La Fille Aux Arcs-En-Ciel Interdits. Rosette

La Fille Aux Arcs-En-Ciel Interdits - Rosette


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j’étais injuste. La vérité était que, après avoir rencontré l’énigmatique et compliqué Sébastian Mc Laine, il était difficile de trouver quelqu’un à sa hauteur. Je me donnais mentalement de la stupide. Pathétique et banal tomber dans le filet tendu par le bel écrivain. Il était seulement mon employeur, et je ne voulais pas finir comme millions d’autres secrétaires, tombées amoureuses sans espoir de leurs chefs. Fauteuil roulant ou non, Sébastian Mc Laine était hors de ma portée.

      Incontestablement.

      “Je vais à l’étage supérieur” dis-je. “Quel est d’habitude la durée des visites?”

      La gouvernante rit joyeusement. “Bien plus que ce que Monsieur Mc Laine peut supporter”. Elle se lança dans une série de contes ayant comme sujet les visites médicales. Je les tuais dans l’œuf, avec la conviction bien fondée que si je ne l’aurais fait à temps je me serais trouvée encore là, à l’écoute ininterrompue, le mardi suivant.

      J’étais sur le palier, mes pas amortis par les tapis doux, quand je vis Kyle sortir d’une chambre de lit. Il me parût que c’était celle de notre commun employeur.

      Il me vit et il me fit signe de façon confidentielle. Je restai sur la réserve, déterminée à ne l’encourager pas. Madame Mc Millan avait raison, pensai-je, tandis qu’il se rapprochait. Il y avait quelque chose de profondément dérangeant en lui.

      “Tous les mardis la même rengaine. Je voudrais que Mc Intosh arrêtât ces visites inutiles. Le résultat est toujours le même. Après qu’il sera parti, ce serait à moi de subir la mauvaise humeur de son patient ”. Son sourire s’élargit. “Et toi”.

      J’haussai les épaules. “C’est notre travail, non? Nous sommes payés même pour ça?”

      “Peut-être pas assez. Il est vraiment insupportable”. Le ton de sa voix était si irréfléchi qui me laissa stupéfaite. Je n’étais pas sûre qu’il s’agissait seulement de la franchise typique des villageois, spontanés dans ses évaluations émoussée. Quelque chose d’autre se passait, comme une sorte d’envie vers ceux qui pouvaient se permettre de ne pas travailler, si ce n’était pour hobby, comme Mc Laine. Envie pour lui, même s’il était relégué sur un fauteuil roulant, plus emprisonné qu’un forçat.

      “Tu ne devrais pas parler comme ça” le réprimandai-je, en baissant la voix. “Et s’il entendait?”

      “Ce n’est pas facile de trouver du personnel dans ces lieux. Il serait difficile de me remplacer”. Il le dit comme un fait établi, condescendant, comme s’il était en train de lui faire une faveur. Les mots étaient identiques à ceux de Mc Laine, je me rendis compte de leur vérité intrinsèque.

      “Ici il n’y pas d’occasion de s’amuser” poursuit-il, maintenant le ton plus insinuant. Par hasard, au moins à l’apparence, il me déplaça une mèche de cheveux sur le front. Immédiatement je reculai, dérangée par son souffle chaud sur le visage.

      “Peut-être que la prochaine fois que je te toucherai, tu l’apprécieras encore plus” dit-il, pas du tout vexé.

      L’assurance avec laquelle il parla avait déclenché ma fureur souterraine. “Il n’y aura pas une prochaine fois” sifflai-je. “Je ne cherche pas de distractions, sans doute pas de ce type ”.

      “Bien sûr, bien sûr. Pour le moment”.

      Je restai stoïquement silencieuse, même si j’aurais aimé de lui donner un coup dans le tibia, ou une claque sur ce visage désagréable.

      Je me dirigeai en marchant au pas le long du couloir, en ignorant son rire sourd.

      J’étais déjà en train d’ouvrir la porte de ma chambre, quand celle de Mc Laine s’ouvrit grande, et je sentis sa voix clairement, et non plus suffoquée.

