La Nation canadienne. Ch. Gailly de Taurines

La Nation canadienne - Ch. Gailly de Taurines


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droits seigneuraux et féodaux quand dus seront, vous requérant me recevoir à la dite foy et hommage17.» Le résultat pratique de cette pompeuse procédure est la promesse, faite par le censitaire à la fin du procès-verbal, d'acquitter les droits qu'il avait sans doute omis de payer jusqu'alors. Détour bien long et bien curieux pour en arriver là; curieux surtout lorsque, sous la pompe des qualifications, l'on reconnaît les personnages: le seigneur de Beauport un chirurgien de province, son manoir une ferme, son vassal, Jean Guyon, un maçon du Perche, qui eût été bien embarrassé sans doute de se présenter autrement que sans espée ni esperons devant la porte de son seigneur.

      Ces formes vieillies ne furent guère appliquées au Canada et cet exemple curieux est peut-être le seul que l'on cite. Il en est de même pour un droit qui, en Europe, avait été attaché à la propriété féodale: le droit de justice. Il avait déjà à peu près disparu en France au dix-septième siècle. Au Canada il demeura en fait lettre morte. Ce n'est qu'en 1714, il est vrai, qu'un édit défendit d'accorder des seigneuries «en justice», mais jusque-là, comme pour entretenir des tribunaux, les seigneurs auraient été obligés d'en supporter tous les frais, ils se gardèrent d'user du droit onéreux qui leur était laissé, et l'administration judiciaire tout entière demeura aux magistrats du Roi.

      Ainsi les concessions seigneuriales, loin d'être un abus, une entrave à la colonisation, comme l'ont prétendu certains historiens américains, furent au contraire très favorables au peuplement et à la mise en valeur des colonies; elles favorisaient l'émigration parmi la classe aisée et encourageaient la culture des terres.

      Le système colonial de Colbert fut en somme judicieux et habile. Il eut cependant un défaut, et ce défaut devait faire la faiblesse de l'œuvre tout entière et devenir une des causes de sa ruine: l'excès de centralisation!

      Tandis que les colonies anglaises jouissaient d'une liberté locale qui laissait toute latitude à leur initiative et facilita leur merveilleux développement, les colonies françaises demeurèrent toujours soumise à une étroite sujétion envers leur métropole. Règlements, ordonnances, tout arrivait de France, et c'est du ministère que la colonie était gouvernée. Jamais il ne fut permis aux colons de prendre la moindre part à l'administration de leur propre pays, même dans les affaires qui ne touchaient qu'aux intérêts locaux.

      L'élection des syndics demeura--tant qu'elle eut lieu--si subordonnée au pouvoir, qu'elle ne devait pas pourtant être considérée comme bien dangereuse. En 1664, lors de l'élection d'un syndic de Québec, le gouverneur, M. de Mézy, choisit lui-même les électeurs, et ne convoqua par billet que les personnes «non suspectes». (Garneau, t. I, p. 179.)

      Quand, en 1721, pour les besoins de l'organisation religieuse, les habitations répandues sur les deux rives du Saint-Laurent, entre Montréal et Québec, furent réparties en paroisses par le gouverneur, marquis de Vaudreuil, et l'intendant Bégon, l'administration de ces paroisses fut confiée non aux paroissiens, mais au conseil supérieur de la colonie. Les officiers qui, dans chacune d'elles, étaient chargés d'exécuter les décisions de ce conseil, dépendaient eux-mêmes d'une façon plus ou moins directe de l'administration; c'étaient le curé, le seigneur et le capitaine de la milice.

       Table des matières

      PERTE


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