Manuel de la procédure d'asile et de renvoi. Constantin Hruschka

Manuel de la procédure d'asile et de renvoi - Constantin Hruschka


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de garder le secret

      Toutes les personnes présentes à l’audition, à l’exception du requérant d’asile, sont soumises à l’obligation de garder le secret. Les violations du secret de fonction et de l’obligation de garder le secret (pour les ROE en vertu de l’art. 30 al. 4 LAsi), sont punissables pénalement (art. 293 et 320 CP). Le secret de fonction et l’obligation de garder le secret impliquent en particulier l’obligation de ne pas communiquer les données aux autorités du pays d’origine ou de provenance (art. 97 al. 1 LAsi). Cependant, si la qualité de réfugié n’a pas été reconnue en première instance, les données nécessaires aux autorités compétentes pour organiser le départ, énumérées exhaustivement par la loi, peuvent être transmises aux autorités du pays d’origine (art. 97 al. 2 et 3 LAsi).

      La possibilité de procéder à un échange de données avec les autorités du pays d’origine à la suite du rejet de la qualité de réfugié en première instance déjà est problématique du fait que ce rejet n’est pas encore définitif. Une procédure de recours pourrait aboutir à son annulation et à la reconnaissance de la qualité de réfugié de l’intéressé.

      Le requérant d’asile est soumis à l’obligation de collaborer (voir art. 8 LAsi). Il doit décliner son identité et remettre à l’autorité ses documents de voyage et pièces d’identité ainsi que les éventuels moyens de preuve en sa possession ou, s’ils sont disponibles et accessibles, s’efforcer de les obtenir afin de les remettre à l’autorité. Il doit, lors de l’audition, exposer de manière détaillée et complète les motifs pour lesquels il demande l’asile en Suisse. L’obligation de collaborer, comme pendant de la maxime inquisitoire, est traitée en détail au chap. XII, pt 3.

      Les déclarations du requérant d’asile doivent être conformes à la vérité. L’asile accordé sur la base de fausses indications peut être révoqué (voir art. 63 al. 1 let. a LAsi ; sur la révocation de l’asile, voir chap. IX, pt 4.2).

      Les mêmes principes s’appliquent aux documents. S’ils sont faux ou falsifiés ou si la personne les utilise de manière abusive, ils peuvent être confisqués ou remis à l’ayant droit (art. 10 al. 4 LAsi et art. 121 LEtr).

      L’obligation de motiver (art. 35 PA) doit être qualifiée de corollaire du droit d’être entendu. Ce dernier exige entre autre que les arguments du requérant d’asile soient entendus par le SEM, qu’ils soient examinés avec diligence et qu’ils soient pris en considération de manière adéquate dans la décision. La motivation doit en être le reflet et permettre à la personne concernée de comprendre la décision et de l’attaquer objectivement le cas échéant.101 L’étendue de la motivation doit être adaptée à l’objet de la décision, aux circonstances de la procédure et aux intérêts de la personne concernée, les atteintes graves aux intérêts juridiquement protégés devant être motivées de manière plus détaillée que les autres.102 Cependant, la procédure d’asile touche toujours gravement les intérêts d’une personne de sorte que la motivation des décisions doit toujours être détaillée. Une violation de l’obligation de motiver peut entraîner la cassation de la décision.103

      Plus le pouvoir d’appréciation des autorités est grand ou plus les notions juridiques à appliquer sont indéterminées, plus les exigences en matière de motivation des décisions sont élevées. Les décisions positives nécessitent certes une motivation moins détaillée que les décisions négatives, mais elles doivent aussi être dûment motivées, car la motivation en cas de révocation de la qualité de réfugié (voir chap. VIII, pt 4) peut jouer un rôle décisif et doit être ainsi compréhensible. Toutefois, en pratique, les décisions positives ne sont pas motivées. Les décisions de non-entrée en matière (voir chap. VII) peuvent n’être que sommairement motivées en vertu de l’art. 37a LAsi.

