Dictionnaire de la langue verte. Alfred Delvau

Dictionnaire de la langue verte - Alfred Delvau


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(même signification), qui vient lui-même du fur (voleur de nuit), de Cicéron.

       AFFURER, v. a. Tromper, faire un profit illicite.

       AFFUT (D'). Rusé, malin, habile. Argot du peuple.

      On dit aussi homme d'affût.

       AFFÛTER, v. a. Tromper quelqu'un, le surprendre. Argot des voleurs.

       AFFUTER SES PINCETTES. Courir, ou seulement marcher. Argot des faubouriens.

       AFFUTIAUX, s. m. pl. Bagatelles, brimborions quelconques,—dans l'argot des ouvriers, qui ont emprunté cette expression au patois des paysans.

       AGATE, s. f. Faïence quelconque,—dans l'argot des voleurs.

       AGATER, v. n. Recevoir des coups, être pris,—étrenner de n'importe quelle façon. Argot des faubouriens.

       AGOBILLE, s. f. Outil,—dans l'argot des voleurs.

       AGONIR, v. n. Accabler d'injures et de sottises. Argot des bourgeois et du peuple.

      Ne serait-ce pas une corruption d'abonir, faire honte, un vieux verbe français encore employé en Normandie ainsi qu'agonir.

      On dit aussi Agoniser.

       AGOUA, s. f. Eau,—dans l'argot des canotiers, qui parlent espagnol (agua) on ne sait pas pourquoi.

       AGRAFER, v. a. Arrêter, consigner. Argot des soldats et du peuple.

      Se faire agrafer. Se laisser prendre.

       AGRIPPER, v. a. Prendre à l'improviste, subitement. Argot du peuple.

      Signifie aussi filouter, dérober adroitement.

      Agripper (S'). Se prendre aux cheveux avec quelqu'un.

       AHURI DE CHAILLOT, s. m. Imbécile, homme un peu braque. Argot des faubouriens.

      (V. A Chaillot!)

       AÏ, s. m. Vin de Champagne,—dans l'argot des vaudevillistes de la Restauration.

       AIDE-CARGOT, s. m. Aide de cuisine,—dans l'argot des troupiers, par corruption d'aide-gargot.

       AIE-AIE, s. m. Omnibus,—dans l'argot des faubouriens.

       AIGLEFIN, s. m. Chevalier d'industrie, escroc du grand et du petit monde, vivant aux dépens de quiconque l'écoute.

      C'est à dessein que je donne cette orthographe, qui est aussi véritable,—c'est-à-dire aussi problématique,—que l'orthographe officielle, aigrefin. Le peuple prononce le nom comme je l'écris: est-ce par euphonie, est-ce par tradition? je l'ignore, et les savants n'en savent pas plus que moi là-dessus «Aigre faim, faim très vive (homme affamé)», dit Littré. Sans doute, mais il y a eu jadis une monnaie dite aiglefin, et les escrocs ne sont pas moins affamés d'argent que d'autre chose.

       AIGUILLE, s. f. Clé,—dans l'argot des voleurs.

       AILE, s. f. Bras,—dans l'argot des faubouriens, l'homme étant considéré par eux comme une oie.

      On dit aussi Aileron.

       AIMANT, s. m. Embarras, manières, épate. Même argot.

      Faire de l'aimant. Faire des embarras, protester hypocritement de son amitié pour quelqu'un, afin de l'attirer à soi.

       AIMER A CRÉDIT, s. a. Être l'amant de cœur d'une femme entretenue,—dans l'argot de Breda-Street, où cependant,

      «Tout en chantant Schubert et Webre,

      On en vient à réaliser

      L'application de l'algèbre

      A l'amour, à l'âme, au baiser.»

      On dit aussi Aimer à l'œil.

       AIMER QUELQU'UN COMME SES PETITS BOYAUX, v. a. l'aimer extrêmement.—Argot du peuple.

