La guerre au château. Mme E. Thuret

La guerre au château - Mme E. Thuret


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       Mme E. Thuret

      La guerre au château

      Publié par Good Press, 2021

       [email protected]

      EAN 4064066323332

       I

       II

       III

       IV

       V

       VI

       VII

       VIII

       IX

       X

       XI

       XII

       XIII

       XIV

       XV

       XVI

       XVII

       XVIII

       XIX

       XX

       XXI

       Table des matières

      –Allons, Sylvain, dépêchez-vous! Placez sur la table ce vase de fleurs. Mais essuyez-le donc! Ne voyez-vous pas que l’eau se répand sur le tapis. Il reste de la poussière sur la cheminée. Passez la peau sur les dorures. Les chenets ne brillent pas.

      Et vous, Marion, ce couvre-pieds est mal arrangé. La malines du volant tombe inégalement. La dentelle des oreillers n’est pas bien tuyautée. Les nœuds de taffetas sont posés sans goût. Remportez vite les oreillers à la lingerie. Indiquez à Bastienne les changements à faire et revenez immédiatement.

      Tenez, voilà que la calèche est prête; allons, hâtez-vous!

      En effet, l’attelage, composé de quatre chevaux de sang, gris pommelé, conduits en Daumont, par deux jockeys en casaque de taffetas rayé rose et blanc, rubans roses et bouquet de roses à la boutonnière, commençait à s’impatienter. Les deux jockeys, déjà en selle, contenaient à grand’peine l’ardeur de leurs chevaux dont les mors étaient blancs d’écume, et dont les pieds de devant labouraient la terre.

      Enfin,… la voilà donc partie, Mme la comtesse, dit Sylvain en respirant bruyamment, et il se laissa tomber dans un fauteuil, son plumeau placé en travers sur ses genoux. Ma parole, elle en fatiguerait quarante comme nous. Ce «comme nous» fut dit d’un ton capable, impossible à rendre. Depuis ce matin, je n’arrête pas.

      Ce discours s’adressait à Mlle Marion, qui venait de rapporter les oreillers et mettait la dernière main à l’arrangement du lit.

      Mlle Marion était une bonne fille toute simple, toute ronde, tout épaisse, mais c’était une travailleuse. Elle était plus fine qu’on ne le croyait; voyait tout avec l’air de ne rien voir; ne parlait qu’à son heure, et n’en pensait que mieux, car elle avait du bon sens.

      Il y avait dix ans qu’elle était au château.

      Son activité, son ordre, son entente de l’intérieur l’avaient, de femme de chambre, élevée à la dignité de femme de charge. Elle avait le sentiment de son importance, et, malgré son apparence débonnaire, elle savait tenir son rang et se faisait donner du mademoiselle.

      On la considérait à l’office comme un oracle. Elle en savait si long!

      C’était, du moins, l’opinion accréditée à l’antichambre.

      La voici donc enfin qui va arriver, Mme la vicomtesse, continua Sylvain. Y a-t-il assez longtemps qu’on en parle! Que dites-vous de cela, mademoiselle Marion?

      La femme de chambre se contenta de hocher la tête d’un air entendu.

      –Moi, je suis curieux de la voir. Mais, comment cela va-t-il aller au château? Cela va être amusant.

      Il se frotta les mains. Oh ! je ne parle ni de M. le comte, ni de ces demoiselles, ni même de Mlle Smith. De ce côté-là il n’y a pas de danger. Mais Mme la comtesse? mais les deux autres?

      Il interrogea de l’œil Mlle Marion.

      Celle-ci avait fini d’arranger le lit et se disposait à s’en aller.

      Elle se rapprocha.

      Bah! dit-elle, en baissant la voix et en jetant un regard vers le corridor. La porte était ouverte, et Marion était une fille prudente. Tout feu, tout flamme aujourd’hui. Ma belle-sœur!… ma jolie petite belle-sœur, mon amour de petite belle-sœur, gros comme le bras. Puis, demain, plus rien. Il n’en sera que cela. La belle-sœur passera, comme j’en ai vu passer tant d’autres. Bientôt on ne s’en occupera plus. Ou si on s’en occupe encore, gare à elle. Ce sera comme pour mamselle Geneviève. La pauvre chère petite, elle en a vu du changement, elle!

      La femme de charge, effrayée d’avoir été si osée dans ses paroles, promena autour d’elle ses gros yeux effarés, puis, rassurée par la solitude absolue qui continuait à régner dans le corridor, elle ajouta, presque tout bas:

      Soyez tranquille, Mlle Jude mettra bon ordre à l’engouement pour la belle-sœur. Elle ne lui permettra pas de prendre sa place. Et Mlle Rebec, donc. en voilà encore une qui ne vaut pas cher.

      Oui, Jude, Judas, répliqua Sylvain avec un air de sous-entendu. La langue ne lui manque pas. Y a-t-il de l’or, y en a-t-il au bout de cette langue-là? A-t-elle du savoir-faire? Elle les joue tous.

      Oh! pas M. le comte, réclama la femme de

      chirge.

      M. le comte tout comme les autres.

      Marion haussa les épaules avec indignation.

      Et Rebec, Rébecca, ajouta M. Sylvain qui visait aux bons mots; la fausse que cela fait. En a-t-elle


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