Les pélerinages des environs de Paris. François-René Salmon
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François-René Salmon
Les pélerinages des environs de Paris
Publié par Good Press, 2021
EAN 4064066326272
Table des matières
Saint-Denis, le tombeau et la basilique.
La sainte tunique d’Argenteuil.
Notre-Dame des Vertus à Aubervilliers.
Saint-Maur les Fossés et Notre-Dame des Miracles.
Notre-Dame de Bonne-Garde à Longpont et les pèlerinages du chemin de fer d’Orléans.
Les pèlerinages de Paris à Versailles et au delà.
Le pèlerinage de Saint-Spire à Corbeil.
Le chemin de fer de Paris à Creil et le pèlerinage de Notre-Dame de Pontoise.
Le pèlerinage de Notre-Dame des Anges.
DÉCLARATION
L’auteur soussigné, voulant se soumettre entièrement au décret porté par la Sacrée-Congrégation et renouvelant la déclaration qu’il a faite précédemment, remet purement et simplement son currage au jugement du Saint-Siége et à la correction de l’Eglise catholique, apostolique et romaine, dont il est et veut rester à jamais le fils très-soumis.
Paris, 18 septembre 1874.
Saint-Denis, le tombeau et la basilique.
Il est temps de revenir aux corps sacrés des martyrs pour voir comment, le Seigneur les a gardés et de quels honneurs il les a entourés. Nous les avons laissés ensevelis à six milles de Paris dans un champ appartenant à une païenne nommée Catulla qui ne tarda pas à se convertir. Quand la moisson qui avait dérobé aux recherches des persécuteurs la sépulture des saints eût été recueillie et que la paix eût été, pour quelques temps du moins, rendue à l’Eglise, Catulla fit élever un mausolée au lieu où ces restes précieux avaient été déposés .
Bien des contestations se sont élevées au sujet de l’emplacement de cette sépulture. En écartant les opinions qui n’ont aucune bonne raison en leur faveur, celle de Launoy qui place arbitrairement le tombeau de l’apôtre au lieu où s’élevait autrefois l’église de Saint-Denys-du-Pas, celle de Tillemont qui voit dans Chaillot, le Catulliacum ou Vicus Catulliacensis où les actes disent que les martyrs furent ensevelis, celle du P. Toussaint Duplessis qui cherchait cet endroit dans la rue qui porte à Paris le nom du saint évêque, nous sommes inévitablement conduits à la ville qui, depuis le septième siècle au moins s’appelle Saint-Denis, et qui se nommait auparavant Catulliacum du nom de cette femme qui y conserva, dans son domaine, les corps des saints martyrs. La distance de cette ville à la capitale est bien, à peu de chose près, celle qui est indiquée dans les Actes. Ce fut là, certainement, que sainte Geneviève assez voisine encore du temps de saint Denis se rendit fréquemment en pèlerinage, là qu’elle fit élever, pour honorer le tombeau du martyr, une petite église dont le roi Dagobert devait, plus tard, faire une superbe basilique. Toutefois, il serait difficile d’affirmer avec une entière certitude que la sépulture primitive de saint Denis ait été précisément à la place même où s’élève la basilique.
Qu’on se représente, pour se faire une idée de l’ancien Catolacum ou Catulliacum, une vaste plaine marécageuse séparée en deux par la voie romaine qui allait de Paris à Pontoise et qu’on trouve mentionnée, dans l’Itinéraire d’Antonin, sous le nom de Strata. A gauche, en venant de Lutèce, on rencontrait d’abord un petit village qui est devenu plus tard Saint-Denis de l’Estrée, de Stratâ ; plus loin, sur la droite, un autre village, ou plutôt une propriété, villa, appartenant à Catulla. Suivant certains auteurs, la sépulture primitive des martyrs aurait été sur le territoire de Saint-Denis de l’Estrée, où Catulla pouvait avoir un champ séparé de sa propriété par la voie romaine. Il est certain qu’il y eût là, jusqu’au dix-huitième siècle, une église de ce nom. Le témoignage de l’auteur anonyme des Gestes de Dagobert qui ne jouit pas d’une grande autorité a donné naissance à cette opinion. Selon lui, ce monarque fit élever sa basilique à quelque distance de l’église bâtie par sainte Geneviève et non pas sur son emplacement, il y fit prendre les corps des martyrs qui y reposaient et leur donna le nouveau temple pour asile comme un monument plus digne de leur gloire. Cependant, l’opinion la plus commune et la mieux appuyée croit que la basilique actuelle qui remplace au même lieu celle de Dagobert est située sur le terrain du champ de Catulla, à l’endroit où elle avait fait construire le mausolée qui servit de tombeau aux saints martyrs.
La piété des fidèle, ne tarda pas à se manifester par de fréquentes visites au monument, qui commencèrent bien avant les premières invasions des Francs et durèrent tout le temps de la domination romaine. Elles furent, dès ce moment, récompensées par de nombreux miracles. Le tombeau qu’avait élevé Catulla dura jusqu’aux jours du roi Clovis. A cette époque, il était en ruines, soit qu’il eût été ravagé dans les guerres de la conquête franque, soit que le temps déjà eût eu raison de sa construction peu solide apparemment.
Sainte Geneviève qui vivait alors avait une très-grande dévotion pour les saints de son pays, elle comptait qu’ils ne laisseraient pas leur œuvre inachevée, et que leur intercession obtiendrait du Seigneur l’entière conversion des Gaulois et des Francs. Nous l’avons déjà vue au tombeau de saint Martin de Tours , mais celui de saint Denis était bien plus à sa proximité et nous savons par l’auteur anonyme de sa vie qu’elle s’y rendait souvent en pèlerinage. Elle partait de Paris avec quelques pieuses compagnes bien avant l’aurore, surtout en hiver; elle portait alors un flambeau pour se diriger dans sa route.