      On dit aussi Aimer quelqu'un comme la prunelle de ses yeux.

       A LA CLÉ. Façon de parler explétive des comédiens, qui entendent fréquemment leur chef d'orchestre leur dire: «Il y a trois dièzes ou trois bémols à la clé,» et qui ont retenu l'expression sans en comprendre le sens exact. Ainsi: Il y a des femmes, ou des côtelettes à la clé, signifie simplement: Il y a des femmes,—ou des côtelettes.

       ALARMISTE, s. m. Chien de garde. Argot des voleurs.

       ALÈNES, s. f. pl. Outils de voleur, en général,—sans doute à cause de leur forme subulée.

       ALENTOIR, adv. Aux environs, alentour. Argot des voleurs.

       ALIGNER, v. n. Mettre le couvert,—dans l'argot des francs-maçons.

       ALIGNER (S'). Se battre en duel,—dans l'argot des troupiers.

       ALLER (S'en). Vieillir,—dans l'argot de Breda-Street, où l'on s'en va aussi vite que les roses.

       ALLER A LA CHASSE AVEC UN FUSIL DE TOILE, v. n. Mendier, porter la besace. Argot du peuple.

       ALLER A LA COUR DES AIDES. Se dit d'une femme qui trompe son mari en faveur d'un ou de plusieurs amants.

      L'expression date de l'Histoire comique de Francion.

       ALLER A L'ARCHE, v. n. Aller chercher de l'argent. Argot des voyous.

       ALLER A LA RETAPE, v. n. Attendre quelqu'un sur une route pour l'assassiner. Argot des prisons.

       ALLER A L'ASTIC. Astiquer son fourniment. Argot des soldats.

       ALLER A NIORT, v. a. Nier,—dans l'argot des voleurs, qui semblent avoir lu les Contes d'Eutrapel.

       ALLER A SES AFFAIRES. Ce que les Hébreux appellent hesich raglaw, les Anglais to shit, les Espagnols cagar, les Flamands schijten, les Italiens cacare, et les Grecs χεζειν [grec: chezein].

      «Autrefois, chez le roi, on appelait chaise d'affaires, la chaise percée, et brevet d'affaires le privilège d'entrer dans le lieu où le roi est sur sa chaise d'affaires.»

       ALLER AU CARREAU, v. n. Aller pour se faire engager,—dans l'argot des musiciens de barrières, qui chaque dimanche ont l'habitude de se réunir sur le trottoir de la rue du Petit-Carreau, où les chefs d'orchestre savent les rencontrer.

       ALLER AU PERSIL. Sortir pendant le jour, aller se promener,—dans l'argot des filles libres, qui, à leur costume de grisettes d'opéra-comique, ajoutent l'indispensable petit panier pour avoir l'air d'acheter... rien du tout, le persil se donnant pour rien chez les fruitières, mais en réalité pour se faire suivre par les flâneurs amoureux.

      On dit également: Cueillir du persil et Persiller.

       ALLER AU POT. Prendre dans des dominos restants. Argot des joueurs.

      On dit aussi Fouiller au pot.

       ALLER AU SAFRAN. v. n. Manger son bien,—dans l'argot des bourgeois qui disent cela depuis longtemps.

       ALLER AU TROT, v. n. Se dit—dans l'argot des faubouriens—d'une fille en toilette de combat qui va «faire le boulevard».

       ALLER AU VICE. Hanter les mauvais lieux,—dans l'argot des bourgeois.

       ALLER AUX PRUNEAUX. Plaisanterie qu'on fait à l'hôpital, à tout nouveau venu qui paraît un peu naïf; elle consiste à l'engager à aller demander son dessert dans une salle voisine, à tels ou tels malades qu'on désigne. Celui qui a l'imprudence d'aller aux pruneaux est alors accueilli à coups de traversin, comme l'innocent qui va le 1er avril


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