La Fille Aux Arcs-En-Ciel Interdits. Rosette

La Fille Aux Arcs-En-Ciel Interdits - Rosette


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“Je travaille ici il y a quinze ans. J’arrivai peu mois après l’accident survenu à Monsieur Mc Laine. Celui dans lequel... Eh bien, vous avez compris. Tous les employés de maison précédents furent éloignés. Il semble que Monsieur Mc Laine était un homme très gai, plein d’envie de vivre, toujours joyeux. Malheureusement maintenant les tout a changé ”.

      “Comment s’est-t-il passé? Je veux dire... L’accident? C’est-à-dire... pardonnez ma curiosité, elle est impardonnable”. Je me mordis les lèvres, craintive d’être mal comprise.

      Elle hocha la tête. “Il est normal de se poser des questions, il appartient à la nature humaine. Je ne sais pas ce qu’il s’est passé précisément. Au village ils m’ont dit que Monsieur Mc Laine devait se marier justement le jour après l’accident de voiture, et évidemment rien n’en est sorti. Certains disent qu’il était ivre, mais c’étaient des rumeurs sans aucun fondement, à mon avis. Ce dont on sait pertinemment est qu’il sortit de la route pour éviter un enfant”.

      Ma curiosité se raviva, alimentée par ses mots. “Enfant? J’avais lu sur internet que l’accident s’est passé le nuit ”.

      Elle haussa les épaules. “Oui, il semble qu’il s’agissait du fis de l’épicier. Il avait échappé de sa maison puisqu’il s’était mis dans la tête de de se joindre à la compagnie du cirque, en tournée dans la zone”.

      Je revins sur celle nouvelle. Cela expliqua les changements brusques d’humeur de Monsieur Mc Laine, sa mauvaise humeur pérenne, son malheur. Comment ne pas le comprendre? Son monde s’était effrité, brisé, par effet d’un destin scélérat. Un homme jeune, riche, beau, écrivain de succès, en train d’accomplir son rêve d’amour... Et dans peu de secondes perdre la plupart de celui qu’il possédait. Je n’aurais jamais pu éprouver une telle malchance, je pouvais seulement l’imaginer. On ne peut pas perdre ce qu’on n’a pas. Ma seule compagnie était le Néant, il y a toujours.

      Un coup d’œil rapide à la montre me confirma qu’il était temps de s’en aller. Mon premier jour de travail. Mon cœur accéléra, et dans une lueur de lucidité je me demandai s’il dépendait du nouveau travail, ou du mystérieux propriétaire de celle maison.

      Je montai les marches deux par deux, dans la crainte irrationnelle d’arriver en retard. Dans le couloir je rencontrai Kyle, l’infirmier factotum. “Bonjour”.

      Je ralentis, en ayant honte de mon empressement. Je devais lui sembler une insécure, ou pire une exaltée.

      “Bonjour”.

      “Mademoiselle Bruno, n’est-ce pas? Puis-je vous tutoyer? Mais enfin nous sommes dans le même bateau, à la merci d’un fou furieux ”. La grossière et brutale vilénie de ses mots me laissa surprise.

      “Je le sais, Je suis irrespectueux envers mon employeur, etcétéra etcétéra. Tu apprendras très tôt à être d’accord avec moi. Comment t’appelles-tu?”

      “Mélisande”.

      Il ébaucha une révérence sinistre. “Heureux de faire ta connaissance, Mélisande aux cheveux rouges. Ton nom est vraiment étrange, il n’est pas écossais... Même si tu sembles plus écossaise que moi”.

      Je fis un sourire par courtoisie, et je cherchai à le dépasser, ayant encore peur d’arriver en retard. Mais il me bloquait la voie, arrêté, avec ses jambes écartées, sur le palier. Il fut l’intervention arrivée à point nommé d’une troisième personne à démêler la situation.

      “Mademoiselle Bruno! Je déteste les retards!” Le cri provenait indubitablement par mon nouvel employeur, et mes cheveux se dressèrent sur la nuque.

      Kyle se déplaça tout de suite, en me permettant de passer. “Bonne chance Mélisande aux cheveux rouges. Tu en aura besoin”.

