Dictionnaire de la langue verte. Alfred Delvau
qui ne se doutent pas qu'ils se permettent une impertinence inventée par Claude Le Petit, un poète brûlé en Grève pour moins que cela.
ARCHIPOINTU, s. m. Archevêque.—dans l'argot des voleurs, qui ont trouvé plaisant de travestir ainsi le mot archi-épiscopus.
ARCHI-SUPPÔT DE L'ARGOT, s. m. Docteur ès filouteries.
ARÇONNER, v. a. Parler à quelqu'un, l'apostropher, le forcer à répondre. Argot des voleurs.
Pierre Sarrazin avait déjà employé ce mot dans le même sens, en l'écrivant ainsi: arresoner; je l'ai cherché en vain dans les dictionnaires. D'un autre côté, les voleurs disent: Faire l'arçon, pour signifier: Faire le signal de reconnaissance ou d'avertissement, qui est, paraît-il, le bruit d'un crachement et le dessin d'un C sur la joue droite, près du menton, avec le pouce de la main droite.
ARCPINCER ou Arquepincer, v. a. Prendre, saisir quelqu'un ou quelque chose. Argot des faubouriens.
ARDENT, s. m. Chandelle,—dans l'argot des voleurs, qui ont emprunté cette expression, avec tant d'autres, à l'argot des Précieuses.
ARDENTS, s. m. pl. Les yeux,—dans le même argot.
ARGENT MIGNON, s. m. Argent destiné à satisfaire des curiosités ou des vanités,—dans l'argot des bourgeoises, à qui le superflu est nécessaire, et qui, plutôt que de s'en passer, le demanderaient à d'autres qu'à leur mari.
ARGOT, s. m. Imbécile,—dans le langage des voleurs.
ARGOTIER, s. m. Voleur,—dont l'argot est la langue naturelle.
ARGUCHE, s. m. Argot.
Arguche, arguce, argutie. Nous sommes bien près de l'étymologie véritable de ce mot tant controversé: nous brûlons, comme disent les enfants.
ARGUEMINE, s. f. Main,—dans l'argot des voleurs.
ARISTO, s. des deux g. Apocope d'Aristocrate, qui, depuis 1848, signifie Bourgeois. Réactionnaire, etc.,—dans l'argot des faubouriens, qui ne se doutent pas que ce mot signifie le meilleur, l'excellent, αριστος [grec: aristos].
Ils disent aristo pour aristocrate, comme sous la Fronde les pamphlétaires disaient Maza pour Mazarin.
ARLEQUIN, s. m. Plat à l'usage des pauvres, et qui, composé de la desserte des tables des riches, offre une grande variété d'aliments réunis, depuis le morceau de nougat jusqu'à la tête de maquereau. C'est une sorte de carte d'échantillons culinaires.
ARMÉE ROULANTE, s. f. La chaîne des forçats,—supprimée depuis une cinquantaine d'années.
ARNACHE, s. m. Agent de police,—dans l'argot des voleurs.
ARNACHE, s. f. Tromperie, trahison, dans l'argot des voyous.
A l'arnache. En trompant de toute manière.
Être à l'arnache. Être rusé, tromper les autres et ne jamais se laisser tromper par eux.
ARNAU, s. m. Mauvaise humeur,—dans l'argot des voleurs et des faubouriens.
C'est une contraction de Renauder.
ARNELLE, n. de l. Rouen,—dans l'argot des voleurs.
ARNELLERIE, s. f. Rouennerie.
ARPAGAR, n. de l. Arpajon, près Paris,—dans le même argot.
ARPIONS, s. m. pl. Les pieds de l'homme, considérés—dans l'argot des faubouriens—comme griffes d'oiseau, à cause de leurs ongles que les gens malpropres ne coupent pas souvent.
ARQUER (S'). Se courber en vieillissant. Argot du peuple.
ARRACHER DU CHIENDENT, v. n. Chercher pratique, ou plutôt victime,—dans l'argot des voleurs, qui n'exercent ordinairement que dans les lieux déserts.
ARRACHER SON COPEAU, v. a. Travailler courageusement, faire n'importe quelle besogne avec conscience. Argot des ouvriers.
ARRÊTER LES FRAIS, v. a. Interrompre un récit; laisser une affaire en train; renoncer à poursuivre une entreprise au bout de laquelle on ne voit que de l'ennui. Argot du peuple.
ARROSER SES GALONS, v. a. Offrir à boire à ses camarades quand on est reçu sous-officier. Argot des soldats.
ARROSER UN CRÉANCIER, v. a. Lui donner un acompte,—dans l'argot des bohèmes, assez mauvais jardiniers.
ARROSEUR DE VERDOUZE, s. m. Jardinier, dans l'argot des voleurs.
ARSENAL, s. m. Arsenic,—dans le même argot.
ARSOUILLE, s. m. Homme canaille par ses vêtements, ses mœurs, son langage. Argot du peuple.
Milord L'Arsouille. Tout homme riche qui fait des excentricités crapuleuses.
ARSOUILLER, v. a. et n. Engueuler,—dans l'argot des faubouriens.
ARTHUR. Amant de cœur,—dans l'argot de Breda-Street.
ARTHURINE, s. f. Femme légère,—la femelle naturelle de l'Arthur. Argot du peuple.
ARTICLIER, s. m. Homme de lettres parqué dans la spécialité des articles de petits journaux.
Le mot a été créé par H. de Balzac.
ARTIE, s. m. Pain,—dans l'argot des voleurs, d'aujourd'hui et d'autrefois, ainsi qu'il résulte du livre d'Olivier Chéreau, le Langage de l'Argot réformé, publié au XVIe siècle.
Artie de Meulan. Pain blanc.
Artie de Gros-Guillaume. Pain noir.
Artie de Grimault. Pain chanci.
On dit aussi Arton et Lartie.
ARTILLEUR, s. m. Ivrogne, homme qui boit beaucoup de canons. Argot des ouvriers.
ARTILLEUR A GENOUX, s. m. Infirmier militaire,—dans l'argot du peuple, qui a entendu parler des mousquetaires à genoux des siècles précédents.
On dit aussi Artilleur de la pièce humide.
ARTISTE, s. m. Médecin vétérinaire,—dans l'argot des faubouriens et des paysans.
ARTON. V. Artie.
AS DE CARREAU, s. m. Le sac du troupier, à cause de sa forme.
On l'appelle aussi Azor,—à cause de la peau de chien qui le recouvre.
AS DE CARREAU, s. m. Le ruban de la Légion d'honneur,—dans l'argot des voleurs, qui font allusion à la couleur de cette décoration.
ASINVER, v. a. Abêtir quelqu'un,—dans l'argot des voleurs, pour qui les honnêtes gens sont des sinves.
ASPERGE MONTÉE, s. f. Personne d'une grandeur démesurée et, avec cela, maigre. Argot du peuple.
ASPIC, s. m. Avare,—dans l'argot des voleurs.
ASPIC, s. m. Mauvaise langue, bavard indiscret. Argot du peuple.
ASSEOIR (S'). Tomber.
Envoyer quelqu'un s'asseoir. Le renverser, le jeter à terre. Signifie aussi se débarrasser de lui, le congédier.
ASSISTER, v. a. Porter le pagne à un détenu,—dans l'argot des voleurs et des filles.
ASSOCIÉE, s. f. Femme légitime. Argot des typographes.
ASSOMMOIR, s. m. Nom d'un cabaret de Belleville, qui est devenu celui de tous les cabarets de bas étage, où le peuple boit des liquides