David Copperfield – Tome II. Чарльз Диккенс

David Copperfield – Tome II - Чарльз Диккенс


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pardonnez-moi… miss D… vous savez bien, dit Traddles en rougissant par excès de délicatesse, elle demeure à Londres, n'est-ce pas?

      – Oh! oui, près de Londres.

      – La mienne… vous vous souvenez peut-être, dit Traddles d'un air grave, demeure en Devonshire… ils sont dix enfants… aussi je ne suis pas si occupé que vous sous ce rapport.

      – Je me demande, répondis-je, comment vous pouvez supporter de la voir si rarement.

      – Ah! dit Traddles d'un air pensif, je me le demande aussi. Je suppose, Copperfield, que c'est parce qu'il n'y a pas moyen de faire autrement!

      – Je devine bien que c'est là la raison, répliquai-je en souriant et en rougissant un peu, mais cela vient aussi de ce que vous avez beaucoup de courage et de patience, Traddles.

      – Croyez-vous? dit Traddles en ayant l'air de réfléchir. Est-ce que je vous fais cet effet-là, Copperfield? Je ne croyais pas. Mais c'est une si excellente fille qu'il est bien possible qu'elle m'ait communiqué quelque chose de ces vertus qu'elle possède. Maintenant que vous me le faites remarquer, Copperfield, cela ne m'étonnerait pas du tout. Je vous assure qu'elle passe sa vie à s'oublier elle-même pour penser aux neuf autres.

      – Est-elle l'aînée? demandai-je.

      – Oh! non, certes, dit Traddles, l'aînée est une beauté.»

      Je suppose qu'il s'aperçut que je ne pouvais m'empêcher de sourire de la stupidité de sa réponse, et il reprit de son air naïf en souriant aussi:

      «Cela ne veut pas dire, bien entendu, que ma Sophie… C'est un joli nom, n'est-ce pas, Copperfield?

      – Très-joli, dis-je.

      – Cela ne veut pas dire que ma Sophie ne soit pas charmante aussi à mes yeux, et qu'elle ne fît pas à tout le monde l'effet d'être une des meilleures filles qu'on puisse voir; mais quand je dis que l'aînée est une beauté, je veux dire qu'elle est vraiment… Il fit le geste d'amasser des nuages autour de lui de ses deux mains… magnifique, je vous assure, dit Traddles avec énergie.

      – Vraiment?

      – Oh! je vous assure, dit Traddles, tout à fait hors ligne. Et, voyez-vous, comme elle est faite pour briller dans le monde et pour s'y faire admirer, quoiqu'elle n'en ait guère l'occasion à cause de leur peu de fortune, elle est quelquefois un peu irritable, un peu exigeante. Heureusement que Sophie la met de bonne humeur!

      – Sophie est-elle la plus jeune? demandai-je.

      – Oh! non certes, dit Traddles en se caressant le menton. Les deux plus jeunes ont neuf et dix ans. Sophie les élève.

      – Est-elle la cadette, par hasard? me hasardai-je à demander.

      – Non, dit Traddles, Sarah est la seconde; Sarah a quelque chose à l'épine dorsale; pauvre fille! les médecins disent que cela se passera, mais, en attendant, il faut qu'elle reste étendue pendant un an sur le dos. Sophie la soigne, Sophie est la quatrième.

      – La mère vit-elle encore? demandai-je.

      – Oh! oui, dit Traddles, elle est de ce monde. C'est vraiment une femme supérieure, mais l'humidité du pays ne lui convient pas, et… le fait est qu'elle a perdu l'usage de ses membres.

      – Quel malheur!

      – C'est bien triste, n'est-ce pas? repartit Traddles. Mais au point de vue des affaires du ménage, c'est moins incommode qu'on ne pourrait croire, parce que Sophie prend sa place. Elle sert de mère à sa mère tout autant qu'aux neuf autres.»

      J'éprouvais la plus vive admiration pour les vertus de cette jeune personne, et, dans le but honnête de faire de mon mieux pour empêcher qu'on n'abusât de la bonne volonté de Traddles au détriment de leur avenir commun, je demandai comment se portait M. Micawber.

      «Il va très-bien, merci, Copperfield, dit Traddles, je ne demeure pas chez lui pour le moment.

      – Non?