      “Hors de cette maison, Mc Intosh! Et si tu veux vraiment me faire une faveur, ne retourner plus ”.

      La réponse du médecin fut calme, comme s’il était habitué à ces crises de colère.

      “Je retournerai mardi à la même heure Sébastian. Ah, je suis heureux de te trouver en bonne sangé. Ton aspect et ton corps peuvent rivaliser avec celui d’un jeune de vingt ans ”.

      “Quelle bonne nouvelle, Mc Intosh”. La voix de l’autre était cinglante d’ironie. “Je sors tout de suite à fêter. Peut-être que je vais danser”.

      Le médecin ferma la porte, sans répondre. En se tournant il me vit, et fit le signe d’un sourire fatigué. “Vous vous ferez l’habitude à son humeur fluctuante. Il est aimable, quand il le veut. C’est-à-dire, très rarement”.

      Je courus à la décharge de mon chef, loyalement. “Quiconque à sa place...”

      Mc Intosh continua à sourire. “Pas quiconque. Chacun le gère différemment, mademoiselle. Vous ferez bien de vous en souvenir. Après quinze ans il faudrait au moins se résigner. Mais je crains que Sébastian ne connaisse pas le sens de ce mot. Il est si...” Il ait une légère hésitation. “... passionnel. Au sens large du terme. Il est impétueux, volcanique, têtu. C’est une tragédie terrible que ce soit arrivé à lui”. Il secoua la tête, comme si les dessins divins lui semblaient inexplicables, ensuite il me salua brièvement et il s’en alla.

      A ce moment-là je ne savais pas quoi faire. Je vis la porte de ma chambre. Elle rayonnait une telle douceur à me donner des tournis. J’avais peur d’affronter Mc Laine après sa récente colère. Même si elle n’était pas envers moi. Encore une fois ce n’étais pas moi à décider.

      “Mademoiselle Bruno! Venez tout-de suite ici!”

      Pour dépasser celle porte épaisse de chêne devait crier à pleines poumons. Cela fut trop pour mes nerves déjà ébranlés. J’ouvris sa porte, les pieds qui se déplaçaient de la force d’inertie.

      C’était la première fois que j’entrais da sa chambre de lit, mais l’ameublement me laissa indifférent. Mes yeux furent calamités instantanément par la figure allongée sur le lit.

      “Où est Kyle?” me dit-il âprement. “C’est l’être plus indolent que je n’aie jamais connu”.

      “Je vais le chercher” m’offris-je, heureuse d’avoir une excuse plausible pour m’enfuir à toutes jambes de celle chambre, de cet homme, de ce moment.

      Il me paralysait avec la force de son regard froid. “Après. Maintenant entrez”.

      En quelque sorte la terreur que j’éprouvais s’apaisait, le temps suffisant à me faire entrer dans sa chambre la tête haute.

      “Puis-je faire quelque chose pour vous?”

      “Et qu’est-ce que pourriez-vous faire?” Un frisson d’ironie lui secoua les lèvres pulpeuses. “Me céder vos jambes? Vous le feriez, Mélisande Bruno? S’il était possible? Quelle est la valeur de vos jambes? Un million, deux millions, trois millions de sterlings?”

      “Je ne le ferais jamais pour argent ” répondis-je d’un seul jet.

      Il s’appuya sur les coudes, et il me regarda fixement. “Et pour amour? Vous le feriez pour amour, Mélisande Bruno?”

      Il était en train de se moquer de moi, comme d’habitude, je me dis. Et pourtant, pendant quelques instants, j’ai eu l’impression que rafales de vent invisibles étaient en train de me pousser entre ses bras. Cet instant de folie momentanée passa, et je réveillai, en me rappelant que j’étais face à un inconnu, et non pas le scintillant prince de l’armature brillant que je n’étais néanmoins capable de rêver. Et bien sûr non pas un homme qui ne pouvait pas tomber amoureux de moi. Dans des circonstances normales je n’aurais jamais été dans celle chambre à partager le moment plus intime d’une personne. Celui dans lequel il est sans masques, dépourvu de toute défense, dénué de toute formalité imposée par le monde externe.

      “Je


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