Les Français en Amérique pendant la guerre de l'indépendance des États-Unis 1777-1783. Thomas Willing Balch

Les Français en Amérique pendant la guerre de l'indépendance des États-Unis 1777-1783 - Thomas Willing Balch


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conduite de Pedro Melendez, vinrent attaquer la colonie protestante établie à l'embouchure du fleuve Saint-Jean et en massacrèrent tous les habitants. Indigné d'un tel acte de barbarie, un gentilhomme de Mont-de-Marsan, Dominique de Gourgues, digne précurseur de La Fayette, équipe à ses frais trois navires en 1567, les fait monter par deux cents hommes, et vient exercer de sanglantes représailles sur les soldats de Melendez. Cette vengeance fut cependant stérile dans ses résultats, et les persécutions dont son auteur fut l'objet à son retour en France furent le seul fruit qu'il recueillit de son patriotisme.

      C'est aux Anglais qu'il était réservé de créer en Amérique des établissements florissants. En 1584 Walter Raleigh fonda la colonie de la Virginie, ainsi nommée en l'honneur de la reine Elisabeth. Le roi Jacques Ier partagea ensuite tout le territoire compris entre le 34e et le 45e degré de latitude, entre deux compagnies dites de Londres et de Plymouth, qui espéraient découvrir là comme au Mexique des mines d'or et d'argent. La pêche de la morue au nord et la culture du tabac au sud dédommagèrent ces premiers colons de leur déception. La fertilité du sol en attira de nouveaux, tandis que les événements politiques en Angleterre favorisaient l'émigration vers d'autres points.

      En 1620, des puritains, fuyant la mère patrie, vinrent s'établir au cap Cod, auprès de l'endroit où s'éleva, quelques années plus tard, la ville de Boston. En même temps qu'ils prenaient possession des Bermudes et d'une partie des Antilles, les Anglais fondaient les colonies connues depuis sous le nom de Nouvelle-Angleterre. Sous Cromwell, ils enlevaient aux Espagnols la Jamaïque et aux Hollandais le territoire dont ils firent les trois provinces de New-York, de New-Jersey et de Delaware (1674). Charles II donna la Caroline, plus tard partagée en deux provinces, à plusieurs lords anglais, et céda de même à William Penn le territoire qu'il appela de son nom Pensylvanie (1682). La Nouvelle-Ecosse, Terre-Neuve et la baie d'Hudson furent occupés en 1713, à la suite du traité d'Utrecht, qui enlevait ces contrées aux Français; enfin la Géorgie recevait en 1733 ses premiers établissements.

      Toutes ces colonies se développèrent avec une telle rapidité qu'à l'époque de la guerre de l'Indépendance, c'est-à-dire après un peu plus d'un siècle, elles comptaient plus de deux millions d'habitants. Mais, composées d'éléments très-divers et dont nous étudierons bientôt la nature, fondées à des époques différentes et sous des influences variables, elles étaient loin d'avoir une population homogène et une organisation uniforme. Ainsi, tandis que le Maryland, la Virginie, les Carolines et la Géorgie, au sud, étaient administrées par une aristocratie puissante, maîtresse de vastes domaines qu'elle faisait exploiter par des esclaves et qu'elle transmettait suivant les coutumes anglaises, au nord, la Nouvelle-Angleterre possédait l'égalité civile la plus parfaite et était régie par des constitutions tout à fait démocratiques. Mais toutes ces colonies avaient les institutions politiques fondamentales de l'Angleterre, et exerçaient par des représentants nommés à l'élection les pouvoirs législatifs. Toutes aussi étaient divisées en communes, qui formaient le comté; en comtés, qui formaient l'État. Les communes décidaient librement de leurs affaires locales, et les comtés nommaient des représentants aux assemblées générales des États.

      La Virginie, New-York, les Carolines, la Géorgie, New-Hampshire et New-Jersey recevaient bien des gouverneurs nommés par le roi; mais ceux-ci ne possédaient que le pouvoir exécutif: les colonies exerçaient toujours le droit de se taxer elles-mêmes. C'est librement et sur la demande des gouverneurs qu'elles votaient les subsides nécessaires à la mère patrie, et il faut reconnaître qu'elles lui payaient un lourd tribut. Outre les subsides extraordinaires les colons payaient en effet un impôt sur le revenu; tous les offices, toutes les professions, tous les commerces étaient soumis à des contributions proportionnées aux gains présumés. Le vin, le rhum et les liqueurs étaient taxés au profit de la métropole qui recevait aussi des propriétaires un droit de dix livres sterling par tête de nègre introduite dans les colonies. L'Angleterre tirait enfin des profits plus considérables encore du monopole qu'elle s'était réservé d'approvisionner les colonies de tous les objets manufacturés.

      Déjà mécontentes de certaines résolutions prises par le Parlement, l'année précédente, pour grever de taxes le commerce américain, devenu libre avec les Antilles françaises, et pour limiter les payements en papier-monnaie, les colonies ne se continrent plus à cette nouvelle. Elles considérèrent l'acte du timbre comme une atteinte audacieuse portée à leurs droits et un commencement de servitude si elles ne résistaient. Après des mouvements populaires tumultueux et des délibérations légales, elles se décidèrent à refuser l'emploi du papier timbré, chassèrent les employés chargés de le vendre et brûlèrent leurs provisions. Les journaux américains, déjà très-nombreux, publièrent qu'il fallait s'unir ou succomber. Un congrès composé de députés de toutes les colonies s'assembla le 7 octobre 1765 à New-York et, dans une pétition énergique se déclara résolu, tout en restant fidèle à la couronne, à défendre jusqu'au bout ses libertés. Les Américains s'engagèrent en même temps à se passer des marchandises anglaises, et une ligue de non-importation, bien conçue et bien exécutée, rompit commercialement les relations avec l'Angleterre. La métropole dut céder. Mais elle ne renonça pas toutefois aux droits exorbitants qu'elle s'était attribués de prendre de semblables mesures. Elle s'obstina à prétendre que le pouvoir législatif du Parlement s'étendait sur toutes les parties du territoire britannique. C'est en vertu de ce principe que, dans l'été de 1769, le gouvernement anglais mit un droit nouveau sur le verre, le papier, les couleurs, le cuir et le thé.

      Les colons, alléguant de leur côté le grand principe de la constitution anglaise, que nul citoyen n'est tenu de se


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