamnation, l'approche de la mort même n'avaient pu ébranler. Ses lèvres, jusqu'alors comprimées avec une sombre obstination, tremblèrent et se séparèrent involontairement. Son visage devint pâle, une sueur froide mouilla son front, ses membres vigoureux frissonnèrent, et il chancela sur son banc.

      Dans le premier transport de ses angoisses, la mère désolée se jeta à genoux, et supplia douloureusement l'Être infini, qui l'avait soutenue jusqu'alors dans ses épreuves, de la délivrer de ce monde de misère, et d'épargner la vie de son unique enfant. A cette prière succéda une explosion de pleurs, une agonie de désespoir, telles que j'espère bien n'en revoir jamais de semblables. Dès cet instant, je fus convaincu que la douleur abrégerait sa vie, mais je n'entendis plus une seule plainte, un seul murmure s'échapper de ses lèvres.

      C'était un déchirant spectacle de voir de jour en jour, dans la cour de la prison, cette malheureuse mère qui s'efforçait avec ferveur de toucher par l'affection, par les prières, le cœur pétrifié de son fils. Ce fut en vain: il resta sombre, farouche, impénitent. La commutation inespérée de sa peine, en celle de la transportation pour quatorze ans, ne put pas même adoucir pour un seul instant son endurcissement obstiné.

      L'esprit de résignation qui avait si longtemps soutenu sa mère ne pouvait plus lutter contre la faiblesse et la maladie. Pourtant elle voulut revoir son fils encore une fois. Elle déroba à son lit de souffrances ses membres chancelants; mais ses forces la trahirent, et elle tomba presque inanimée sur le carreau.

      C'est alors que l'indifférence et le stoïcisme tant vantés du coupable furent mis à une rude épreuve. Un jour se passa sans qu'il vît sa mère. Un second jour s'écoula, et elle ne vint pas. Un troisième soir arriva, et sa mère n'avait pas paru. Et dans vingt-quatre heures il devait être séparé d'elle peut-être pour toujours!

      Ce nouveau châtiment, qui tombait si pesamment sur lui, le rendit presque fou. Oh! comme les pensées longtemps oubliées de son enfance revinrent en foule dans son esprit, tandis qu'il arpentait l'étroite cour d'un pas rapide, comme si la rapidité de sa course eût pu hâter l'arrivée des nouvelles attendues; comme le sentiment de sa misère et de son abandon s'empara amèrement de lui, lorsqu'il apprit la vérité fatale! Sa mère, la seule personne qui l'eût jamais aimé, sa mère était malade, peut-être mourante, à une demi-lieue de lui; quelques minutes auraient pu le porter près de son lit, s'il avait été libre, mais il ne devait plus la revoir. Il se précipita sur la grille, et saisissant les barreaux de fer avec l'énergie du désespoir, il la secoua et la fit trembler; il s'élança contre les murailles épaisses comme s'il avait voulu les briser. Mais la prison solide bravait ses efforts insensés, et il se mit à pleurer comme un faible enfant, en se tordant les mains.

      Je portai au fils emprisonné les paroles de pardon et les bénédictions de sa mère, mais sans lui dire jusqu'à quel point son état était grave: je rapportai au lit de la mourante ses solennelles assurances de repentir et ses supplications ferventes pour obtenir ce pardon. J'écoutai avec une triste compassion les mille projets que le coupable repentant faisait déjà pour soutenir sa mère, pour la rendre heureuse quand il reviendrait de son exil. Et je savais que longtemps avant qu'il eût atteint le but de son voyage elle ne serait plus de ce monde!

      Il fut emmené pendant la nuit. Peu de semaines après, l'âme de la pauvre femme prit son vol, et, comme je le crois avec confiance, pour une région de paix et de bonheur éternel. J'accomplis moi-même le service funèbre sur ses restes, qui reposent maintenant dans notre petit cimetière: il n'y a point de pierre à la tête de sa tombe, à quoi bon? Ses chagrins étaient connus aux hommes et ses vertus à Dieu.

      Il avait été convenu, avant le départ du condamné, qu'il écrirait à sa mère aussitôt qu'il en pourrait obtenir la permission, et que ses lettres me seraient adressées, car son père avait positivement refusé de le voir, depuis le moment de son arrestation, et se souciait peu qu'il fût mort ou vivant. Nombre d'années s'écoulèrent sans que je reçusse de ses nouvelles; et lorsque la moitié de son temps fut passée, j'en conclus qu'il n'existait plus, et en vérité, je le souhaitais presque.

      Je me trompais cependant. A son arrivée à Botany-Bay9, il avait été envoyé dans l'intérieur des terres, et ce fut apparemment pour cela qu'aucune de ses lettres ne me parvint. Il resta au même endroit pendant quatorze années, persévérant constamment dans ses bonnes résolutions, et fidèle aux promesses qu'il avait faites à sa mère. Quand son temps fut fini, il surmonta d'énormes difficultés pour regagner l'Angleterre, et revint à pied au lieu de sa naissance.

      Par une belle soirée du mois d'août, John Edmunds rentra dans le village dont il avait été honteusement emmené dix-sept années auparavant. Le chemin qu'il suivait passait au milieu du cimetière, et son cœur se gonfla en le traversant, les rayons du soleil couchant se jouaient à travers les branches gigantesques des vieux ormes qui réveillaient dans l'esprit du libéré les souvenirs de son jeune âge; il se rappelait le temps où, s'attachant à la main de sa mère, il se rendait gaiement à l'église avec elle; il croyait voir encore son pâle visage; il croyait sentir les larmes brûlantes qui tombaient sur son front lorsqu'elle se baissait pour l'embrasser, et qui le faisaient pleurer aussi, quoiqu'il ne sût guère alors combien ces larmes étaient remplies d'amertume. Il se rappelait encore combien de fois il avait couru joyeusement dans ce même sentier avec quelques-uns de ses petits camarades, se retournant de temps en temps pour apercevoir le sourire de sa mère, ou pour entendre sa douce voix; et alors il lui sembla qu'un rideau se tirait dans sa mémoire; et mille souvenirs de tendresse méconnue et d'avertissements méprisés, de promesses oubliées, vinrent se presser dans son cerveau et déchirer son cœur.

      Il entra dans l'église, car c'était un dimanche, et quoique le service du soir fût fini et que les assistants fussent dispersés, la vieille


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<p>9</p>

Colonie pénitentiaire.