Choisie par le mâle Alpha Coffret. Kayla Gabriel
ce n’était pas le rouge rosé tombant du ciel comme ce soir, alors que le soleil se couchait, non. C’était un rouge beaucoup plus vif, un cuivré ardent qui occupait toutes ses pensées et s’infiltrait même au seuil de sa conscience quand il essayait de dormir. Une couleur riche, douce, chaude, joliment relevée par d’éblouissants yeux bleu saphir, une peau de lait et des taches de rousseur parsemées sur un petit nez mutin.
Le loup en lui remua, luttant pour refaire surface. Une sensation de chaleur explosa dans sa poitrine et les murs lambrissés de teck de son bureau lui parurent tout à coup étouffants. Lucas n’eut même pas besoin de jeter un œil au calendrier pour comprendre son état.
Sans y faire attention, il enleva sa veste et sa cravate de chez Kiton, les jeta sur son bureau et se prit la tête dans les mains avant de s’appuyer contre la fenêtre. Les lumières s’allumaient une à une à travers la ville et, dans l’obscurité grandissante, il pouvait discerner à la fois le paysage nocturne à l’extérieur et une image floue de lui-même, reflétée par la vitre.
Rien de surprenant à ce qu’il mesure plus d’un mètre quatre-vingt-dix, tout en muscle. Il était après tout, le spécimen parfait du loup garou. Grand sans être imposant, les membres longs et rapides. Les hommes comme lui avaient combattus dans les rangs des Vikings, des Spartiates, des Highlanders.
Avalant sa salive, Lucas dégrafa d’un coup sec les premiers boutons de sa chemise, se donnant plus de place pour respirer. Il pouvait presque sentir les murs se resserrer autour de lui. Ou peut-être était-ce ses ancêtres Berserk qui le regardaient et le jugeaient de leurs places d’honneur, là-haut, au Walhalla. Eux, qui avaient été à la tête d’escadrilles, de flottes entières, avaient gagné des guerres, écrasé leurs ennemis. La vie de Lucas, par contre, n’aurait pas pu être plus différente, ses guerres à lui, il les livrait dans des salles de conférences, ses navires étaient des systèmes informatiques complexes et ses ennemis, des innovateurs japonais qu’il admirait et avec lesquels il pactisait parfois. Ses ancêtres auraient sûrement été écœurés par son style de vie devenu si paisible et raffiné.
Clignant des yeux, Lucas reporta encore une fois son attention sa réflexion dans la vitre. Des cheveux blonds ondulés, bien coupés. Un peu plus longs sur le devant, là où ils bouclaient, barrés d’une mèche grise très visible sur la tempe, que les femmes semblaient admirer. Loin de le vieillir, elle donnait à l’acier de ses yeux un éclat orageux. Sa peau était bronzée, de la tête aux pieds, quelle que soit la saison. Des dents, si blanches et si bien alignées, que personne n’aurait pu se douter qu’elles se transformaient en crocs féroces sous l’influence nacrée de la pleine lune.
Un grognement s’échappa de sa poitrine et le prit par surprise. Son visage, la source de tellement de plaisir et de désir de la part de ses partenaires n’était pas son ami ce soir. Se fixer plus longtemps n’allait en rien l’aider à remplir le gouffre de désir qui s’était ouvert en lui.
Repoussant la vitre, il retourna vers son bureau et s’assit sur le bord. Faisant tomber sa veste et sa cravate sur le sol, il dégagea le dossier bleu clair qui se trouvait dessous et s’en saisit une nouvelle fois. En soupirant, il le contempla, puis glissa un doigt sous la couverture, faisant défiler son contenu lentement devant ses yeux affamés.
Aurélia Gilson, lut-il. Ses yeux parcoururent la page, relisant encore une fois les informations, les statistiques et les faits désormais familiers qui décrivaient la femme devenue son obsession.
Date de naissance : 1982. Age : 31. Lieu de naissance : Austin, Texas. Famille : Frère, Edgar Gilson, résident actuellement à San Francisco, Californie. Éducation : Institut de Technologie du Massachusetts (MIT), Deuxième et troisième cycle en informatique et en linguistique informatique. Recherchée par : Interpol, CIA, FBI, la Police de Dubaï, des Émirats Arabes Unis, de Nouvelle-Zélande, de France, de Norvège, de Namibie, de Côte D’Ivoire, d’Italie, d’Angleterre et de Grèce. Prime : 1,5 Million de dollars. Résidence actuelle : Inconnue. Vue la dernière fois : Nuit du hack, Convention de hackers, 25 juin 2012.