      L’utilisation de considérants prérédigés dans les décisions du SEM est parfois problématique. Ils risquent d’enlever le caractère individuel de la motivation et ne correspondent pas toujours à l’intérêt personnel du requérant. Dans tous les cas, il n’est guère possible de saisir la complexité d’un état de fait dans un puzzle de considérants prérédigés avant de rendre une décision.

      La notification des décisions administratives est réglementée de manière générale aux art. 34 ss PA.

      [94]L’envoi de décisions rendues en procédure d’asile et de renvoi fait l’objet de règles spéciales à l’art. 12 LAsi.104 La notification est juridiquement valable si l’autorité envoie la décision à la dernière adresse connue du requérant d’asile ou de son mandataire et que son destinataire en prend possession. Après l’écoulement du délai postal de garde ordinaire de sept jours, la notification prend date valablement au dernier jour de ce délai, même si la décision est réceptionnée plus tard à la poste ou retourne à l’expéditeur comme non délivrée. La preuve de la notification en bonne et due forme incombe en principe à l’autorité. Une notification entachée de vices ne saurait entraîner aucun préjudice pour son destinataire (art. 38 PA). Lorsque la décision n’est pas du tout notifiée, elle ne déploie aucun effet. En cas d’une notification irrégulière, la protection qu’accorde le principe de la bonne foi varie en fonction de la situation. La jurisprudence exige que la personne concernée agisse pour clarifier sa situation juridique. S’il s’agit d’un mandataire, il devra agir avec une diligence toute particulière. Le droit à un recours effectif ne saurait toutefois être limité par une notification irrégulière de la décision, de sorte qu’un recours tardif est en règle générale, dans un tel cas, considéré comme recevable.105

      L’art. 13 LAsi contient d’autres règles spéciales pour la procédure d’asile : celles de la notification orale et par télécopie. Normalement, la notification intervient, aussi en procédure d’asile, par écrit et envoi de la décision au requérant d’asile. Une notification orale peut cependant être indiquée lorsque la motivation ne pose pas de problèmes en soi parce que les faits pertinents peuvent être rattachés sans problème aux dispositions légales, par exemple dans les cas où un élément essentiel de la qualité de réfugié au sens de l’art. 3 LAsi n’est manifestement pas réalisé. Dans un tel cas, l’autorité doit remettre au requérant un extrait de procès-verbal qui restranscrit la notification orale et la motivation de la décision. Ce type de notification est utilisé surtout dans les CEP.

      La notification peut se faire par télécopie lorsque la demande d’asile a été présentée à la frontière ou à l’aéroport (art. 13 al. 3 LAsi). Ce type de notification est également possible dans d’autres cas urgents (art. 13 al. 4 LAsi). Cependant, pour être juridiquement valable, la notification par télécopie suppose cumulativement que le cas soit urgent, que la télécopie soit signée, qu’une copie ait été remise à son destinataire et que celui-ci en confirme la réception. Si le requérant a un mandataire, il suffit de lui donner connaissance de la notification sans retard ; l’art. 11 al. 3 PA n’est pas applicable dans de tels cas. Il en va de même pour les décisions de [95]non-entrée en matière au sens de l’art. 31a al. 1 let. b LAsi (art. 13 al. 5 LAsi) qui concernent à titre primaire des procédures Dublin.

      Ce n’est qu’au moment de la notification que le requérant a la possibilité de prendre connaissance de la décision le concernant. La date à laquelle elle se produit fait partir le délai de recours (sur les délais, voir chap. XIII, pt 3.1). Une notification de la décision par publication dans un journal officiel n’entre pas en ligne de compte dans la procédure d’asile en raison de l’intérêt de la personne concernée au maintien du secret.

      Les personnes concernées ne peuvent s’exprimer efficacement sur leur cause et apporter des preuves appropriées que si elles ont accès


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