      – Non. À dire le vrai, répondit Traddles, en parlant tout bas, il a pris le nom de Mortimer, à cause de ses embarras temporaires; il ne sort plus que le soir avec des lunettes. Il y a une saisie chez nous pour le loyer. Mistress Micawber était dans un état si affreux que je n'ai vraiment pu m'empêcher de donner ma signature pour le second billet dont nous avions parlé ici. Vous pouvez vous imaginer quelle joie j'ai ressentie, Copperfield, quand j'ai vu que cela terminait tout et que mistress Micawber reprenait sa gaieté.

      – Hum! fis-je.

      – Du reste, son bonheur n'a pas été de longue durée, reprit Traddles, car malheureusement, au bout de huit jours, il y a eu une nouvelle saisie. Là-dessus, nous nous sommes dispersés. Je loge depuis ce temps-là dans un appartement meublé, et les Mortimer se tiennent dans la retraite la plus absolue. J'espère que vous ne me trouverez pas égoïste, Copperfield, si je ne puis m'empêcher de regretter que le marchand de meubles se soit emparé de ma petite table ronde à dessus de marbre, et du pot à fleur et de l'étagère de Sophie!

      – Quelle cruauté! m'écriai-je avec indignation.

      – Cela m'a paru… un peu dur, dit Traddles avec sa grimace ordinaire lorsqu'il employait cette expression. Du reste, je ne dis pas cela pour en faire le reproche à personne, mais voici pourquoi: le fait est, Copperfield, que je n'ai pu racheter ces objets au moment de la saisie, d'abord parce que le marchand de meubles, qui pensait que j'y tenais, en demandait un prix fabuleux, ensuite parce que… je n'avais plus d'argent. Mais depuis lors j'ai tenu l'oeil sur la boutique, dit Traddles paraissant jouir avec délices de ce mystère; c'est en haut de Tottenham-Court-Road, et enfin, aujourd'hui, je les ai vus à l'étalage. J'ai seulement regardé en passant de l'autre côté de la rue, parce que si le marchand m'aperçoit, voyez-vous, il en demandera un prix!.. Mais j'ai pensé que, puisque j'avais l'argent, vous ne verriez pas avec déplaisir que votre brave bonne vînt avec moi à la boutique; je lui montrerais les objets du coin de la rue, et elle pourrait me les acheter au meilleur marché possible, comme si c'était pour elle.»

      La joie avec laquelle Traddles me développa son plan et le plaisir qu'il éprouvait à se trouver si rusé, restent dans mon esprit comme l'un de mes souvenirs les plus nets.

      Je lui dis que ma vieille bonne serait enchantée de lui rendre ce petit service, et que nous pourrions entrer tous les trois en campagne, mais à une seule condition. Cette condition était qu'il prendrait une résolution solennelle de ne plus rien prêter à M. Micawber, pas plus son nom qu'autre chose.

      «Mon cher Copperfield, me dit Traddles, c'est chose faite; non- seulement parce que je commence à sentir que j'ai été un peu vite, mais aussi parce que c'est une véritable injustice que je me reproche envers Sophie. Je me suis donné ma parole à cet effet, et il n'y a plus rien à craindre, mais je vous la donne aussi de tout mon coeur. J'ai payé ce malheureux billet. Je ne doute pas que M. Micawber ne l'eût payé lui-même s'il l'avait pu, mais il ne le pouvait pas. Je dois vous dire une chose qui me plaît beaucoup chez M. Micawber, Copperfield, c'est par rapport au second billet qui n'est pas encore échu. Il ne me dit plus qu'il y a pourvu, mais qu'il y pourvoira. Vraiment, je trouve que le procédé est très-honnête et très-délicat.»

      J'avais quelque répugnance à ébranler la confiance de mon brave ami, et je fis un signe d'assentiment. Après un moment de conversation, nous fîmes le chemin de la boutique du marchand de chandelles pour enrôler Peggotty dans notre conjuration, Traddles ayant refusé de passer la soirée avec moi, d'abord parce qu'il éprouvait la plus vive inquiétude que ses propriétés ne fussent achetées par quelque autre amateur avant qu'il eût le temps de faire des offres, et ensuite parce que c'était la soirée qu'il consacrait toujours à écrire à la plus excellente fille du monde.

      Je n'oublierai jamais les regards qu'il jetait du coin de la rue vers Tottenham-Court-Road, pendant que Peggotty marchandait ces objets si précieux, ni son agitation quand elle revint lentement vers nous, après avoir inutilement offert son prix, jusqu'à ce qu'elle fut rappelée par le marchand et qu'elle retourna sur ses pas. En fin de compte, elle racheta la propriété


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