      Je lui donnai un regard féroce, et je courus vers la porte au fond du couloir. Elle était semi-fermée, et un anneau de fumée en sortait.

      Sébastian Mc Laine était assis derrière le bureau, de même que le jour avant, un cigare entre les doigts, le visage inflexible.

      “Fermez la porte, S’il vous plait. Ensuite venez à vous asseoir. Nous avons déjà perdu assez de temps, tandis que vous étiez en train de fraterniser avec le reste du personnel”. Le ton était rude, insultant.

      Un mouvement de rébellion me poussa à répondre, un agneau téméraire face à une hache.

      “Il était seulement une normale courtoisie. Ou peut-être que vous préfériez une secrétaire grossière? Dans ce cas je peux même plier bagage. Toute de suite”.

      Ma réponse impulsive lui prit au dépourvu. Son visage s’éclaira par la surprise, le même que probablement j’étais en train de refléter. Je n’avais jamais été si audace.

      “Et moi que je l’avais déjà stéréotypée comme un chien sans dents... J’ai été trop précipité... Vraiment précipité”.

      Je m’assis face de lui, les jambes qui me flageolaient déjà, contrite par ma franchise impulsive. Et terrorisée par les conséquences potentielles, explosives.

      Mon employeur ne semblait pas offensé, au contraire. Il souriait. “Quel est votre nom de Baptême, Mademoiselle Bruno?”

      “Mélisande” Je répondis automatiquement.

      “De Debussy, Je présume. Vos parents étaient passionnés de musique? Des concertistes, peut-être?”

      “Mon père était mineur” je confessai à contrecœur.

      “Mélisande... Un nom grandiloquent pour la fille d’un mineur” observa-t-il, la voix vibrante d’un rire retenu. Il était en train de se moquer de moi, et au mépris des intentions du jour avant, je n’étais pas sûre de le vouloir lui permettre. Ou celle-ci aurait devenu son activité préférée.

      Je redressai les épaules, en cherchant de récupérer la tenue perdue. “Et Sébastian, pourquoi? De Saint Sébastien, peut-être? Une choix vraiment incohérente”.

      Il recevait le coup, en faisant la moue pendant un instant infinitésimal. “Arrache les griffes, Mélisande Bruno. Je ne suis pas en guerre avec toi. Si je le fusse, tu n’aurais aucune espérance de vaincre. Jamais. Néanmoins dans tes rêves les plus hardis”.

      “Je ne rêve jamais, monsieur” répondis-je de la façon la plus digne possible.

      Il sembla surpris par ma réponse, grondante de sincérité. “Tu as de la chance donc. Les rêves sont toujours un piège. S’ils sont des cauchemars, ils troublent le sommeil. S’ils sont beaux, le réveil sera doublement amer. Il est mieux de ne pas rêver, après tout ”. Ses yeux ne se détachaient pas des miens, charmeurs. “Tu es un personnage intéressant Mélisande. Tu es une petite chose, mais amusante” ajouta-t-il, le ton gouailleur.

      “Heureuse d’avoir les qualités requises pour ce travail, donc” commentai-je ironiquement.

      Je me torturai la lèvre inférieure avec les dents, dépassée encore par le repentir. Qu’est-ce qu’il m’arrivait? Je n’avais jamais réagi avec une telle déplorable impulsivité. Je devais y mettre un terme, avant de perdre complètement le contrôle.

      Son sourire maintenant allait d’une oreille à l’autre, impudemment amusé. “Tu les as vraiment. Je suis sûr qu’on s’entendra bien. Une secrétaire qui ne sait pas rêver, comme son chef. Il y a une affinité élective entre nous, Mélisande. D’âmes, en quelque sorte. S’il n’était qu’un entre nous n’en a plus une, et il y a longtemps désormais...”

      Avant que je pusse donner un sens à ses mots obscurs, il devint sérieux, les yeux encore détachés, l’expression imperscrutable, loin, sans vie.

      “Tu dois envoyer le fax des premiers chapitres du livre à mon éditeur. Tu sais comment faire?”

      J’hochai la tête, et en


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