Toutes les Oeuvres Majeures de Cicéron. Ciceron

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M’. Manilius, consul en 604, avec L. Marcius Censorinus.

       De l’Invention

      Cicéron

      De l’Invention

      -85

      traduction sous la direction de M. Nisard, 1840

       LIVRE PREMIER

      I. J’ai souvent examiné dans de longues méditations, si le talent de la parole et l’étude approfondie de l’éloquence ont été plus avantageux que nuisibles à l’homme et à la société. En effet, si je considère les maux qui ont déchiré notre patrie, si je me rappelle les catastrophes qui ont bouleversé autrefois les cités les plus florissantes, partout je vois la plus grande partie de ces malheurs causée par des hommes éloquents. Mais lorsque je veux, avec le secours de l’histoire, remonter à des époques plus reculées, je vois la sagesse, et plus encore l’éloquence, fonder des villes, éteindre les guerres, établir des alliances durables, et serrer les nœuds d’une sainte amitié. Ainsi, après un mûr examen, la raison elle-même me porte à croire que la sagesse sans l’éloquence est peu utile aux États, mais que l’éloquence sans la sagesse n’est souvent que trop funeste, et ne peut jamais être utile. Aussi l’homme qui, oubliant la sagesse et le devoir, s’écartera des sentiers de l’honneur et de la vertu, pour donner tous ses soins à l’étude de l’éloquence, ne peut être qu’un citoyen inutile à lui-même, et dangereux pour sa patrie ; mais s’armer de l’éloquence pour défendre, et non pour attaquer les intérêts de l’État, c’est se rendre aussi utile à soi-même qu’à son pays, et mériter l’amour de ses concitoyens.

      Si vous voulez remonter à l’origine de ce qu’on appelle éloquence, soit que vous la regardiez comme un fruit de l’étude, un effet de l’art ou de l’exercice, ou un talent naturel, vous trouverez qu’elle doit sa naissance à la plus noble cause et aux motifs les plus honorables.

      II. En effet, il fut un temps où les hommes, errant dans les campagnes comme les animaux, n’avaient pour soutenir leur vie qu’une nourriture sauvage et grossière. La raison avait peu d’empire ; la force décidait de tout. Ces barbares n’avaient nulle idée de leurs devoirs envers la Divinité ni envers leurs semblables ; point de mariage légal point d’enfants dont on pût s’assurer d’être le père ; on ne sentait point encore les avantages de l’équité. Aussi, au milieu des ténèbres de l’erreur et de l’ignorance, les passions aveugles et brutales asservissaient l’âme, et abusaient, pour se satisfaire, des forces du corps, leurs pernicieux satellites. Sans doute, dans ces temps de barbarie, un homme s’est rencontre d’une sagesse et d’une vertu supérieures, qui reconnut combien l’esprit humain était propre aux plus grandes choses, si l’on pouvait le développer et le perfectionner en l’éclairant. A sa voix, les hommes dispersés dans les champs, ou cachés dans le fond des forêts, se rassemblent


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