Tournant la dernière page du dossier, Lucas parcourut la liste des crimes pour lesquels Aurélia était recherchée, ce que son détective privé avait appelé « un casier judiciaire d’un bon kilomètre de long ». Elle avait piraté, craqué, hacké, phreaké, phishé, pharmé… et avait réussi à s’introduire dans la communauté des hackers d’élite dès le jeune âge de quinze ans. Et à peine le double plus tard, elle avait été prise la main dans le sac, tous ses crimes avaient été révélés au grand jour et son identité dévoilée à un bon nombre d’agences de sécurité gouvernementales. Ce ne fut qu’une question de temps avant que la pauvre fille ne soit bannie de tous les lieux technophiles du monde civilisé.
Tournant une autre page, il tomba sur une carte. Une carte du sri Lanka pour être précis, ornée d’un gros cercle rouge encerclant Colombo, la capitale commerciale du pays. Le lieu de résidence actuel d’Aurélia si l’on en croyait le détective.
Incapable de contenir son désir plus longtemps, il tourna une autre page. Une pile épaisse de photos sur papier brillant l’y attendait.
Dans l’ordre chronologique. D’abord, des photos d’enfance et d’adolescence, avec son frère, sa seule famille encore vivante. Puis à l’université, des photos d’elle posant à côté de ses camarades, sur le campus du MIT. Et juste après, ses préférées. Aurélia, cette coquine avait fait des photos de strip-tease très explicites pour ce qui semblait être une fête sur le thème des Suicide Girls. Ses cheveux de feu remontés sur la nuque, elle ne portait qu’une culotte blanche sur ses longues jambes fuselées et un t-shirt de base-ball jaune, et fixait l’objectif de ses magnifiques yeux bleus en faisant la moue.
Au fil des photos, le t-shirt remontait pour révéler un ventre plat, puis finissait par terre, exposant des seins aux tétons dressés. Ensuite, Aurélia retirait sa culotte pour révéler les courbes de son fessier. De dos, les jambes écartées, puis elle roulait pour se retrouver alanguie face à l’appareil photo, ouvrant les cuisses pour révéler…
Et c’était tout, enragea Lucas. Il avait passé un coup de fil et acheté tout le dossier d’opération dans l’espoir de récupérer des photos supplémentaires qu’ils se seraient gardées, pour leur usage personnel. Il avait ensuite demandé à son enquêteur de retrouver le photographe et avait fait fouiller son studio à la recherche des négatifs. Il devait y en avoir d’autres, pour satisfaire sa curiosité.
Non, il en avait été frustré, c’était insupportable. Il bandait maintenant, douloureux de désir, son corps hurlant de laisser son imagination prendre le relais. Il ne le ferait pas, bien entendu.
Non, non. Lucas était le PDG de l’une des entreprises informatiques les plus puissantes du monde, un loup garou, un alpha agressif, un compétiteur acharné qui obtenait toujours ce qu’il voulait, quand il le voulait. Et là, il voulait Aurélia.
S’élançant en avant, il appuya sur le bouton de l’interphone.
« Leila ! aboya-t-il.
— O-oui, M. Kiern ? Vous avez besoin de moi dans votre bureau ? » répondit-elle immédiatement, d’une voix de gorge, pleine de promesses. Sa secrétaire, une petite louve fougueuse satisfaisait ses appétits charnels et défendait son bureau avec autant d’ardeur.
« Non, pas maintenant. J’ai besoin de Walker et de Ben. Fais-les venir dans mon bureau, s’il te plait, demanda-t-il en adoucissant un peu le ton.
— Oui, monsieur, » répondit-elle, de nouveau professionnelle. Il aimait beaucoup ce trait de caractère chez Leila, vraiment.
Quelques minutes plus tard, Walker Black et Ben Fincher entrèrent dans son bureau, la curiosité se lisant sur leurs traits.
« Asseyez-vous, je vous prie. » Lucas leur désigna les sièges et étudia les deux mâles en face de lui, alors qu’ils se laissaient tomber dans les chaises faisant face à son bureau.
Une fois Leila les avait appelés les « serre-livres », tant Walker et