Dictionnaire érotique moderne. Alfred Delvau

Dictionnaire érotique moderne - Alfred Delvau


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nombre de manières de s’exprimer, n’apportent-elles pas dans la société? Il faut en exposer ici quelques exemples.

       Qu’une femme à qui vous parlerez d’un voyage agréable et curieux que vous aurez fait, vous dise: Je meurs d’envie de le faire, les sots éclatent de rire, et les fausses prudes rougissent.

       Céliante se donne la torture pour mettre son gant trop étroit pour sa main; vous n’oseriez jamais lui dire: Madame, voulez-vous que je vous le mette? ni même: que je vous l’ôte? parce que notre esprit corrompu va plus loin que les termes propres ne signifient, et qu’il suppose que, pour l’ôter, il faut l’avoir mis, et qu’il soit dedans.

       Si vous vous servez de ces termes simples, vous passez pour un sot, ou du moins pour un mauvais plaisant.

       A peine est-il permis de dire que la Marne se décharge dans la Seine, ou qu’un fusil est chargé.

       Nos dévots, même de la première classe, avoient voulu faire passer cette réformation prétendue de style jusque dans la manière de faire des enfants à sa femme, et trouvant une idée trop libertine, et une façon trop peu décente de se mettre dessus à nu, ils avoient imaginé de faire un trou chacun à leur chemise, pour opérer, disoient-ils, plus modestement et plus convenablement le grand œuvre de la propagation du genre humain.

       Je laisse à juger si ceux qui en agissent ainsi n’ont pas l’imagination plus déréglée que ceux qui tout uniment se mettent dessus, dans la simple nudité que la sage nature nous a donnée.

       Avec quelque pureté d’intention que vous employiez les mots d’enfiler, remuer, branler, large, étroit, se retirer et cent autres, ils réveillent à présent des idées licencieuses. Personne n’ignore le rire scandaleux qu’ont excité, dans les derniers temps, ces quatre vers du grand Corneille:

      Dis-moi donc, lorsqu’Othon s’est offert à Camille,

       A-t-il paru contraint? A-t-elle été facile?

       Son hommage auprès d’elle, a-t-il eu plein effet?

       Comment l’a-t-elle pris? Et comment l’a-t-il fait?

       La saine raison, lorsqu’elle conduisoit les hommes, ne leur avoit point appris à faire une distinction imaginaire d’une expression supposée gratuitement malhonnête, avec une autre qui ne blesse point la pudeur.

       On prononce le mot crime sans remords, comme celui de vertu sans édification; on croit avec justice n’être point garant des idées opposées que l’un et l’autre présentent. Par quel égarement va-t-on déshonorer d’autres termes, qui ont le même droit d’être au rang de ceux qui composent la langue? Pourquoi les exclure de la conversation et des ouvrages littéraires, où souvent ils seraient si naturellement amenés?

       Table des matières

      PAR

      UN PROFESSEUR DE LANGUE VERTE

      Abandonner (S’). Se livrer complétement à un homme, lui ouvrir bras et cuisses, lui laisser faire tout ce que lui conseillent son amour et sa lubricité.

      Ce n’est pas le droit naturel

       A fille de s’abandonner.

       (Farces et Moralités.)

      Si ma femme, impatiente de ma langueur, à autrui se abandonne.

      Rabelais.

      Lise, qui partout s’abandonne,

       Ne fait qu’en flatter son mari.

      Théophile.

      Abatteur de bois. Fouteur,—son outil étant considéré comme une cognée, et la nature de la femme, à cause de son poil, comme une forêt.

      Il n’étoit pas grand abatteur de bois, aussi étoit-il toujours cocu.

      Tallemant des Réaux.

      Les beaux abatteurs de bois sont, comme les rois et les poëtes, des raræ aves.

      Baron Wodel.

      Ce Jacques était un grand abatteur de bois remuant.

      (Moyen de parvenir.)

      Il lui présenta cent mille choses que ces abatteurs de femmes savent tout courant et par cœur.

      (Les Cent Nouvelles nouvelles.)

      Je me connais en gens;

       Vous êtes, je le vois, grand abatteur de quilles.

      Régnier.

      Abbaye de Clunis (L’). Le cul,—de clunis, fesse, croupe,—une abbaye qui ne chômera jamais faute de moines.

      Abbaye de s’offre à tous. Bordel, dont les victimes cloîtrées s’offrent volontiers à tout venant qui tient à communiquer avec elles sur l’autel de leur dieu des jardins.

      Abbesse. Grosse dame qui tient un pensionnat de petites dames à qui on n’enseigne que les œuvres d’Ovide et de Gentil-Bernard: autrement dit Maîtresse de bordel,—le bordel étant une sorte de maison conventuelle habitée par d’aimables nonnains vouées, toutes au dieu de Lampsaque.

      Lorsque tu vas rentrer, ton abbesse en courroux

       Te recevra bien mal et te foutra des coups.

      Louis Protat.

      Abeilard. Nom qu’on donne à tout homme qui se trouve dans le cas de cet abbé, dont il est question dans les Contes d’Eutrapel, lequel en ses jeunes ans «avoit perdu ses deux témoins instrumentaires.»

      Abeilardiser. Rendre un homme impuissant en le châtrant, comme fit le chanoine Fulbert à l’amant d’Héloïse.

      D’un colonel vous courtisez la femme;

       Surpris, il vous abeilardisera.

      Pommereul.

       Aboucher (S’). Avoir trouvé chaussure à son pied, et mettre son pied—à moelle—dedans.

      On veut chercher

       A s’aboucher.

      Collé.

      Abouler de la braise. Payer une fille, lui donner le salaire du plaisir qu’elle va vous donner—avec la vérole ou la chaude-pisse.

      Ça me semble tout drôle d’avoir à abouler d’la braise au lieu d’en recevoir.

      Lemercier de Neuville.

      —Ange! murmurai-je, plein d’aise

       Comme un amoureux innocent.

       —Il faut abouler de la braise,

       Me dit-elle en me repoussant.

      A. Delvau.

      Abricot de la jardinière (L’). La nature de


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