Le capitaine Paul. Dumas Alexandre
comte. En effet, l'embarcation était au bas de l'escalier de la frégate, et les matelots, les rames en l'air, attendaient celui qu'ils devaient reconduire. À peine Emmanuel fut-il descendu, que la barque s'éloigna avec autant de rapidité qu'elle en avait mis à venir; mais cette fois elle vogua tristement et en silence, car le jeune marin n'était plus là pour animer la conversation par les axiomes de sa poétique philosophie.
La même nuit, le prisonnier fut conduit à bord de l'Indienne, et le lendemain, lorsque le jour parut, les curieux cherchèrent en vain sur l'Océan la frégate qui depuis huit jours avait donné naissance à tant de conjectures, et dont l'arrivée inattendue, la station sans résultat, et le départ spontané demeurèrent toujours un mystère inexplicable pour les dignes habitants de Port-Louis.
Chapitre III
Comme les motifs qui avaient amené le capitaine Paul en vue des côtes de Bretagne n'ont de relation avec notre histoire que par les événements que nous venons de raconter, nous laisserons nos lecteurs dans la même incertitude que les habitants de Port-Louis, et quoique notre vocation et notre sympathie nous attirent naturellement vers la terre, nous le suivrons deux ou trois jours encore dans sa course aventureuse sur l'Océan.
Le temps était aussi beau qu'il peut l'être dans les parages occidentaux vers les premiers jours d'automne. L'Indienne marchait bravement vent arrière. Les matelots insoucieux se reposaient sur l'aspect du ciel; et, à l'exception de quelques hommes occupés à la manoeuvre, tout le reste de l'équipage, dispersé dans les différentes parties du bâtiment, usait le temps à son caprice, lorsqu'une voix qui semblait venir du ciel s'écria:
– Oh! d'en bas, ho!
– Holà! répondit le contremaître placé à l'avant.
– Une voile! dit le matelot placé en observation.
– Une voile! répéta le contre-tire. Monsieur l'officier de quart, faites prévenir le capitaine.
– Une voile! une voile! répétèrent tous les matelots dispersés sur le tillac, car en ce moment une vague, soulevant le bâtiment qui apparaissait à l'horizon, l'avait rendu visible à l'oeil des marins, quoique le regard moins exercé d'un passager ou d'un soldat de terre l'eût certainement pris pour l'aile d'une mouette étendue sur l'Océan.
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